1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 M. de Montherlant, le sport et les jésuites ( 9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par plusieurs comme
2 Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924 )a M. de Montherlant est considéré par plusieurs comme l’un des hér
3 considéré par plusieurs comme l’un des héritiers de Barrès. Le rapprochement est peut-être prématuré, tout au plus peut-o
4 u’à l’heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus qu’un agrément purement littéraire : une leço
5 us qu’un agrément purement littéraire : une leçon d’ énergie. Il se pique de n’avoir pas connu, jusqu’à ce jour au moins, c
6 ent littéraire : une leçon d’énergie. Il se pique de n’avoir pas connu, jusqu’à ce jour au moins, cette inquiétude libérat
7 e inquiétude libératrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a b
8 uancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et elle a
9 bolisme ; et elle a donné naissance à la doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée et casquée pour la
10 est sortie toute formée et casquée pour la lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le mo
11 mée et casquée pour la lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de l’O
12 dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de libert
13 romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès
14 , de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philo
15 tion et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est cel
16 me, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le tra
17 therlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe de sauvegarder, avant tout autre principe. Jusqu’ici, rien d’original da
18 arder, avant tout autre principe. Jusqu’ici, rien d’ original dans cette conception simpliste du monde, qui n’est en rien d
19 simpliste du monde, qui n’est en rien différente de celle de l’Action française ; remarquons toutefois cette séparation,
20 e du monde, qui n’est en rien différente de celle de l’Action française ; remarquons toutefois cette séparation, que Maurr
21 ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le
22 la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étrein
23 t l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ».
24 ’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’
25 x pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu
26 e encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressa
27 te du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, l
28 s de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’ une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évi
29 ngeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autr
30 . de Montherlant ne s’est même pas demandé si ces deux contrepoisons pouvaient être administrés ensemble. L’opération faite,
31 justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de logique, admirablement masqués d’ailleurs par des faço
32 ui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de logique, admirablement masqués d’ailleurs par des façons cavalières u
33 . Toute une partie du Paradis à l’ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans une unité supérieure
34 « fondre dans une unité supérieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité co
35 upérieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il
36 oue-t-il franchement. Il me semble bien paradoxal de vouloir unir dans une même philosophie la morale jésuite, faite de rè
37 ans une même philosophie la morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le but de restreindre la liber
38 philosophie la morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initi
39 de règles et de contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la morale de
40 nglais, morale qui veut former des hommes maîtres d’ eux-mêmes, c’est-à-dire libres. Et cela me semble d’autant plus parado
41 eux-mêmes, c’est-à-dire libres. Et cela me semble d’ autant plus paradoxal que M. de Montherlant est justement un des premi
42 itive. Mais on peut oublier la partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable : « Ces simplification
43 ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du stade. En un styl
44 atique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du stade. En un style d’une fermeté presque brutale parfois, un
45 admirable lyrisme de poète du stade. En un style d’ une fermeté presque brutale parfois, un style de sportif, mais qu’on s
46 e d’une fermeté presque brutale parfois, un style de sportif, mais qu’on sent humaniste et poète, un style à la fois bref
47 pes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de la pensée
48 nt les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’en
49 ivresse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix
50 t aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer u
51 ée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un coureur : « À peine a-t-il
52 sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un coureur : « À peine a-t-il touché l
53 ser un coureur : « À peine a-t-il touché la piste d’ herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la douce ma
54 foulée, bondissante et posée, est pleine du désir de l’air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plu
55 us que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cette domination q
56 us comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’ équipe devient toute la morale, et les qualités indispensables au bon
57 nt les qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemb
58 on de la réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment
59 ôt sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’on pense). Enfin, enseignement plus génér
60 ien l’on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, ap
61 t plus général de la morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axiome formu
62 morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axiome formulé par Hésiode et qu
63 le de rester en dedans de son action, application de l’immense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien 
64 de que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a un brin du myrte
65 n brin du myrte civique tressé dans vos couronnes de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main
66 s couronnes de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’ olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule con
67 allon. Le regard connaît le regard dans la course d’ équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses
68 se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je demande
69 ne sont pas dites en vain. Stades que parcourent de jeunes et purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à l’heure. Qu
70 e silence jusqu’à l’heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épées. Rien de moins artificiellem
71 de ralliement, paradis à l’ombre des épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrisme sobre et prenant : « Si
72 t prenant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien
73 le sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlan
74 ue l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faible
75 us conduirait cette « éthique du sport » tempérée de raison. Ce qu’on en peut retenir, c’est la méthode, car je crois qu’e
76 it. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citation d’un dominicain : « Formez des jeunes filles assez for
77 rlant illustre sa propre pensée de cette citation d’ un dominicain : « Formez des jeunes filles assez fortes pour pouvoir t
78 our pouvoir tout lire, et il n’y aura plus besoin de roman catholique. » C’est ce qu’on pourrait appeler une « morale cons
79 qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à com
80 s : il développe ses qualités, le reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le stade, se rendra mieux
81 uitté le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera
82 laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésui
83 . L’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homm
84 oir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement
85 n, voici un homme, et non plus seulement un homme de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà l’enthousiasme d’une jeun
86 Un homme en qui s’équilibrent déjà l’enthousiasme d’ une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « limitation » qu
87 l’enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les
88 lus proche que la sensualité vaguement chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et son lyrisme, encore un peu brutal,
89 salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’ Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Pari
90 ur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2. L’attitude de M. de Montherlant légitime
91 p, hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2. L’attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification »
92  ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2. L’attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification ». a. « M. de
93 les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, n°  1571, 9 février 1924, p. 63-65.
94 suites », La Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 février 1924, p. 63-65.
95 La Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 février 1924, p. 63-65.
2 1924, Articles divers (1924–1930). Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)
96 Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1
97 Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » ( 30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du Lyceum, M. Conrad Meil
98  Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924 )b Lundi soir, dans la salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla des é
99 u xixe siècle à nos jours. Partis du classicisme de David et d’Ingres, les peintres français ont accompli, durant le xixe
100 le à nos jours. Partis du classicisme de David et d’ Ingres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, un
101 dans les domaines du romantisme, du naturalisme, de l’impressionnisme, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme et
102 près cent-vingt-cinq ans, à peu près à leur point de départ. Mais leurs recherches n’ont pas été vaines. Ils en reviennent
103 s n’ont pas été vaines. Ils en reviennent chargés de chefs-d’œuvre, et plus conscients de leurs moyens d’expression. Très
104 nent chargés de chefs-d’œuvre, et plus conscients de leurs moyens d’expression. Très maîtres de leur technique (contrairem
105 chefs-d’œuvre, et plus conscients de leurs moyens d’ expression. Très maîtres de leur technique (contrairement à ce que pen
106 cients de leurs moyens d’expression. Très maîtres de leur technique (contrairement à ce que pense souvent le public), ils
107 nse souvent le public), ils préparent l’avènement d’ un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de la
108 nouveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de la peinture moderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œu
109 une netteté et un relief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de ces mêmes
110 iste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de
111 témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaitons d’ente
112 s : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Est-il beso
113 spond à la façon de penser du peintre. Souhaitons d’ entendre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner l’importance de t
114 haitons d’entendre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner l’importance de telles prises de contact entre artiste et p
115 M. Meili. Est-il besoin de souligner l’importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b. « Conférence
116 besoin de souligner l’importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b. « Conférence Meili », Feuille
117 te et public ? b. « Conférence Meili », Feuille d’ Avis de Neuchâtel, n° 254, 30 octobre 1924, p. 6.
118 ublic ? b. « Conférence Meili », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 254, 30 octobre 1924, p. 6.
119 nférence Meili », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n°  254, 30 octobre 1924, p. 6.
120 nce Meili », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 254, 30 octobre 1924, p. 6.
121 , Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 254, 30 octobre 1924, p. 6.
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
122 enry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une tradition
123 ant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925 )a Henry de Montherlant, héritier d’une tradition chevaleresque, mè
124 un (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’ une tradition chevaleresque, mène sa vie comme une ardente aventure. L
125 ieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terriblement lucide, ce regard en arrière. Month
126 dur pour ses erreurs plus encore que pour celles de l’adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je
127 Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans
128 bre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas nous tromper en nous inquiétant de faire, à notre place modest
129 es sûrs de ne pas nous tromper en nous inquiétant de faire, à notre place modeste, si peu que ce soit pour la paix », c’es
130 ce soit pour la paix », c’est une affirmation qui d’ un coup condamne beaucoup d’antérieures protestations belliqueuses. Il
131 t une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup d’ antérieures protestations belliqueuses. Il nous montre « des Français
132 ui tiennent qu’une telle attitude est responsable de ces carnages ». Naguère il était des premiers ; il s’affirme aujourd’
133 ir contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte,
134 avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’ exalter, d’une si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Ver
135 ie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’ une si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun, et ce
136 si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils trouvaient au front. D’une p
137 dats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils trouvaient au front. D’une phrase, il justifie son livre
138 e « haut ton de vie » qu’ils trouvaient au front. D’ une phrase, il justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour les v
139 st-ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de l’auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front d
140 e mise au point ? Et venant de l’auteur du Songe, d’ un de ces hommes qui « descendirent » du front dans notre paix lassée,
141 e au point ? Et venant de l’auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front dans notre paix lassée, ne p
142 ncore transparaît un doute, parfois : « On craint d’ être injuste en décidant si… cette absence de haine ; cette épouvante,
143 aint d’être injuste en décidant si… cette absence de haine ; cette épouvante, devant la guerre… proviennent de plus d’huma
144 épouvante, devant la guerre… proviennent de plus d’ humanité ou de moins de santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre
145 vant la guerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre d’affirmation,
146 uerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre d’affirmation, une tell
147 de santé ». À maintes reprises, dans cette œuvre d’ affirmation, une telle inquiétude, un amer « à quoi bon » percèrent so
148 s quels buts ? On verra plus tard. L’urgent c’est d’ avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevées où les élémen
149 ix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vertus guerriè
150 a paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour la paix, c’est vers d
151 va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa t
152 n. Toute son œuvre pourrait se définir : la lutte d’ un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’aut
153 e que nous admirons dans le Chant funèbre. Ce mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de cette œuvre : je ne sais
154 e mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de
155 ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Pérille
156 ce de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est
157 la noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que
158 carrière de la grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que de sacrifices ne lu
159 plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les romans « intéressan
160 l est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vérité » qui brûle dans son temple intérieur, s’il veut rester digne
161 dans son temple intérieur, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consum
162 rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’ une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse, flamme d’u
163 oryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse, flamme d’une pureté si rare en notre siècle, qu’elle
164 squée. Feu consumateur de toute faiblesse, flamme d’ une pureté si rare en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque la
165 e comme cette « flamme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie.
166 ire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’ un large vent de joie. a. « Henry de Montherlant : Chant funèbre pou
167 . Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. « Henry de Montherlant : Chant funèbre pour les morts de V
168 nry de Montherlant : Chant funèbre pour les morts de Verdun (B. Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Ge
169 sset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1925, p. 380-382.
170 èque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1925, p. 380-382.
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
171 André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925 )b Sous une « vague de rêves », la logique, dernier agent de liaiso
172 e du surréalisme (juin 1925)b Sous une « vague de rêves », la logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va péri
173 une « vague de rêves », la logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du moins ce que proclame M. B
174 de rêves », la logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du moins ce que proclame M. Breton en un
175 r notre poncif moderne, — si propre à égarer dans d’ ingénieuses métaphores quiconque chercherait une idée là-dessous, — ne
176 it pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directem
177 s chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’ autant plus que les rares passages où il expose directement les princi
178 s passages où il expose directement les principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque terne manuel
179 de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque terne manuel de philosophie ou de psychanalyse. Ces principes
180 mblent au contraire tirés de quelque terne manuel de philosophie ou de psychanalyse. Ces principes ? Ils se laissent hélas
181 e tirés de quelque terne manuel de philosophie ou de psychanalyse. Ces principes ? Ils se laissent hélas résumer en un cou
182 Ils se laissent hélas résumer en un court article de dictionnaire : « Surréalisme, n.m. Automatisme psychique pur par lequ
183 utomatisme psychique pur par lequel on se propose d’ exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manièr
184 ’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de l
185 it de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé p
186 ière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en deho
187 el de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation
188 2). Le surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est
189 scientes M. Breton peut-il préconiser l’existence d’ une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule ma
190 éconiser l’existence d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde
191 le matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le
192 s le monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le poète étant un simple st
193 ommunicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette conclusion pratique : in
194 e étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette conclusion pratique : inutile de publier des
195 aits, je tire cette conclusion pratique : inutile de publier des poèmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les l
196 t, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’ eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprend
197 n poème » cette mystification est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son mani
198 e de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui servent
199 i conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui servent d’illustration à sa défense de
200 nifeste de proses — Poisson soluble — qui servent d’ illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois
201 ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’ une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ? Je comp
202 l’univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m’être parfaitement impénétrable
203 serait un très curieux poète s’il ne s’efforçait de donner raison aux 75 pages où il voulut nous persuader que tout poème
204 ux poète s’il ne s’efforçait de donner raison aux 75 pages où il voulut nous persuader que tout poème doit être une dictée
205 non corrigée du Rêve. Je reconnais à chaque ligne de Poisson soluble cette « vieillerie poétique » qui, avoue Rimbaud, ent
206 ’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’ accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dès lors, tout cet appar
207 rbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert, dès lors, tout cet appareil psychologique
208 si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté d’ un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette mystificati
209 un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont rien à dire,
210 donc en doctrine leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores co
211 sée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de raisonnements. Plaisante ironie, si cett
212 Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de raisonnements. Plaisante ironie, si cette attitude n’était qu’une pro
213 nos poncifs intellectuels. Mais elle risque bien de nous en rendre un peu plus esclaves. Car depuis Freud — dont ils se r
214 emment, — on sait ce que c’est que la « liberté » d’ un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour l’
215 t ce que c’est que la « liberté » d’un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour l’exploitation de
216 Surréalisme S.A., entreprise pour l’exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’est pas ainsi q
217 S.A., entreprise pour l’exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’est pas ainsi que nous sorti
218 r Dada S.A. Ce n’est pas ainsi que nous sortirons d’ une anarchie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendance
219 tout morales. Les tendances encore un peu vagues d’ un groupe tel que Philosophies laissent pressentir des révolutions plu
220 t en des jeux moins lassants. Dada, éclat de rire d’ un désespoir exaspéré, commandait une certaine sympathie. L’agaçant, a
221 s surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « embaument de vieilles anarchies ». L’ironie qui sauva
222 our reprendre un mot de Cocteau — ils « embaument de vieilles anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici
223 e qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’est grand dommage pour
224 dommage pour les lettres françaises qui risquent d’ y perdre au moins deux grands artistes : Aragon, Éluard. Sans oublier
225 ttres françaises qui risquent d’y perdre au moins deux grands artistes : Aragon, Éluard. Sans oublier Breton, enchanteur des
226 aire, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1925, p. 775-776.
227 èque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1925, p. 775-776.
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
228 Paul Colin, Van Gogh (août 1925 )c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art modern
229 Colin, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinqui
230 Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France su
231 ème ouvrage publié en France sur Van Gogh, depuis 1922. Il contient pourtant des vues assez neuves. M. Colin s’est contenté d
232 nt des vues assez neuves. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que d
233 uves. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions criti
234 olin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critiques s’en
235 té de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’ une telle manière que des conclusions critiques s’en dégagent avec évi
236 est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de ces jeunes gens prétentieux et sincères qui se croient une vocation,
237 se croient une vocation, végètent dans des œuvres d’ évangélisation, fondent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que
238 ’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effr
239 t-ce que c’est donc ? » Ses premiers dessins sont de gauches copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas.
240 c ? » Ses premiers dessins sont de gauches copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violen
241 sont de gauches copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaill
242 vaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’ Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique terrassant un cor
243 ue les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’avoir rien cac
244 mes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’avoir rien caché des médi
245 douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions q
246 Paul Colin de n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions qui suivent sa courte biographie fourni
247 risme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce miracle. Il nous lai
248 l nous laisse à notre émotion devant le spectacle d’ une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent
249 spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’ une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent. c. « Pa
250 ’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent. c. « Paul Colin : V
251 eder, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1925, p. 1033.
252 èque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1925, p. 1033.
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
253 Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925 )d Lucien Fabre, ingénieur, poète, chroniqueur scientifique, « Prix
254 court », curieux homme. Il se livre à des travaux de précision : il calcule un plan, un poème. Il écrit un livre sur Einst
255 tion : les faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation d’artiste ou de psychologue se glisse dans
256 et s’y bousculent ; de temps à autre une notation d’ artiste ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà le lecteur e
257 lent ; de temps à autre une notation d’artiste ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà le lecteur entraîné, ébah
258 le lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint de suivre jusqu’au bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si la l
259 ionné, contraint de suivre jusqu’au bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si la liquidation des questions traitées
260 né, contraint de suivre jusqu’au bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si la liquidation des questions traitées est
261 est rapide, elle est complète aussi. On s’étonne de ce que Fabre, disciple de Valéry, puisse rédiger des romans si bouill
262 lète aussi. On s’étonne de ce que Fabre, disciple de Valéry, puisse rédiger des romans si bouillonnants, si mal équarris.
263 comme le fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indispensable, mais il s’en
264 res qui le sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser des maladresses et des négligences. Mais on ne
265 mande pas non plus au puissant boxeur sur le ring d’ être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du brasseur
266 abevel, c’était un portrait balzacien du brasseur d’ affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitu
267  la nouvelle mise en servitude du peuple rustique de France ». En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France —
268 ats et des capitalistes des villes. Mais dans une de ces provinces du Midi où le souvenir des luttes religieuses encore vi
269 t, le libérateur va se lever. C’est un descendant de Roland le Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de la terre 
270 le Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de la terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation c
271 terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidemen
272 œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir les foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se
273 n clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’ un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et brûlant, une
274 e avait là les éléments d’un grand roman : autour d’ un sujet de vaste envergure, et brûlant, une intrigue puissante, des p
275 les éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et brûlant, une intrigue puissante, des personnages
276 brûlant, une intrigue puissante, des personnages d’ une belle richesse psychologique. En fermant le livre on a presque l’i
277 nd roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C’est plutô
278 tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œu
279 l reste que le Tarramagnou est un livre émouvant, d’ une saine puissance. Il reste que Lucien Fabre a tenté, et en somme, r
280 t en somme, réussi, une entreprise bien téméraire de nos jours : un roman à thèse aussi intelligent que vivant. d. « Luc
281 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1151-1152.
282 universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1151-1152.
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
283 Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècl
284 Les Appels de l’Orient (septembre 1925 )e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du mon
285 925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de c
286 u monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de critique pour lequel nos contemporains accumulent les documents. La l
287 mporains accumulent les documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage international. L
288 rature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage international. L’Europe menant cette immense enquête manife
289 nt l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une con
290 surtout conscience de son propre génie, l’Europe d’ aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Orient, plut
291 avec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer
292 e réelle connaissance de l’Orient, une conscience d’ elle-même. C’est peut-être pour provoquer cette confrontation seulemen
293 oriental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie
294 n peut prévoir que si le bouddhisme jouit un jour d’ un renouveau, c’est à quelques savants européens qu’il le devra, tandi
295 ques savants européens qu’il le devra, tandis que d’ un mouvement inverse, le christianisme débarrassé de son déguisement g
296 un mouvement inverse, le christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera vers ses sources pour s’y retr
297 a vers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre,
298 fort intéressant tableau des multiples réactions de l’Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, dis
299 enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André
300 lle qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car
301 de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la plupart des enquêtés se
302 « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’ André Gide en particulier). Car la plupart des enquêtés se font de l’O
303 particulier). Car la plupart des enquêtés se font de l’Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’a
304 t poétique. « Orient…, toi qui n’as qu’une valeur de symbole », a dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’il s’agit, et Jean
305 u’une valeur de symbole », a dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger le définit encore : « …
306 sé à l’esprit occidental, tout ce qui peut servir d’ antidote à sa fièvre et à sa logique. » On confond Japon et Arabie, In
307 bie, Indes et Chine sous une dénomination qui n’a de sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain de tenter un classeme
308 e sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’une extraordinaire diversit
309 t vain de tenter un classement parmi les réponses d’ une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses — qui compose
310 rents, si différentes même les conclusions tirées de points de vue semblables, qu’un esprit analytique et organisateur d’o
311 mblables, qu’un esprit analytique et organisateur d’ occidental se perdra ici dans un ensemble kaléidoscopique d’idées et d
312 al se perdra ici dans un ensemble kaléidoscopique d’ idées et de jugements contradictoires, et de termes dont le sens chang
313 a ici dans un ensemble kaléidoscopique d’idées et de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l’éc
314 pique d’idées et de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. É
315 , et de termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de
316 mes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plu
317 ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstr
318 upériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecq
319 ide dans sa « puissance de choix », dans le génie d’ abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attribuent ce
320 e dans une Europe vieillie, les parfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repous
321 rfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repoussent une Asie ignorante du thomism
322 u thomisme et ceux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’adoucira
323 homisme et ceux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’adoucira. Il
324 provisoire et qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinent toutes
325 ses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des documents. Pour
326 ar exemple, qui cependant produit un grand nombre de citations à l’appui de ses sophismes, ne se livre pas moins à des déd
327 ions in abstracto qui le mènent à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’éducation hist
328 nclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont p
329 historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la religion rom
330 listes, qui, eux, apportent des documents, savent de quoi ils parlent, ils se récusent lorsqu’il s’agit de conclure. Un éc
331 uoi ils parlent, ils se récusent lorsqu’il s’agit de conclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé la formule qui déf
332 , je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’ en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guéri
333 réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos
334 frages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous au
335 isons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la première fois
336 s entrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vites
337 conscience du monde », entre une Amérique affolée de vitesse, édifiant ses gratte-ciel comme des tours de Babel, et une As
338 vitesse, édifiant ses gratte-ciel comme des tours de Babel, et une Asie immobile dans sa méditation éternelle. e. « Les
339 e dans sa méditation éternelle. e. « Les Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et
340 tion éternelle. e. « Les Appels de l’Orient (n°  9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
341 ers du Mois) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1152-1154.
342 universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1152-1154.
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
343 Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)f « Dès que nous sommes seuls, nous somme
344 Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925 )f « Dès que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contr
345 mes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous im
346 rôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par le dedans » M. Jean
347 ourci psychologique. « Tout homme normal est fait de plusieurs fous qui s’annulent », écrit-il. Ce fou qui veut être soi p
348 fou qui veut être soi purement, qui veut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par l’extérieur, — ce fou que nous port
349 s il l’a poussé impitoyablement dans sa recherche d’ un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille »
350 st avant tout une démonstration ; mais, puissante de sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théo
351 une démonstration ; mais, puissante de sûreté et d’ évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Spino
352 d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’ un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent
353 le a cette beauté froide et massive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent seules l’écriv
354 ’écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. « Jean P
355 ussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. « Jean Prévost : Tentati
356 nt les étoiles. » f. « Jean Prévost : Tentative de solitude (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
357 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.
358 universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
359 Almanach 1925 (septembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation, la nouvelle maiso
360 Almanach 1925 (septembre 1925 )g En 1886, lors de sa fondation, la nouvelle maison d’édition Fisc
361 Almanach 1925 (septembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation, la nouvelle maison d’édition Fischer passait po
362 nationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M.
363 ciété », pour reprendre la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnai
364 e définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtant bon ménage av
365 au des auteurs édités depuis lors les grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du
366 lors les grands noms de la littérature européenne d’ avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du renouveau idéaliste allemand
367 nd et viennois, Hesse, Hofmannsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une juste idée d
368 mposent l’Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, l
369 nnent une juste idée de ce que fut la littérature d’ avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu
370 de ce que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons
371 ue fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons plutôt q
372 ourgeoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. « S. Fis
373 u le temps de la moisson, — le temps des éditions d’ œuvres complètes. g. « S. Fischer Verlag : Almanach 1925 (Berlin) »,
374 es complètes. g. « S. Fischer Verlag : Almanach 1925 (Berlin) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, sept
375 925 (Berlin) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1162-1163.
376 universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1162-1163.
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
377 Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925 )h Dans l’atmosphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et p
378 g-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins fa
379 quelque superficialité, du moins faut-il le louer d’ avoir conservé une vision générale de notre temps et un évident besoin
380 -il le louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un évident besoin d’impartialité. Son art bénéficie de
381 sion générale de notre temps et un évident besoin d’ impartialité. Son art bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer
382 évident besoin d’impartialité. Son art bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son
383 . Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter toutes les idées qu’elles
384 les meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’ une accumulation de petites touches précises des types d’après-guerre
385 ments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de petites touches précises des types d’après-guerre d’une étrange vérit
386 ccumulation de petites touches précises des types d’ après-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec les problèmes socia
387 petites touches précises des types d’après-guerre d’ une étrange vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe l
388 rtège pittoresque et désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon
389 celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la r
390 de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur
391 ivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre.
392 et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (S. Fischer Ve
393 lag, Berlin) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « Flasce »
394 universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans l’original.
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
395 Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)j M. Valéry L
396 s nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925 )j M. Valéry Larbaud est vraiment un étonnant esprit. Pour présente
397 . Pour présenter au public français cette œuvre «  d’ importance européenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à l’émot
398 u’il aille s’abandonner à l’émotion communicative de qui découvre un sommet ? Point. Précision, modération dans le jugemen
399 éger, notation suggestive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une grande œuvre
400 à louer une grande œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois n
401 n trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne susci
402 on et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : elles no
403 êt très profond : elles nous transportent au cœur de préoccupations des plus modernes, problème de la réalité littéraire,
404 œur de préoccupations des plus modernes, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pou
405 rnes, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui
406 r Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’ une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnages des tr
407 ourrait presque aussi bien être celui d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelle
408 dello. N’annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de
409 ges des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans
410 réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volonté d’être ou de
411 u’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volonté d’ être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent
412 onnent eux-mêmes dans leur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, sub
413 lonté d’être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils sont, le g
414 issent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les pos
415 personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’ action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés
416 erine, ou cet Alexandro Gomez cynique et puissant de confiance en soi, qu’une volonté presque inhumaine torture et conduit
417 ar on imagine difficilement un art plus dépouillé de détail extérieur ou d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies,
418 ment un art plus dépouillé de détail extérieur ou d’ enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriét
419 é de détail extérieur ou d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une brutalité et
420 tail extérieur ou d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une brutalité et d’une iro
421 d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’ une classique sobriété mais d’une brutalité et d’une ironie romantique
422 es trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’ une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse la même impression d
423 d’une classique sobriété mais d’une brutalité et d’ une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désolée
424 une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’am
425 urs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque. j. « Miguel de Unamuno : Trois nouvelle
426 ’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’ acier sur la nuque. j. « Miguel de Unamuno : Trois nouvelles exempla
427 d’acier sur la nuque. j. « Miguel de Unamuno : Trois nouvelles exemplaires et un prologue. Traduction de Jean Cassou et Ma
428 nouvelles exemplaires et un prologue. Traduction de Jean Cassou et Mathilde Pomès (Édition du Sagittaire, Paris) », Bibli
429 aire, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1164.
430 universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1164.
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
431 Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop ta
432 Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925 )k Peut-être n’est-il pas trop tard pour parler du Vinet de M. Seil
433 -être n’est-il pas trop tard pour parler du Vinet de M. Seillière, de ce nouveau chapitre qu’il vient d’ajouter à sa grand
434 s trop tard pour parler du Vinet de M. Seillière, de ce nouveau chapitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur les r
435 M. Seillière, de ce nouveau chapitre qu’il vient d’ ajouter à sa grande étude sur les rapports du christianisme et du roma
436 tique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’ un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme naturiste ». Il
437 l’œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idées dont lui-même s’est fait le moderne champion. Po
438 le Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je
439 s eu trop de peine à l’annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant que je crains qu’il n’ait été
440 ue inconsciemment, à gauchir légèrement la pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais par ailleu
441 ais par ailleurs Vinet déborde le « sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas sans gêner M. Seill
442 ithète ». Croit-il éluder ainsi le protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protestant qu’une telle at
443 nt qu’une telle attitude ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si l’on songe au service que M. Seillière nous rend
444 ne telle attitude ? Mais ces réserves sont de peu d’ importance si l’on songe au service que M. Seillière nous rend en réin
445 s sa position purement chrétienne — un mysticisme de cadre solidement moral, c’est-à-dire rationnel, dit M. Seillière — me
446 lière — me paraît infiniment plus forte que celle d’ un Maurras ou que celle d’un Maritain. Son unité est plus réellement p
447 nt plus forte que celle d’un Maurras ou que celle d’ un Maritain. Son unité est plus réellement profonde, son point d’appui
448 Son unité est plus réellement profonde, son point d’ appui plus central. Pour notre époque déchirée entre un thomisme et un
449 tre nouveau mal du siècle, il n’est peut-être pas de pensée plus vivante, ni de plus tonique que celle de ce « Pascal prot
450 pensée plus vivante, ni de plus tonique que celle de ce « Pascal protestant ». k. « Ernest Seillière : Alexandre Vinet,
451 . « Ernest Seillière : Alexandre Vinet, historien de la pensée française (Payot) », Bibliothèque universelle et Revue de G
452 aise (Payot) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, octobre 1925, p. 1797-1798.
453 e universelle et Revue de Genève, Genève, octobre 1925, p. 1797-1798.
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
454 Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925 )l « Quel est celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie
455 e et la mort « où se reflète le passage incessant d’ oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes
456 rt « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels 
457 ité qui n’est pas familière. C’est bien la poésie d’ une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche sans vert
458 se penche sans vertige sur ses abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de la trépidation immense des machines, un Sa
459 ses abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de la trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervie
460 -John-Perse, un Supervielle parlent avec des mots de tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comm
461 mbler un sourire ». Comme Max Jacob il lui arrive de situer une anecdote purement poétique dans un monde qu’il s’est créé.
462 pourtant l’autel et le surréalisme l’ont enrichie d’ images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seulement co-généra
463 lité se retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter
464 J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près
465 me cosmique. On est plus près de l’infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. « Jules Supervielle : Gravitations (NRF,
466 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1560.
467 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1560.
14 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
468 Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925 )m L’Irlande contemporaine offre un spectacle bien passionnant : ce
469 raine offre un spectacle bien passionnant : celui de la renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet d
470 ctacle bien passionnant : celui de la renaissance d’ une littérature nationale à la fois cause et effet de la libération po
471 ne littérature nationale à la fois cause et effet de la libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libér
472 n, un Yeats, un A.E., bien d’autres, ont su payer de leur personne. Effet, puisque l’héroïsme d’une révolution en faveur d
473 payer de leur personne. Effet, puisque l’héroïsme d’ une révolution en faveur du passé, révolution tout de même, ne pouvait
474 ne pouvait produire qu’une littérature très neuve de forme et traditionaliste d’inspiration, comme fut celle des Yeats, Sy
475 ittérature très neuve de forme et traditionaliste d’ inspiration, comme fut celle des Yeats, Synge, Joyce même… Trois noms
476 on, comme fut celle des Yeats, Synge, Joyce même… Trois noms qui permettent, je crois, de parler d’un grand siècle littéraire
477 Joyce même… Trois noms qui permettent, je crois, de parler d’un grand siècle littéraire irlandais ; ce que d’ailleurs Mll
478 e… Trois noms qui permettent, je crois, de parler d’ un grand siècle littéraire irlandais ; ce que d’ailleurs Mlle Simone T
479 et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malicieuse qui anime ses amusants por
480 res parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme
481 lle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient un
482 rion, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567.
483 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567.
15 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
484 Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925 )n La Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures
485 Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’ aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orl
486 -t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont do
487 écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné de beaux exemples du parti que peut tirer le nouveau romantisme de ce ch
488 les du parti que peut tirer le nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épopée dans Prikaz, cette
489 uveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’ en écrire l’épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme
490 l’épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées
491 rikaz, cette traduction française de l’énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’un brasier. P
492 vrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’ un brasier. Pour les causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpol
493 tincelles échappées d’un brasier. Pour les causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman que
494 t plus riche pouvait-on rêver pour un psychologue de la puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour l
495 vait-on rêver pour un psychologue de la puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien reste
496 vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante d
497 olution sans romantisme, dans le détail de la vie d’ une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions
498 . Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dan
499 l sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dans une fam
500 ’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dans une famill
501 bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en précis
502 es conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entrer tan
503 mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’ entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour constater qu
504 trement que les individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et perd connaissance chaque f
505  », d’ailleurs assez peu choquants, que le revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situations dra
506 peu choquants, que le revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situations dramatiques. Je donnera
507 que le revers de grandes qualités de réalisation d’ idées en faits ou en situations dramatiques. Je donnerai tous les essa
508 tuations dramatiques. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secr
509 us les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché
510 ssais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un r
511 e Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Mar
512 ière sa vitre, tremblait si fort qu’il avait peur de trébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi.
513 remblait si fort qu’il avait peur de trébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quelle
514 russe : mais des possibilités, à chaque instant, d’ explosion. Le géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleure
515 ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exem
516 rrin, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567-1568.
517 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567-1568.
16 1926, Articles divers (1924–1930). Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)
518 Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)c M. René Guisan, pro
519 Conférence de René Guisan « Sur le Saint » ( 2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie à Lausanne
520 érence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926 )c M. René Guisan, professeur de théologie à Lausanne et directeur
521 » (2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie à Lausanne et directeur de la Revue de théologie et de phil
522 , professeur de théologie à Lausanne et directeur de la Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula
523 de théologie à Lausanne et directeur de la Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, devant un
524 Lausanne et directeur de la Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, devant un très nombreux pu
525 que nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet d
526 nte ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de façon particulièrement frappante la comparaison des points de vue cat
527 oints de vue catholique et protestant : la notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivement, le Sa
528 u’il serve. Mais très vite on étend l’appellation de saint à ceux qui par leur élévation morale ou leurs souffrances sembl
529 cutée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèl
530 t dans la vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Cette croyan
531 èlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’ adoration de dieux protecteurs. Cette croyance se répand, favorisée pa
532 les tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Cette croyance se répand, favorisée par la souples
533 orisée par la souplesse dont fait preuve l’Église d’ alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au dogme en fo
534 dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’ adapter des traditions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge l’
535 On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs reliques qui se multiplient prodigieusement. Alors éclate la pr
536 ent prodigieusement. Alors éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Chr
537 de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’adresser le
538 sser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’Église catholiqu
539 e là nous juger ? Les catholiques nous reprochent d’ avoir méconnu l’élément de grandeur morale que les saints maintiennent
540 oliques nous reprochent d’avoir méconnu l’élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église. M. Guisan
541 se. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiques. Mais c’est pour affirmer avec d’autant plus de forc
542 e telles critiques. Mais c’est pour affirmer avec d’ autant plus de force que « en situant tout le devoir chrétien dans l’a
543 ques. Mais c’est pour affirmer avec d’autant plus de force que « en situant tout le devoir chrétien dans l’accomplissement
544 ns l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de
545 protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cette mère qui s’est sacrifiée aux siens, n’était-ce pas
546 missionnaire et cette diaconesse ? S’il n’y a pas de saints protestants, il existe des saints dans le protestantisme. Mais
547 saints dans le protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limit
548 otestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes
549 rfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y
550 tes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a pas de saints, mais il faut être parfait. T
551 ne peut exister de saint véritable. Il n’y a pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’enseignement de Jésus, t
552 mais il faut être parfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La
553 manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’ un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien et de chrét
554 d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’ historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer le point de
555 lidement documenté, et le scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer le point de vue adverse av
556 d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer le point de vue adverse avec autant de compréhension et de sy
557 an de montrer le point de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que le sien propre. Cela donne à ses co
558 nt de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que le sien propre. Cela donne à ses conclusions cette sécu
559 danger lorsqu’il n’est, comme ici, que la loyauté d’ un esprit animé par une foi agissante. c. « Conférence Guisan », Sui
560 nférence Guisan », Suisse libérale, Neuchâtel, n°  26, 2 février 1926, p. 2.
561 ence Guisan », Suisse libérale, Neuchâtel, n° 26, 2 février 1926, p. 2.
562 n », Suisse libérale, Neuchâtel, n° 26, 2 février 1926, p. 2.
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
563 Adieu, beau désordre… (mars 1926 )o L’époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bon
564 ible ou désirable subissent cette rage désespérée de course pure, vers ailleurs, vers autre chose. À certains signes — dém
565 s, vers autre chose. À certains signes — démences de fatigués, prophétismes, excessives lassitudes ou faim de violences —
566 gués, prophétismes, excessives lassitudes ou faim de violences — on sent l’approche de quelque chose, catastrophe ou révél
567 situdes ou faim de violences — on sent l’approche de quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée sur des pa
568 la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète quelques chefs, montre à quelques meneurs aveugle
569 uelques chefs, montre à quelques meneurs aveugles d’ une société affolée et ridiculement opportuniste où mène la pente de n
570 lée et ridiculement opportuniste où mène la pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des financier
571 jouerait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs de l’opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait ba
572 , quelques autres, sont parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâles opportunistes s
573 s de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâles opportunistes sans culture qui se chargent de gaver les masses
574 pâles opportunistes sans culture qui se chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, o
575 se chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il f
576 e gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balay
577 velles. Toute la jeune littérature décrit un type d’ homme profondément antisocial, glorifie une morale résolument anarchis
578 nque une certitude foncière, une foi en la valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale
579 prétendre à l’action sociale que l’époque réclame  1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d’importance à leu
580 ’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d’ importance à leurs tentatives morales, si singulières soient-elles — d
581 le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoud
582 ouvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre, une cons
583 a crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre, une conscience individuelle à recréer. Nous y empl
584 oyer, pour l’heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans le chaos des
585 des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’ esprit du siècle, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous les ép
586 certain « confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradi
587 es vagues soulevées par une même tempête. L’unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude. Barrès
588 e notre temps est en profondeur : c’est une unité d’ inquiétude. Barrès et Gide : ils ont construit des édifices très diffé
589  : ils ont construit des édifices très différents de style, et dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieu
590 s s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles de famille entre Ar
591 maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces deux moralistes ad
592 amille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent
593 ssent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont tous éperdument égoïstes. Égoïstes avec
594 n les ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont tous éperdument égoïstes. Égoïstes avec une prof
595 profonde conviction ; par vertu. Ce qui n’a rien d’ étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or
596 étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mai
597 r le créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œu
598 ce besoin si général de s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception
599 énéral de s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la li
600 re, dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comm
601 ttérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’e
602 pparaît chez les émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans
603 ue et l’esthétique convergent dans la littérature d’ aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les sépare
604 neuves, — pour le libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines historiques d’une conception qui, de plus
605 estion de rechercher ici les origines historiques d’ une conception qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les p
606 ception qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appli
607 littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans un de ses derniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le
608 de ses derniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il
609 e probable. Mais il en tirait une raison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de
610 nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet la suivant
611 ivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelqu
612 conséquences. Connaissance intégrale et culture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il
613 le et culture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français
614 des combinaisons possibles. Exaltation méthodique de nos facultés de plaisir : déjà nous en sommes à cultiver certaines do
615 possibles. Exaltation méthodique de nos facultés de plaisir : déjà nous en sommes à cultiver certaines douleurs, plaisirs
616 les dissonances les plus aiguës prennent la place d’ honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de sensibil
617 ans des esthétiques construites en hâte à l’usage de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé. Dégoût,
618 chose, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la soci
619 lté.) Dégoût de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisatio
620 i, — on l’étend vite à la société entière. Dégoût d’ une civilisation qui aboutit logiquement à cet épuisant et forcené gas
621 nous avons un corps, et c’est très beau, Breton, de crier « Révolution toujours » — tant qu’il y a des gens pour vous fai
622 vous faire du pain ; et c’est très beau, Aragon, de ne plus rien attendre du monde, mais on voudrait que de moins de glor
623 plus rien attendre du monde, mais on voudrait que de moins de gloriole s’accompagnât votre ultimatum à Dieu. Mais, secouan
624 attendre du monde, mais on voudrait que de moins de gloriole s’accompagnât votre ultimatum à Dieu. Mais, secouant son dég
625 violence. Une sensualité moins énervée lui permet de brutaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti
626 reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’ action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où l’art trouvait mal sa
627 ence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitudes fragmentaires la m
628 , et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitudes fragmentaires la matière de quelques pamphlets par quo
629 sordre de ses certitudes fragmentaires la matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais il a touch
630 che au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de l’âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mys
631 ’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’ une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus, Marcel Arland, —
632 même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ; mais jusqu’au
633 ’est complu dans son dégoût ; mais jusqu’au point d’ y percevoir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin la cause secr
634 cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’ une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : «
635 études modernes : la perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : « C’est peut-être que je
636 ncérité si voulue qu’elle va parfois à l’encontre de son dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans les profondeurs. E
637 lus incurable. Ces jeunes gens n’en finissent pas de peindre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des m
638 pas de peindre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant que de p
639 s de faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux positions qu’on vie
640 ue des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais
641 nser qui les ont amenés aux positions qu’on vient d’ esquisser. Mais on trouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous,
642 tachée à chercher dans le seul moi les fondements d’ une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une morale qui « d
643 une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’ une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle, qui éla
644 ague, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seul
645 à leurs yeux, mais « tabou » ; et c’est vertu que de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, r
646 l’emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser que de construire. Et l’on y prend vite goût. Cel
647 facile et plus enivrant de se laisser glisser que de construire. Et l’on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion
648 y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en haine de toute stabilité, de toute forme. Attitude parfa
649 ela tourne alors en passion de détruire, en haine de toute stabilité, de toute forme. Attitude parfaitement folle, mais c’
650 passion de détruire, en haine de toute stabilité, de toute forme. Attitude parfaitement folle, mais c’est justement de quo
651 Attitude parfaitement folle, mais c’est justement de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le d
652 la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’
653 i de commettre enfin l’acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’alcool singulièrement perfide de
654 … J’avais goûté à l’alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser les longues v
655 ’alors enviées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dan
656 ocès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous menait n
657 urellement à repousser avec horreur tout argument d’ utilité, et bien que nous niions toute vérité, nous étions dominés par
658 ons toute vérité, nous étions dominés par le sens d’ une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent acheté au
659 que certains d’entre nous eussent acheté au prix d’ un martyre… Cette lassitude facile à juger du dehors n’était pas ce qu
660 facile à juger du dehors n’était pas ce qu’il y a vingt ans on nommait blasé. Rien n’était émoussé en nous, mais pouvions-nou
661 aît inutile et vain ? Je cite ces phrases, tirées d’ un récit d’ailleurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer l’abouti
662 phrases, tirées d’un récit d’ailleurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer l’aboutissement d’une évolution qui a son
663 e4, de Louis Aragon, pour marquer l’aboutissement d’ une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourri
664 nt d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada,
665 ican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’ inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complètes au gré de
666 il y a place pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complètes au gré des tempéraments
667 pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complètes au gré des tempéraments. Le geste de
668 moins complètes au gré des tempéraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratuit commis
669 te de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que pr
670 urréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’
671 alistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes qui se situent entre Gide
672 ur une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent le même pers
673 me personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité » interdit de commettre aucun acte volontaire et raisonné
674 ns foi, à qui une sorte de « sincérité » interdit de commettre aucun acte volontaire et raisonné parce que ce serait fauss
675 l méprise toutes également ; n’attendant rien que de ses impulsions et contemplant avec une lucidité parfois douloureuse s
676 ropres actes dont il s’étonne mais qu’il se garde de juger5. Il y a véritablement une littérature de l’acte gratuit, qui r
677 e de juger5. Il y a véritablement une littérature de l’acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gi
678 re de l’acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gide est responsable d’une autre méthode de cultu
679 tique de notre époque. Mais Gide est responsable d’ une autre méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie »,
680 e. Mais Gide est responsable d’une autre méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à po
681 de est responsable d’une autre méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’e
682 ponsable d’une autre méthode de culture de soi, «  d’ intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême cer
683 re méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus »,
684 usqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Ce
685 intes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe q
686 la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’empêc
687 ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’ après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien —
688 mort, ni l’effroi d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’orgueil, sachant une
689 — rien que l’orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si
690 chose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si dou
691 plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’ une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas si bonne
692 n’est pas si douce encore, n’est pas si bonne que de céder à vous, désirs, et d’être vaincu sans bataille. On voit assez à
693 ’est pas si bonne que de céder à vous, désirs, et d’ être vaincu sans bataille. On voit assez à quel genre de sophismes con
694 vaincu sans bataille. On voit assez à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de l’esprit qui n’utilise une borne qu
695 ez à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de l’esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’
696 un certain immoralisme comme la seule vertu digne d’ une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralis
697 vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de paradoxe serait bien p
698 it de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter à son
699 adoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter à son excès toute chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a
700 besoin de porter à son excès toute chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que les excès qui méritent notre enthousia
701 propre intérêt6… » c’est proprement la perversion d’ une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité p
702 Je ne vais point nier la fécondité psychologique d’ une attitude par ailleurs si proche de certain mysticisme. Mais pousse
703 s. Nous ne pensons plus par ensembles7 : symptôme de fatigue. Mais tout cela : dégoût universel, désir de violences, gratu
704 fatigue. Mais tout cela : dégoût universel, désir de violences, gratuité des pensées et des actes, rêves éveillés, tout ce
705 tes, rêves éveillés, tout cela ne dérive-t-il pas d’ une fatigue immense. Nous voyons se fausser le rythme des jours et des
706 tion mécanicienne. (Les machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de n
707 tigue devient un des éléments les plus importants de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l’indiquent eux-même
708 calembours, expression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La
709 rique et symbolique de la pensée : la littérature d’ avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour mo
710 a pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu
711 grenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë
712 n amour de fatigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque i
713 , l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de celui qui n’a pas d
714 de nos psychologues est cet état presque inhumain de celui qui n’a pas dormi et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations
715 art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nou
716 ement nous y perdons graduellement l’intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles, tout ce qui s
717 nt l’intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein à notre glissa
718 de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein à notre glissade vers des folies. ⁂ Recréer une conscience indi
719 proportions ; rééduquer les instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complèt
720 du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui, parce qu
721 de demain sera en réaction complète contre celle d’ aujourd’hui, parce que nous sommes à bout. Il ne s’agit pas, encore un
722 sommes à bout. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier l’immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie a
723 fois, de renier l’immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent
724 ntraire profiter des démonstrations par l’absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup sacrifièr
725 surde de quelques problèmes moraux et littéraires  8, à quoi beaucoup sacrifièrent leur jeunesse. (« Nous sommes une généra
726 rent leur jeunesse. (« Nous sommes une génération de cobayes » remarque Paul Morand.) Il faut agir, ou bien être agi. Donn
727 ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’ oubli — (mais avant de s’y perdre, quelles révolutions, quelles anarch
728 es révolutions, quelles anarchies, quels Niagaras  9  !) Quelques jeunes hommes l’ont compris. Ils sont modestes — ne s’is
729 ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne mépri
730 pas la culture ; sans autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de construire ; sobres de langage et maîtres de l
731 autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de construire ; sobres de langage et maîtres de leurs corps exercés, ils
732 lui de vivre, c’est-à-dire de construire ; sobres de langage et maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de
733 dire de construire ; sobres de langage et maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de pensée valable qu’assu
734 es de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de liberté que
735 ée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur effort e
736 umission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de choisir parmi leurs inst
737 est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est
738 raignent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktai
739 hoisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer  10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur
740 es se recueillent encore dans l’attente angoissée d’ une révélation et dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux
741 ngoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils s’en vont « épia
742 ait qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décr
743 hent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se faire viol
744 core Vinet, ne voir d’abord que les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suiv
745 ts de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangi
746 e morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en
747 r ce moyen nous met tout d’abord en présence, non de nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes
748 tout d’abord en présence, non de nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes qu’ils écrivent des
749 en présence, non de nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes qu’ils écrivent des odes civique
750 nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’ exiger des poètes qu’ils écrivent des odes civiques. Mais que nos mora
751 resque tous les jeunes écrivains — se souviennent de penser en fonction du temps présent, soit qu’ils veuillent en amélior
752 le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’ agir sur l’époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La cris
753 leur refus d’agir sur l’époque, c’est une manière d’ agir contre elle. 2. « La crise du concept de littérature », NRF, 192
754 l’époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était d
755 ère d’agir contre elle. 2. « La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était développé en nous un goût
756 2. « La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était développé en nous un goût furieux de l’expérience hu
757 La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était développé en nous un goût furieux de l’expérience humain
758 3. « Il s’était développé en nous un goût furieux de l’expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans L
759 goût furieux de l’expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libertinage. (NRF) 5. Détours de Ren
760  Lorsque tout est fini » dans Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incerta
761 t est fini » dans Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Mauric
762 e. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains personnage
763 l ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Aragon, de Dri
764 ’Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’ Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus
765 de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significa
766 ; certains personnages d’Arland, de Louis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon,
767 Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre » qui est au fond du rom
768 e les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous em
769 nd du romantisme moderne nous empêche secrètement de construire et de nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’i
770 moderne nous empêche secrètement de construire et de nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : a
771 n veut tout cultiver, et en fait l’on se contente d’ une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Certaines expériences
772 iver, et en fait l’on se contente d’une violence, d’ un vice, d’une inquiétude. 8. « Certaines expériences littéraires son
773 fait l’on se contente d’une violence, d’un vice, d’ une inquiétude. 8. « Certaines expériences littéraires sont plus dang
774 nte d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Certaines expériences littéraires sont plus dangereuses que des exp
775 s que des expériences réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On
776 leurs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de c
777 èneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’ homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalism
778 condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suf
779 lus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suffirait à restaurer une élite, efficace
780 celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’ hommes solides suffirait à restaurer une élite, efficace. (Je vois Jea
781 aurer une élite, efficace. (Je vois Jean Prévost, deux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois, et peut-être Drieu la
782 e élite, efficace. (Je vois Jean Prévost, deux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois, et peut-être Drieu la Rochelle,
783 e, efficace. (Je vois Jean Prévost, deux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois, et peut-être Drieu la Rochelle, s’
784 t la morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1926, p. 311-319.
785 èque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1926, p. 311-319.
18 1926, Articles divers (1924–1930). Conférences d’Aubonne (7 avril 1926)
786 Conférences d’ Aubonne (7 avril 1926)d Pour la première fois cette année, les conf
787 Conférences d’Aubonne ( 7 avril 1926)d Pour la première fois cette année, les conférences de
788 Conférences d’Aubonne (7 avril 1926 )d Pour la première fois cette année, les conférences de l’Associat
789 our la première fois cette année, les conférences de l’Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps, et non
790 nnée, les conférences de l’Association chrétienne d’ étudiants eurent lieu au printemps, et non plus à Sainte-Croix, mais à
791 ein succès a répondu à cette innovation. Le sujet de la première partie des conférences, les Objections des intellectuels
792 psychanalyste distingué, qui se fit avec beaucoup d’ intelligence l’avocat du diable, en montrant que tous les faits religi
793 ation scientifique. C’est donc à la seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exi
794 trand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vig
795 face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueur dialectique et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à la
796 , et fut impressionnant de vigueur dialectique et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à la fédération vint interrompr
797 pressionnant de vigueur dialectique et de largeur d’ idées. Une soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discu
798 les discussions philosophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur franç
799 ovoquées par ces deux travaux. Avec la conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur français, on descendit — ou l’on mon
800 it — ou l’on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de
801 A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’
802 ns celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur des e
803 yant sur des expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplac
804 une causerie émouvante sur l’Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien des points laissés en su
805 points laissés en suspens dans la première partie de la conférence. Puis M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta de
806 is M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta deux ouvriers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’occasion de pa
807 nd, étudiant en théologie, présenta deux ouvriers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les c
808 ris, Clerville et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réali
809 ont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre d
810 les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brém
811 rlèrent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité
812 nclut en montrant la nécessité et les difficultés d’ une action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fa
813 risse l’avait fait le soir avant pour les milieux d’ ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de partis, avec un
814 vriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de partis, avec une passion contenue d’hommes qui ont vu, qui ont souffe
815 es questions de partis, avec une passion contenue d’ hommes qui ont vu, qui ont souffert, et qui ne se payent plus de mots
816 nt vu, qui ont souffert, et qui ne se payent plus de mots ni d’utopies, Clerville, Janson et Brémond ont su arracher leurs
817 ont souffert, et qui ne se payent plus de mots ni d’ utopies, Clerville, Janson et Brémond ont su arracher leurs auditeurs
818 Janson et Brémond ont su arracher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour les placer véritablement en face de la « ré
819 émond ont su arracher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour les placer véritablement en face de la « réalité prolét
820 que nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriverons que par un trava
821 dition, et nous n’y arriverons que par un travail d’ éducation lent et souvent dangereux. Vous, étudiants, venez à nous pou
822 s nous compromettre, si nous écopons, tant pis. » Cinq conférences et autant de cultes en trois jours, cela peut paraître ex
823 s écopons, tant pis. » Cinq conférences et autant de cultes en trois jours, cela peut paraître excessif à qui n’a pas conn
824 nt pis. » Cinq conférences et autant de cultes en trois jours, cela peut paraître excessif à qui n’a pas connu l’atmosphère p
825 que. Chacun dit ce qu’il pense sans se préoccuper d’ être bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis
826 re bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on poursui
827 ntre un banquier et un philosophe au milieu d’une centaine d’étudiants et de professeurs suisses et français. Miracle qui nous f
828 anquier et un philosophe au milieu d’une centaine d’ étudiants et de professeurs suisses et français. Miracle qui nous fit
829 hilosophe au milieu d’une centaine d’étudiants et de professeurs suisses et français. Miracle qui nous fit croire un insta
830 ui nous fit croire un instant à la fameuse devise de la Révolution. d. « Conférences d’Aubonne », Suisse libérale, Neuch
831 meuse devise de la Révolution. d. « Conférences d’ Aubonne », Suisse libérale, Neuchâtel, n° 78, 7 avril 1926, p. 2. Sign
832 ences d’Aubonne », Suisse libérale, Neuchâtel, n°  78, 7 avril 1926, p. 2. Signé : Stud. litt.
833 s d’Aubonne », Suisse libérale, Neuchâtel, n° 78, 7 avril 1926, p. 2. Signé : Stud. litt.
834 nne », Suisse libérale, Neuchâtel, n° 78, 7 avril 1926, p. 2. Signé : Stud. litt.
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
835 Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)p Au creux des couleurs assourdies d’un divan le soir,
836 Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926 )p Au creux des couleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que
837 (avril 1926)p Au creux des couleurs assourdies d’ un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de
838 tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaça
839 s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a
840 le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoir
841 ’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, intense et tragique comme un couchant d
842 Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, intense et tragique comme un couchant d’automne, émouvante enc
843 t de crime, intense et tragique comme un couchant d’ automne, émouvante encore après tant d’autres, comme chaque soir un no
844 te en brèves notations lyriques suivant le rythme d’ un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confondus du dési
845 é par les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère m
846 ondus du désir et de la prière. On sort lentement d’ une chambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et
847 e même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime
848 uivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrang
849 la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’ une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hésité entre plusieurs st
850 Jouve semble avoir hésité entre plusieurs styles de roman. Un chapitre d’observation psychologique ironique et minutieuse
851 sité entre plusieurs styles de roman. Un chapitre d’ observation psychologique ironique et minutieuse, à la Stendhal, succè
852 me lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions inconscientes qui donnent à tous les actes une signification
853 une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes de famille freudien
854 montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes de famille freudiens, ou d’analyses de démences mystiques ; mais tout ce
855 a su tirer des complexes de famille freudiens, ou d’ analyses de démences mystiques ; mais tout cela est sublimé dans un mo
856 des complexes de famille freudiens, ou d’analyses de démences mystiques ; mais tout cela est sublimé dans un monde poétiqu
857 é dans un monde poétique où il paraît inconvenant d’ introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à l
858 e où il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre i
859 science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les droits
860 des idées vieilles comme Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque li
861 quelques chapitres inspirés presque littéralement d’ une anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part l’évolution mysti
862 és presque littéralement d’une anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part l’évolution mystique de Paulina semble par
863 e Stendhal ; si d’autre part l’évolution mystique de Paulina semble parfois un peu trop « classique » et prévue, l’origina
864 ique » et prévue, l’originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mouvement purement lyrique, sa pro
865 énements inconscients. Certaines proses mystiques de Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiqu
866 de Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. « Pierre Jean
867 u couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. « Pierre Jean Jouve : Paul
868 les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. « Pierre Jean Jouve : Paulina 1880 (NRF, P
869 es des hommes. p. « Pierre Jean Jouve : Paulina 1880 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
870 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 530-531.
871 que universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 530-531.
20 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
872 Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre
873 Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926 )q Un artiste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût
874 La Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’éco
875 qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’ écoles et de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-le aux pris
876 re a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-le aux prises avec une
877 principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet de conte moral, avec ses personnages un peu conventionnels et l’invraise
878 onventionnels et l’invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur l’ait alourdi d’une idéolog
879 ripéties. Quel dommage que l’auteur l’ait alourdi d’ une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui eût gagné à êt
880 se en action plutôt qu’en commentaires. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description du milieu
881 cription du milieu patricien que dans la création d’ un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longueurs, on ne l
882 ieu patricien que dans la création d’un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longueurs, on ne lira pas sans pl
883 in le vent du large, parmi des gens qui craignent de s’enrhumer. q. « Alix de Watteville : La Folie de l’espace (Delacha
884 s’enrhumer. q. « Alix de Watteville : La Folie de l’espace (Delachaux et Niestlé) », Bibliothèque universelle et Revue
885 et Niestlé) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 531.
886 que universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 531.
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
887 Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926 )r Un léger flirt avec la muse, parce que c’est dimanche, parce qu’
888 ourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller en public. On connaît le danger… r. « Wilfred Chopard  : Sp
889 s, Lausanne) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
890 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
891 Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926 )s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élev
892 ire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Inv
893 ée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invraisemblablement
894 ée dans l’athéisme. Invraisemblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à « la vie », laque
895 semblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à « la vie », laquelle — un peu aidée par l’a
896 r l’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’
897 ivre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’ exemples vivants qu’un véritable roman. La profusion souvent facile de
898 cidents et le style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fatigue le développement un peu théorique mais
899 e développement un peu théorique mais intelligent d’ un problème que l’on pressent trop complètement résolu dès les premièr
900 premières pages, mais qu’il faut louer Mme Rivier d’ avoir posé courageusement. Dirai-je que l’abus des points d’exclamatio
901 sé courageusement. Dirai-je que l’abus des points d’ exclamation — trait commun à presque toutes les femmes auteur, et qui
902 t, Lausanne) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
903 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
904 Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926 )t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean
905 Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arleq
906 i me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le
907 meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’ esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret profess
908 d par ordre, et montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour alle
909 Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le gr
910 echerche de l’ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’o
911 u’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L [e] malheur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’est jamais
912 r les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’est jamais moins qu’en ve
913 ofessionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sen
914 hisme cubiste qui dépasse de beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer d
915 de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques. Mais quelle intelli
916 ’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont l’auda
917 s. Mais quelle intelligence, et dont l’audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les mi
918 urs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. »
919 et à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en musique. Suppres
920 . » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obsc
921 nture, en musique. Suppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il
922 la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une machine luisante et tournante. L’espri
923 t sur une machine luisante et tournante. L’esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance mécanique et
924 nante. L’esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce que
925 t de Cocteau est une arme admirable de précision, d’ élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujour
926 e admirable de précision, d’élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Coctea
927 charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles sont sans parfum, ne se faneront pas. t. « Jean C
928 tock, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661-662.
929 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661-662.
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
930 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926 )u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la gén
931 émoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore
932 , « artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune trans
933 ansposition romanesque le trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même la force
934 e caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’ impuissance, il n’a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un
935 ble aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvie
936 ec une intelligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologu
937 l’élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiologiques do
938 isse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversion de tout ce qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable
939 parvenue au point où elle « ne semble avoir rien d’ autre à faire que son propre procès », une intelligence qui se dégoût
940 Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait Baudelaire.
941 implorait Baudelaire. Encore avait-il le courage de prier… u. « René Crevel : Mon corps et moi », Bibliothèque universe
942 corps et moi », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 662-663.
943 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 662-663.
25 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
944 L’atmosphère d’ Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)e Cette conférence s’ouvrit par
945 L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)e Cette conférence s’ouvrit par une bise qu’on
946 L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)e Cette conférence s’ouvrit par une bise qu’on peut bien
947 L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926 )e Cette conférence s’ouvrit par une bise qu’on peut bien dire du d
948 du diable et se termina sous le plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagér
949 e plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’ y voir un symbole. On ne saurait exagérer l’importance des conditions
950 portance des conditions météorologiques du succès d’ une telle rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que la bise tomb
951 à ce que la bise tombée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esp
952 acle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’ Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a de plus protestant — mais
953 uire ailleurs qu’en terre romande. C’est l’esprit de liberté, tout simplement. Mais précisons : c’est bien plus que la lib
954 . Mais précisons : c’est bien plus que la liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer aux dépens d’
955 erté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherche.
956 e hérésie personnelle et de s’affirmer aux dépens d’ autrui, — c’est la liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne
957 convaincre qu’à se convaincre. Après les exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâché » pas m
958 qu’à se convaincre. Après les exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâché » pas mal de préju
959 en sais plusieurs qui ont ainsi « lâché » pas mal de préjugés en matières sociales. Mais ce qui est peut-être plus importa
960 on eut l’impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les ob
961 soi, qu’ils incarnaient les voix contradictoires d’ un débat que tous menaient en eux-mêmes loyalement. Et ce désir d’arri
962 ous menaient en eux-mêmes loyalement. Et ce désir d’ arriver à quelque chose de définitif à la fois et d’intelligent, je le
963 loyalement. Et ce désir d’arriver à quelque chose de définitif à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’émotion
964 arriver à quelque chose de définitif à la fois et d’ intelligent, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de
965 e mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourment de c
966 es Rivière : combien reconnurent dans le tourment de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes s
967 réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la
968 vaux et méditations. Dehors, on honore la liberté d’ un culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne pe
969 on ne peut juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vis
970 o offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’ une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses att
971 sur des paillasses attendraient en vain le lever d’ un rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l’on vit a
972 Henriod debout sur un tronc coupé n’eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’équilibre des discussions et de s
973 sse pour maintenir l’équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore un dîner très démocratique pen
974 Abauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’ une main sur l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air de
975 apauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases musicales. Apr
976 âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases musicales. Après quoi Richar
977 attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je
978 ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelq
979 ce que je n’ai pas dit dans ces quelques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50, nom et adresse. e. « L’atmosphère d’Aubon
980 ans ces quelques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50, nom et adresse. e. « L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux
981 core : f 2.50, nom et adresse. e. « L’atmosphère d’ Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l’Association
982 0, nom et adresse. e. « L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l’Association chrétienne suis
983 dresse. e. « L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926  », Lux et Vita : nouvelles de l’Association chrétienne suisse d’étudi
984 onne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l’Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 4
985 ta : nouvelles de l’Association chrétienne suisse d’ étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-45.
986 tion chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-45.
26 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
987 Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926 )v Nous disons adieu aux charmes troubles et inhumains de la nature
988 us disons adieu aux charmes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et b
989 mes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau. Or « la grande vill
990 or utile et beau. Or « la grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une catastrophe menaçante pour n’
991 catastrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des mill
992 menaçante pour n’avoir pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des milliers d’êtres
993 métrie… Elle use et conduit lentement l’usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles d
994 lle use et conduit lentement l’usure des milliers d’ êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles de t
995 Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Con
996 us adaptée aux conditions nouvelles de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Congestion : « un
997 détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant « la ville est une image puissante qui
998 i, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et
999 sement des préoccupations esthétiques et sociales d’ aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation sous cet asp
1000 et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il nous fau
1001 faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera
1002 des dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que M
1003 rt que Mussolini (lequel s’est d’ailleurs inspiré de lui dans son fameux discours aux édiles de Rome). Urbanisme est une
1004 nspiré de lui dans son fameux discours aux édiles de Rome). Urbanisme est une étude technique et un pamphlet dont l’argum
1005 e parfois en boutades mordantes, en brèves fusées de lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans la statistique. On e
1006 des mordantes, en brèves fusées de lyrisme. C’est d’ une verve puissante jusque dans la statistique. On en sort convaincu o
1007 On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’ avoir trouvé la formule même de tant d’aspirations modernes. Voici san
1008 ersé, enthousiasmé d’avoir trouvé la formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute un des livres les
1009 thousiasmé d’avoir trouvé la formule même de tant d’ aspirations modernes. Voici sans aucun doute un des livres les plus re
1010 aucun doute un des livres les plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme
1011 un des livres les plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un ossuaire
1012 monde comme un ossuaire est couvert des détritus d’ époques mortes. Une tâche nous incombe, construire le cadre de notre e
1013 rtes. Une tâche nous incombe, construire le cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie
1014 e cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contemporaine ». Pu
1015 les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’ une « ville contemporaine ». Pures géométries de verre et de ciment bl
1016 n d’une « ville contemporaine ». Pures géométries de verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gr
1017 lle contemporaine ». Pures géométries de verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de
1018 e et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-g
1019 mboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire,
1020 tte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’ un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans le silence de l’azur
1021 e-gare circulaire, prismes perdus dans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartie
1022 s dans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins su
1023 umeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de ver
1024 es jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives rég
1025 errasses. Des perspectives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par les plans fuyants des rues immenses livrées au 100
1026 s. Des perspectives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par les plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heu
1027 ar les plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des encein
1028 s, et minces en regard de leur hauteur, entourant de leurs multiples « redents » des terrains de jeux et des parcs, la nat
1029 urant de leurs multiples « redents » des terrains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle
1030 e organisé par l’Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisat
1031 vec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de rai
1032 jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’ un rêve de joie et de raison où de grandes ordonnances élèvent leur ch
1033 rmes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopi
1034 a lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopie ! Oui, si
1035 Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopie ! Oui, si notre civili
1036 tériels formidables des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique.
1037 bles des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lign
1038 archique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace a
1039 es, ce serait peut-être tuer au soleil des germes de révolution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation
1040 ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporaine ». Un labeur
1041 ont mis à calculer la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporaine ». Un labeur précis et anonym
1042 scurément à cette parfaite expression du triomphe de l’homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du ca
1043 Crès, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1926, p. 797-798.
1044 èque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1926, p. 797-798.
27 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
1045 Confession tendancieuse (mai 1926 )f Écrire, pas plus que vivre, n’est de nos jours un art d’agrément
1046 (mai 1926)f Écrire, pas plus que vivre, n’est de nos jours un art d’agrément. Nous sommes devenus si savants sur nous-
1047 re, pas plus que vivre, n’est de nos jours un art d’ agrément. Nous sommes devenus si savants sur nous-mêmes, et si crainti
1048 s-mêmes, et si craintifs en même temps, si jaloux de ne pas nous déformer artificiellement : nous comprenons que nos œuvre
1049 que nos œuvres, si elles furent faites à l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pou
1050 t-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’ écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux calculs l
1051 s le débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons les idé
1052 ées comme on choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressort
1053 ’influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressortir trop différent. Amour de soi, qui nous tourmente obscurémen
1054 dont on craint de ressortir trop différent. Amour de soi, qui nous tourmente obscurément et nous obsède de craintes et de
1055 oi, qui nous tourmente obscurément et nous obsède de craintes et de réticences dont nous ne comprenons pas toujours l’obje
1056 urmente obscurément et nous obsède de craintes et de réticences dont nous ne comprenons pas toujours l’objet. Peur de perd
1057 ont nous ne comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte impr
1058 enons pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des chos
1059 s l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses. Amour de soi…
1060 ur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qu
1061 subir l’empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de
1062 es. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le se
1063 ui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je sens trè
1064 ’autres désirs contradictoires ; au gré du temps, d’ un sourire, d’un sommeil, tant de bonheurs ou de dégoûts étranges vien
1065 contradictoires ; au gré du temps, d’un sourire, d’ un sommeil, tant de bonheurs ou de dégoûts étranges viennent m’habiter
1066 , d’un sourire, d’un sommeil, tant de bonheurs ou de dégoûts étranges viennent m’habiter ; je ne sais plus… Je suis beauco
1067 mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le monde, — les choses
1068 où l’on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta qu’une
1069 rendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’ une habitude dans une autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ;
1070 je devins si faible et démuni, livré aux regards d’ une foule absurde, bienveillante, repue, — tous paraissaient détenir u
1071 les, si cruellement présentes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondamentale que j
1072 référais me leurrer à combattre des imperfections de détail dont je m’exagérais l’importance. Et c’est ainsi par feintes q
1073 trouble que je me refusai pourtant à nommer peur de rire. Cette amertume au fond de tous les plaisirs, cette envie de rir
1074 ant à nommer peur de rire. Cette amertume au fond de tous les plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui,
1075 mertume au fond de tous les plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette incapacité à jouir de mes vi
1076 il m’arrivait un ennui, cette incapacité à jouir de mes victoires, à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait les
1077 découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur les stades où
1078 organisaient brusquement les éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était un
1079 dominateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui
1080 t tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus une doule
1081 r ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’ un désordre où l’on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas
1082 e où l’on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me voici devant quelques
1083 problèmes dont je sais qu’il est absolument vain de prétendre les résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’
1084 prétendre les résoudre, mais que je dois feindre d’ avoir résolus : c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la b
1085 résolus : c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche
1086 vivre. Problème de Dieu, à la base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a que ce but de me rendre m
1087 , à la base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’ une recherche qui n’a que ce but de me rendre mieux apte à vivre plein
1088 erdre au début d’une recherche qui n’a que ce but de me rendre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je m’arrête parfo
1089 a consiste à retrouver l’instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les
1090 eul qu’ils sont naturels : la nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’
1091 sont naturels : la nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’est un méla
1092 la construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer la vie, pui
1093 tion ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’est
1094 ales de mort et de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait cet instinct qu
1095 rfait cet instinct qui est la Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de ren
1096 la Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces comp
1097 hercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin. D’abord
1098 e Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin. D’abord donc, chois
1099 de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite, les éduquer
1100 éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le
1101 lois établies par le concours de l’expérience et d’ un sentiment de convenance en quoi se composent le plaisir et la consc
1102 par le concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes li
1103 en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver ces limites :
1104 la vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’ où cette fatigue générale qui fausse tout, et qui s’oppose au perfecti
1105 fausse tout, et qui s’oppose au perfectionnement de l’esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les dire
1106 ermet que des associations suivant les directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans ces limites.
1107 mprisonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce
1108 a liberté est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce lent effort naît une modestie que j
1109 s loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce lent effort naît une modestie que je m’enorgueillis un peu de conn
1110 ie que je m’enorgueillis un peu de connaître ; et de cette volonté d’un meilleur moi, une certaine méfiance vis-à-vis de m
1111 ueillis un peu de connaître ; et de cette volonté d’ un meilleur moi, une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La s
1112 une faiblesse en la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans le monde, si je m’en sui
1113 t, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’ un ensemble social et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’
1114 ial et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y faut une
1115 ur une doctrine possible, sur une systématisation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite le sentiment d’être dans un d
1116 petites certitudes5, j’éprouve vite le sentiment d’ être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vie : comment s
1117 ’être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vie : comment surmonter un malaise sans cesse renaissant, comment
1118 lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même temps que ma puissance d’agir. Que tout cela s’agite s
1119 uissance de jouir, en même temps que ma puissance d’ agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comprends par écl
1120 puissance d’agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’empo
1121 . Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’ anciennes folies… Combat, oscillations silencieuses dans ma demi-consc
1122 , lueurs éteintes dans une nuit froide. Les notes d’ un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’
1123 chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l’emporten
1124 ennent battre ce corps triste, qu’ils l’emportent d’ un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ;
1125 aimer son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4. La sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Un
1126 ont. Une fois écrites elles prennent un caractère de certitude qu’elles n’avaient pas encore en moi. C’est en quoi ma sinc
1127 oi. C’est en quoi ma sincérité est tendancieuse. 5. Quant à adhérer à une doctrine toute faite, ce me semble une dérision
1128 une dérision complète. Je m’étonne qu’après tant d’ expériences ratées on puisse encore se persuader de la vérité d’un sys
1129 ’expériences ratées on puisse encore se persuader de la vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai,
1130 ratées on puisse encore se persuader de la vérité d’ un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il est utile.
1131 itimes chez d’autres, même celles que je juge bon d’ éliminer de moi. Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mouvement norm
1132 d’autres, même celles que je juge bon d’éliminer de moi. Chacun son équilibre, ou plutôt, son « mouvement normal » de vie
1133 on équilibre, ou plutôt, son « mouvement normal » de vie. f. « Confession tendancieuse », Les Cahiers du mois, Paris, n° 
1134 on tendancieuse », Les Cahiers du mois, Paris, n°  21-22, mai 1926, p. 144-148.
1135 euse », Les Cahiers du mois, Paris, n° 21-22, mai 1926, p. 144-148.
28 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
1136 Les Bestiaires, par Henry de Montherlant ( 10 juillet 1926)g Je ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « 
1137 Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926 )g Je ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de
1138 Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de volupté », je me sens envahi par un rythme impérieux a
1139 me tirant hors de ce « long songe de violence et de volupté », je me sens envahi par un rythme impérieux au point qu’il f
1140 des forces qui se lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’aute
1141 e ça se vend mieux. Ce récit des premiers combats de taureaux du jeune Montherlant est en réalité un nouveau tome de ses m
1142 jeune Montherlant est en réalité un nouveau tome de ses mémoires lyriques. Une œuvre d’une seule coulée, presque sans int
1143 nouveau tome de ses mémoires lyriques. Une œuvre d’ une seule coulée, presque sans intrigue, sans cette orchestration de t
1144 , presque sans intrigue, sans cette orchestration de thèmes qui faisait la richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme,
1145 de thèmes qui faisait la richesse du Songe, mais d’ une ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi. Le sujet était péri
1146 a richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’ une unité plus pure aussi. Le sujet était périlleux : si particulier,
1147 périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pittoresque, de couleur locale, de détails techniques ou de fastidieu
1148 articulier, il prêtait à des abus de pittoresque, de couleur locale, de détails techniques ou de fastidieuses explications
1149 ait à des abus de pittoresque, de couleur locale, de détails techniques ou de fastidieuses explications nécessaires, défau
1150 sque, de couleur locale, de détails techniques ou de fastidieuses explications nécessaires, défauts auxquels Montherlant n
1151 e dans l’allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent parlé d’excès de lyrisme à propos des premier
1152 is et désinvolte de son récit. On a souvent parlé d’ excès de lyrisme à propos des premiers ouvrages de Montherlant. Cette
1153 sinvolte de son récit. On a souvent parlé d’excès de lyrisme à propos des premiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci,
1154 d’excès de lyrisme à propos des premiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci, on le traite de naturaliste. Mais comment
1155 rages de Montherlant. Cette fois-ci, on le traite de naturaliste. Mais comment montrer des taureaux sans que cela sente un
1156 ue cela sente un peu l’étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poète jusque dans la description
1157 poète jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il
1158 t poète qu’il peut atteindre à pareille intensité de réalisme. Une perpétuelle palpitation de vie anime ce livre et lui do
1159 ntensité de réalisme. Une perpétuelle palpitation de vie anime ce livre et lui donne un rythme tel qu’il s’accorde d’emblé
1160 ers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus de la mer », il y a toujours dans un coin du tableau des ruades, des che
1161 ent et lèchent alternativement, « en vraies bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de la vie animale suppose entre
1162 es bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de la vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Mon
1163 e à plusieurs reprises. C’est « par la divination de cet amour qu’Alban (le jeune héros du récit) sent ce que sent la bête
1164 raiment que ce qu’on aime, et les victorieux sont d’ immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet amour tourne en adora
1165 n aime, et les victorieux sont d’immenses amants » 6. Mais envers les taureaux cet amour tourne en adoration ou en une véri
1166 reflet bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne
1167 sage du réalisme le plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » :
1168 ureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accom
1169 e » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accomplissant sa destinée. Quel
1170 ement les articulations grinçaient, avec le bruit d’ un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase
1171 rticulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à la cime
1172 sur un treuil. Elle arriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, ell
1173 à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme divine s
1174 t ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font pardonner bien d’
1175 les Bestiaires font pardonner bien d’autres pages de vrais délires taurologiques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle
1176 de vrais délires taurologiques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une orgie d’év
1177 logiques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une orgie d’évocations antiques, de r
1178 olle de la réalité, c’est tout de suite une orgie d’ évocations antiques, de rapprochements superstitieux, de grands symbol
1179 st tout de suite une orgie d’évocations antiques, de rapprochements superstitieux, de grands symboles païens, et l’on se p
1180 ations antiques, de rapprochements superstitieux, de grands symboles païens, et l’on se perd dans un syncrétisme effarant,
1181 x et Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar de soleil et de sang. On peut penser ce qu’on veut de ce pa
1182 nfondent leurs génies dans une sorte de cauchemar de soleil et de sang. On peut penser ce qu’on veut de ce paganisme exalt
1183 s génies dans une sorte de cauchemar de soleil et de sang. On peut penser ce qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre
1184 e soleil et de sang. On peut penser ce qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de la fumée des sacrifices sanglants.
1185 r ce qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de la fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez p
1186 uve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence tonique certes, mais décidément un peu pauvre pour fonder un
1187 une religion. Mais ce n’est peut-être qu’un rêve de poète. Il y a un autre Montherlant, plutôt stoïcien, celui-là. Et c’e
1188 plutôt stoïcien, celui-là. Et c’est un moraliste de grande race, qui peut nous mener à des hauteurs où devient naturel ce
1189 us mener à des hauteurs où devient naturel ce cri de sagesse orgueilleuse : « Qu’avons-nous besoin d’un autre amour que ce
1190 de sagesse orgueilleuse : « Qu’avons-nous besoin d’ un autre amour que celui que nous donnons ? » ⁂ Il est impossible de n
1191 ue celui que nous donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie
1192 e de ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu
1193 xion des phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tableaux de violence et de passion, c’est la présence d’un t
1194 qui s’élève en fin de compte de tous ces tableaux de violence et de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’inver
1195 fin de compte de tous ces tableaux de violence et de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’au
1196 eaux de violence et de passion, c’est la présence d’ un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin,
1197 , c’est la présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’être, Montherlant
1198 tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’ être, Montherlant impose un tempérament lyrique d’une puissance contag
1199 d’être, Montherlant impose un tempérament lyrique d’ une puissance contagieuse. Il y a là de quoi faire oublier des défauts
1200 nt lyrique d’une puissance contagieuse. Il y a là de quoi faire oublier des défauts qui tueraient tout autre que lui. Cert
1201 ne soulève directement aucun des grands problèmes de l’heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche
1202 n être intime l’en empêche, le préserve des états d’ incertitude douloureux, où ces problèmes viennent se poser à l’esprit,
1203 problèmes viennent se poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Al
1204 vec la vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’ Alban — (de lui-même) — il n’« accroche » pas à ce qui est triste ou e
1205 Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban — ( de lui-même) — il n’« accroche » pas à ce qui est triste ou ennuyeux, qu
1206 ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la g
1207 es soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les chos
1208 ’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique.
1209 ttitude agace des gens qui se soucient avant tout de trouver des réponses de l’intelligence ou de la foi aux inquiétudes p
1210 ui se soucient avant tout de trouver des réponses de l’intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes s
1211 tout de trouver des réponses de l’intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Mont
1212 telligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Montherlant est aux antipodes de ceux-là
1213 aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Montherlant est aux antipodes de ceux-là « qui cherchent en gém
1214 s séparées de Dieu. Montherlant est aux antipodes de ceux-là « qui cherchent en gémissant ». Mais cette personnalité dont
1215 insolence les forces créatrices, ne vaut-elle pas d’ être élevée en témoignage pour notre exaltation ? Comme la vue des ath
1216 vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plutôt que d’oublier de
1217 r. N’est-ce point une solution aussi ? Plutôt que d’ oublier de vivre à force d’y vouloir trouver un sens, ne vaudrait-il p
1218 e point une solution aussi ? Plutôt que d’oublier de vivre à force d’y vouloir trouver un sens, ne vaudrait-il pas autant
1219 ion aussi ? Plutôt que d’oublier de vivre à force d’ y vouloir trouver un sens, ne vaudrait-il pas autant s’abandonner parf
1220 s obscures qui nous replacent dans l’intelligence de l’instinct universel et nous élèvent à une vie plus âpre et violemmen
1221 plus âpre et violemment contractée, par la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages v
1222 t contractée, par la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages viennent à l’appui de la
1223 la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’inst
1224 ’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’instinct de Bergs
1225 de tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique
1226 es viennent à l’appui de la théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique une chenille
1227 du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de
1228 Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient ce parallélisme
1229 chez Grasset », La Semaine littéraire, Genève, n°  1697, 10 juillet 1926, p. 335.
1230 rasset », La Semaine littéraire, Genève, n° 1697, 10 juillet 1926, p. 335.
1231 a Semaine littéraire, Genève, n° 1697, 10 juillet 1926, p. 335.
29 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
1232 Le Dépaysement oriental ( 16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intellectuel une « Question d’
1233 Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926 )a Il y a dans le monde intellectuel une « Question d’Orient » dont
1234 Il y a dans le monde intellectuel une « Question d’ Orient » dont on ne peut plus méconnaître l’urgence. Des prophètes — h
1235 occidental », et, au-dessus des ruines prochaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument le mirage d’un Orient paradisi
1236 nos cités mécaniciennes, ils rallument le mirage d’ un Orient paradisiaque d’où nous viendraient une fois de plus la sages
1237 ils rallument le mirage d’un Orient paradisiaque d’ où nous viendraient une fois de plus la sagesse et la lumière. De réce
1238 raient une fois de plus la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions sur quoi se fo
1239 pourtant subsistent encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il apporte sur les rap
1240 isions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus
1241 tes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces
1242 paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité l’Égypte, ses habitants, ses tomb
1243 secret dernier des choses, lucide, avec une sorte d’ acharnement, comme seul il sait l’être aujourd’hui sans que cela nuise
1244 aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui est parfois la plus subtile de ses ruses de psychologue
1245 don de sympathie qui est parfois la plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre, aux petits chapi
1246 thie qui est parfois la plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre, aux petits chapitres à la foi
1247 à la fois si concis et achevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni le journal plus ou moins lyrique auquel nous on
1248 habitués les voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu
1249 ne suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois —
1250 ante — si passionné. Nul n’est moins oriental que de Traz, et c’est ce qui donne à ses notations tout leur prix. Elles ne
1251 ne nous renseignent pas sur une partie orientale de lui-même, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur l’Orient. Enco
1252 l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’ un livre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux mondes que
1253 vre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accum
1254 on des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrai
1255 mulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et
1256 composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’
1257 précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individ
1258 aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus, et comme type d’individu euro
1259 araison valable qu’entre individus, et comme type d’ individu européen Robert de Traz ne pouvait trouver mieux que lui-même
1260 ce irréductible pour le vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de l’
1261 met de voir profond dans cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de l’eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis
1262 ans cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de l’eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du c
1263 u’il qualifie de « religion du fil de l’eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du christianisme es
1264 r âme en veilleuse, dit-il des rêveurs orientaux. De leur immense paresse, jusqu’à leur mysticisme, partout c’est une démi
1265 une démission qu’ils désirent. Du difficile oubli de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils l’ont rendu facile et en
1266 e la fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatati
1267 on fondamentale que « notre intelligence et celle de l’Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer,
1268 se sentir si loin de l’Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut conclure en une matière si comple
1269 à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me m
1270 que pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux autres parties du volume, d’une importance moins actuelle, mais d’une
1271 voulu le faire des deux autres parties du volume, d’ une importance moins actuelle, mais d’une qualité d’art peut-être supé
1272 du volume, d’une importance moins actuelle, mais d’ une qualité d’art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines
1273 une importance moins actuelle, mais d’une qualité d’ art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-É
1274 t-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux v
1275 ons sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues larges et pourtant réaliste
1276 la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues larges et pourtant réalistes, aux hypothèses hard
1277 s et pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun —
1278 alistes, aux hypothèses hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mais qui reste t
1279 igné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout romantisme pour édifier aucun système. Le livre se termine par u
1280  : le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et c
1281 don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’ un accent très noble et courageux mêlé, parfois, d’une certaine amertu
1282 ’un accent très noble et courageux mêlé, parfois, d’ une certaine amertume, où de Traz quitte le ton mesuré qu’il s’impose
1283 rageux mêlé, parfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte le ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue qu
1284 e, où de Traz quitte le ton mesuré qu’il s’impose d’ ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois un peu gêné cette présence de
1285 ’avoue que m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religi
1286 aux lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque cons
1287 eurs, que l’attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intérêt vivant de son livre : cette impartialité
1288 t critique de M. de Traz diminue l’intérêt vivant de son livre : cette impartialité même, cette façon de se placer en face
1289 son livre : cette impartialité même, cette façon de se placer en face des choses, tout près, mais sans jamais s’y perdre
1290 lité peut-être mieux que ne le feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme le
1291 me le type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’ être séduit que pour « mieux comprendre », assez « fidèle » à ses orig
1292 arder dans ses dépaysements un point de vue fixe, d’ où comparer et, parfois, juger ; préférant obstinément à la légende le
1293 t à la légende le vrai, même amer, non par défaut d’ un sens artistique dont plusieurs de ses morceaux attestent la délicat
1294 on par défaut d’un sens artistique dont plusieurs de ses morceaux attestent la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouve
1295 parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d’ exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. « 
1296 y trouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. « Le Dépaysement o
1297 , Paris. a. « Le Dépaysement oriental », Journal de Genève, Genève, n° 192, 16 juillet 1926, p. 1.
1298 ysement oriental », Journal de Genève, Genève, n°  192, 16 juillet 1926, p. 1.
1299 nt oriental », Journal de Genève, Genève, n° 192, 16 juillet 1926, p. 1.
1300  », Journal de Genève, Genève, n° 192, 16 juillet 1926, p. 1.
30 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
1301 Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926 )w Je ne crois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil d’essa
1302 ssages (juillet 1926)w Je ne crois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil d’essais, M. Fernandez a donné la prem
1303 ois pas exagéré de dire qu’en publiant ce recueil d’ essais, M. Fernandez a donné la première œuvre importante du mouvement
1304 a donné la première œuvre importante du mouvement de construction et de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains
1305 œuvre importante du mouvement de construction et de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La «
1306 synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’ aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer « 
1307 qu’il voudrait inaugurer « ne se contenterait pas d’ étudier les œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique
1308 ification historique ou technique, mais tâcherait d’ épouser le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans
1309 ouser le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’
1310 e talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin un critique qui sait tirer une leçon constructive d
1311 ées dans leurs recherches, il ne les condamne pas d’ un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholique ; mais tenan
1312 non vers le passé catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l’échec même de leurs analyses les élément
1313 compte de leur effort, il puise dans l’échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi conti
1314 dans l’échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, comme une déco
1315 ur œuvre, comme une découverte couronne une série d’ expériences négatives. La critique de ces expériences négatives est co
1316 ne une série d’expériences négatives. La critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses essais sur Pr
1317 it temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modern
1318 iter que M. Fernandez aborde par ce biais l’œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusion. Mais
1319 confusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il
1320 la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute
1321 phie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’ admettre plusieurs thèses beaucoup trop absolues. M. Fernandez tente d
1322 thèses beaucoup trop absolues. M. Fernandez tente de prouver par exemple que l’œuvre d’art ne peut être un moyen de connai
1323 r exemple que l’œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après quoi il écrit : « II y a, en fait, de
1324 connaissance personnelle. Après quoi il écrit : «  II y a, en fait, deux manières de se connaître, à savoir se concevoir et
1325 onnelle. Après quoi il écrit : « II y a, en fait, deux manières de se connaître, à savoir se concevoir et s’essayer. » Fort
1326 quoi il écrit : « II y a, en fait, deux manières de se connaître, à savoir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l
1327 ais l’œuvre n’est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une discussion de ces thèses subti
1328 s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une discussion de ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’auteur dans cet es
1329 de ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demande
1330 peut se demander s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusion
1331 nder s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y déc
1332 tement par opposition à la conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il défi
1333 ption proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de la « ga
1334 s juxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de la « garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe
1335 « garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur
1336 ntiments », où l’on est en droit de voir le germe d’ un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les données moder
1337 se fonderait solidement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pou
1338 ent sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une
1339 philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’ analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moin
1340 d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologi
1341 point si dangereux, il nous propose l’expérience d’ un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « p
1342 us propose l’expérience d’un Newman, les exemples d’ un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’a
1343 rience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’ un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire de l
1344 d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’h
1345 ont su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qu
1346 du cubisme littéraire, et qu’il serait bien utile d’ adopter, si l’on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter s
1347 tient surtout à sa forme : il est parfois agaçant de pressentir sous l’expression trop technique ou obscure, une richesse
1348 xpression trop technique ou obscure, une richesse d’ idées neuves et fortes, mais péniblement comprimées. Ce défaut de form
1349 et fortes, mais péniblement comprimées. Ce défaut de forme est peut-être inhérent, dans une certaine mesure, au genre de c
1350 être inhérent, dans une certaine mesure, au genre de critique pratiqué par Fernandez. Périlleuse situation que la sienne,
1351 sienne, en effet, où l’on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop philosophe aux litt
1352 n’empêche que son livre manifeste une belle unité de pensée, et qu’il propose quelques directions très nettes de synthèse.
1353 et qu’il propose quelques directions très nettes de synthèse. Avec une œuvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et
1354 synthèse. Avec une œuvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Mess
1355 Sports de Jean Prévost, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez sont les premières contr
1356 ais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissement d’une ét
1357 ont les premières contributions à l’établissement d’ une éthique adaptée aux besoins modernes. w. « Ramon Fernandez : Mes
1358 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juillet 1926, p. 124-125.
1359 e universelle et Revue de Genève, Genève, juillet 1926, p. 124-125.
31 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
1360 Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926 )x J’éprouve quelque gêne à porter un jugement littéraire sur ce no
1361 ement littéraire sur ce nouveau tome des mémoires de Montherlant : dans ce récit plus encore que dans les œuvres précédent
1362 ins l’œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel q
1363 eur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire qu
1364 vre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou de perfection formelle. Pour quelques-uns de ces trait
1365 llure plus que par des qualités de composition ou de perfection formelle. Pour quelques-uns de ces traits d’énergie ou de
1366 tion ou de perfection formelle. Pour quelques-uns de ces traits d’énergie ou de savante sensualité, pour ces insolences jo
1367 fection formelle. Pour quelques-uns de ces traits d’ énergie ou de savante sensualité, pour ces insolences jolies et les su
1368 lle. Pour quelques-uns de ces traits d’énergie ou de savante sensualité, pour ces insolences jolies et les subites violenc
1369 les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descriptions des prair
1370 lences, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles
1371 ques descriptions des prairies espagnoles pleines de simple grandeur, j’ai supporté mille fastidieux détails techniques et
1372 agnoles pleines de simple grandeur, j’ai supporté mille fastidieux détails techniques et des délires taurologiques avec lesqu
1373 t longue fidélité aux taureaux braves et simplets d’ esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans les prairies célestes, pou
1374 sir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura f
1375 sset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1926, p. 397-398.
1376 universelle et Revue de Genève, Genève, septembre 1926, p. 397-398.
32 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
1377 Soir de Florence (13 novembre 1926)h Des cris mouraient vers les berges du
1378 Soir de Florence ( 13 novembre 1926)h Des cris mouraient vers les berges du fleuve jaune
1379 Soir de Florence (13 novembre 1926 )h Des cris mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les de
1380 raient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corridor d
1381 e la ville présente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accueille le ciel — et derrière, elle devient plus se
1382 crète. Vers l’est, des collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les l
1383 reposante. Cette imparfaite accoutumance au monde de sensations inconnues où nous étions baignés nous promettait pourtant
1384 promettait pourtant une connaissance plus intime de certaine tristesse. Seule une maison blanche est arrêtée tout près de
1385 est arrêtée tout près de l’eau. Mais ce n’est pas d’ elle que vient cette chanson jamais entendue qui nous accompagne depui
1386 ui nous accompagne depuis un moment sur le chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’un char tiré par des
1387 de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’ un char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu parlais d
1388 s bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu parlais de chromos, de romantisme… nous voici dans une réalité bien plus étrange
1389 cs. Comme une apparition. (Tu parlais de chromos, de romantisme… nous voici dans une réalité bien plus étrange.) Une atmos
1390 ns une réalité bien plus étrange.) Une atmosphère de triste volupté emplit notre monde à ce chant. L’odeur du fleuve est s
1391 dans une beauté que saluent tant de souvenirs n’a d’ autre nom que celui de l’instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi
1392 luent tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de l’instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi simplement. Sans pensé
1393 insi simplement. Sans pensée, perdus dans un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe
1394 sée, perdus dans un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases
1395 r de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd. Le chant desc
1396 ure… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd. Le chant descend très douc
1397 ennent au ras du fleuve sombre. Nul désir en nous de comprendre ce lamento. Le ciel est un silence qui s’impose à nos pens
1398 impose à nos pensées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous
1399 rait sacrilège, comme une barre droite au travers d’ un tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va l’âme durant ces mi
1400 s sèches… Puis la brume est venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nui
1401 Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfa
1402 Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato
1403 ent des ombres informes et des harmonies troubles de parfums et de courbes compliquées. Nous secouons un sortilège pénétra
1404 informes et des harmonies troubles de parfums et de courbes compliquées. Nous secouons un sortilège pénétrant comme cette
1405 ds et faibles, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’esprit se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’ode
1406 et couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être pliée au vent
1407 s un sommeil à l’odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être pliée au vent qui ne parle jamais. N
1408 e fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’ être pliée au vent qui ne parle jamais. Nous fûmes si près de choir da
1409 ui nous enivrait, promettant à nos sens, fatigués de l’esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dan
1410 lus faciles — pour infuser dans nos corps charmés d’ un repos sans rêves une langueur dont on ne voudrait plus guérir… Mais
1411 rbes qu’épousent nos ferveurs, angles purs, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade éle
1412 l’esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’un équilibre
1413 façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’ un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait l’
1414 t le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte et des forces humaine
1415 grand pont de fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui
1416 sous des coups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain, et il étai
1417 oups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’ usines. Il y avait la vie des hommes pour demain, et il était beau d’y
1418 t la vie des hommes pour demain, et il était beau d’ y songer un peu avant de nous abandonner à l’oubli luxueux des rues. L
1419 es formes devinées dans l’espace nous environnent d’ une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-g
1420 tes. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’ une symphonie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en
1421 mphonie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par
1422 lle en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par personne et les devantures ne cherchent qu’à vous plaire.
1423 rabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de force
1424 nts et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces qui tisse la nuit
1425 mour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ ondes de forces qui tisse la nuit vibrante, intérêts, politesses, poli
1426 aisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces qui tisse la nuit vibrante, intérêts, politesses, politiques,
1427 des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau
1428 les yeux, au plus beau ciel du monde. h. « Soir de Florence », La Semaine littéraire, Genève, n° 1715, 13 novembre 1926,
1429 de Florence », La Semaine littéraire, Genève, n°  1715, 13 novembre 1926, p. 547-548.
1430 orence », La Semaine littéraire, Genève, n° 1715, 13 novembre 1926, p. 547-548.
1431 Semaine littéraire, Genève, n° 1715, 13 novembre 1926, p. 547-548.
33 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
1432 Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926 )y L’auteur veut amuser en nous quelques idées graves en leur prése
1433 lques idées graves en leur présentant les miroirs de personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un certain manq
1434 souhait, qui manifestent, avec un certain manque de conviction et des poses de mannequins, les tendances contradictoires
1435 avec un certain manque de conviction et des poses de mannequins, les tendances contradictoires d’un individu. C’est pour t
1436 oses de mannequins, les tendances contradictoires d’ un individu. C’est pour traiter ce sujet pirandellien qu’on s’embarque
1437 pirandellien qu’on s’embarque dans une croisière de vacances, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire su
1438 oit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’ unité vivante dans le rythme des désirs jamais simultanés de ses petit
1439 vante dans le rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on le sent ; pour
1440 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810.
1441 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810.
34 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
1442 Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926 )z Ce roman a le charme d’un automne, une amertume enveloppée, une
1443 Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’ un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop claire où les
1444 ur fatigué se reprend à souffrir, il ne sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d’un amour réveil
1445 els souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d’ un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable b
1446 osain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, dans une av
1447 uteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’ un pathétique assez neuf. z. « Alfred Colling : L’Iroquois (Émile-Pa
1448 ieux abandonné à son sujet, d’un pathétique assez neuf . z. « Alfred Colling : L’Iroquois (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèq
1449 Paul, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810-811.
1450 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810-811.
35 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
1451 André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un França
1452 dré Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926 )aa Un Chinois écrit d’Europe à un Français qui lui répond de Chine
1453 l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’ Europe à un Français qui lui répond de Chine. Nous sommes loin du ton
1454 inois écrit d’Europe à un Français qui lui répond de Chine. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes : le Chinois s’ét
1455 e on devine une détresse. C’est encore une vision de l’Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chi
1456 e. C’est encore une vision de l’Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’Europe
1457 « une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». No
1458 t ordonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non
1459 humilions sans trêve notre sensibilité au profit de ce « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit. La passion apparaî
1460 cadres — perpétuel conflit du réel avec nos rêves de puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne s
1461 tesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacr
1462 té essentielle » que le Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiat
1463 vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence
1464 ritiques du Chinois et sympathiser avec son idéal de culture. Il n’y a pas là deux points de vue irréductibles, du moins M
1465 thiser avec son idéal de culture. Il n’y a pas là deux points de vue irréductibles, du moins M. Malraux a fait parler son Ch
1466 es, du moins M. Malraux a fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme an
1467 lativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette confrontation, s’évanouit : c’est bien plutôt une unité supérie
1468 évanouit : c’est bien plutôt une unité supérieure de l’esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à
1469 humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à notre tour certaines démences qui enfièvrent l’Europe. Tandi
1470 us prenons chaque jour une conscience plus claire de la vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais ple
1471 aque jour une conscience plus claire de la vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût
1472 plus claire de la vanité de nos buts, « capables d’ agir jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté d’act
1473 « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ».
1474 acrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté d’ action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’est-il pas d
1475 ourd’hui notre race… ». Et peut-être n’est-il pas de position plus périlleuse, puisqu’elle risque de ne laisser subsister
1476 s de position plus périlleuse, puisqu’elle risque de ne laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la destruction e
1477 ne laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement su
1478 en nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitud
1479 e goût de la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude… » aa. « André Mal
1480 archie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude… » aa. « André Malraux : La Tentation de l’Occident (
1481 certitude… » aa. « André Malraux : La Tentation de l’Occident (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de G
1482 sset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 811-812.
1483 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 811-812.
36 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
1484 Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)b Nous voyons un mythe prendre corps p
1485 Paradoxe de la sincérité (décembre 1926 )b Nous voyons un mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps.
1486 us voyons un mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchie dont on
1487 de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’ une anarchie dont on ne veut pas avouer qu’elle est plus nécessaire —
1488 us trompant nous-mêmes, sous le prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hau
1489 le prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’une vertu première — e
1490 u de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’ une vertu première — et qui légitime tous les dénis de morale à quoi n
1491 e vertu première — et qui légitime tous les dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoût, et cer
1492 n réalité on sait quel dégoût, et certains désirs de grabuge moins avouables, — la sincérité, masque fier et un peu doulou
1493 e originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendancieuses et contradict
1494 fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendancieuses et contradictoires. Êtes-vous sincères en a
1495 e ; envers votre idéal ou envers les fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement immédiat à toute im
1496 me telle qu’elle est » (Rivière), ou encore refus de choisir, volonté de tout conserver en soi ? Ou bien une attitude en q
1497  » (Rivière), ou encore refus de choisir, volonté de tout conserver en soi ? Ou bien une attitude en quelque sorte scienti
1498 cientifique, à la fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de l’âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encor
1499 la fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de l’âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’aff
1500 reusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subti
1501 us rien comprendre. ⁂ Qu’on imagine un personnage de tableau se mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et l’étonne
1502 ectateur. Pour parler avec un peu de clairvoyance de ce dont nous avons vécu jusqu’à tel jour de notre jeunesse, il faudra
1503 yance de ce dont nous avons vécu jusqu’à tel jour de notre jeunesse, il faudrait pouvoir sauter hors de soi. Seule, une mé
1504 it pouvoir sauter hors de soi. Seule, une méthode d’ observation et de déduction passablement sèche pourrait nous donner l’
1505 hors de soi. Seule, une méthode d’observation et de déduction passablement sèche pourrait nous donner l’illusion et peut-
1506 donner l’illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En même temps, la froideur d’une telle méthod
1507 ette opération idéale. En même temps, la froideur d’ une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — parce que néc
1508 aine mesure — parce que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans l’effort d’un esprit pour se dégager de confusions au
1509 ssaire — ce qu’il y a de déplaisant dans l’effort d’ un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si profondém
1510 laisant dans l’effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si profondément mêlées à ses plus chères
1511 ères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’ où l’on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits
1512 », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéit
1513 rousseauiste, inspire, explique un vaste domaine de la littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomm
1514 e de la littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pou
1515 ui aboutit naguère au surréalisme. Tous les héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les critiques d’a
1516 iculer « gratuitement ». Et les critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’affaire : «
1517 ndigner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne compre
1518 audrait s’entendre. Et, ici encore, prenons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut pa
1519 e personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résu
1520 us incongru du héros n’est jamais que le résultat d’ un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage que ses actio
1521 t gratuit que relativement à un système restreint de références. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine
1522 à un système restreint de références. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meill
1523 lte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’e
1524 ns le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie gratuite que récl
1525 leur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de
1526 uite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur
1527 s secret dans la personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de soi. Mais pour être moins pittoresque
1528 Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de soi. Mais pour être moins pittoresque et plus « entachée d’utilitaris
1529 is pour être moins pittoresque et plus « entachée d’ utilitarisme », la décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible
1530 ision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’ un Julien Sorel, est-elle moins révélatrice du fond de l’âme humaine ?
1531 e du fond de l’âme humaine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, ou mieux : inté
1532 suffisamment son rôle en se bornant à nous donner de nous-mêmes une connaissance plus intense et plus émouvante ; mais la
1533 se et plus émouvante ; mais la morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, l
1534 scurités, etc.). Supposons que j’éprouve un désir d’ action vive, un élan vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste
1535 tain but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus lon
1536 ent. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. C
1537 je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus l’é
1538 frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que
1539 l’attention — et fatalement c’est à la découverte d’ une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a retenu d’accomp
1540 e que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a retenu d’ accomplir ce que l’élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le be
1541 ppelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes
1542 ntiments que je crois avoir éprouvés à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certain
1543 . Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certaines sensations profondes et indéfinies (telle sensation physiqu
1544 profondes et indéfinies (telle sensation physique de bonheur, dans une rue au coucher du soleil, des phares d’automobiles
1545 ur, dans une rue au coucher du soleil, des phares d’ automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fo
1546 dans des fourrures, personne ne sait la richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes, j
1547 . J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes, je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments
1548 oposaient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image
1549 te où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’ une image plus précise, cette minute est baignée d’une lueur de triste
1550 ’une image plus précise, cette minute est baignée d’ une lueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du p
1551 lus précise, cette minute est baignée d’une lueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi
1552 te minute est baignée d’une lueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi de certains déco
1553 énité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’éclairage, et la chaumière
1554 trospection : ce daltonisme du souvenir. Si l’un de ces deux procédés peut m’apprendre quelque chose, c’est bien le secon
1555 tion : ce daltonisme du souvenir. Si l’un de ces deux procédés peut m’apprendre quelque chose, c’est bien le second. La qua
1556 ait atteindre « la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’e
1557 , j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas le schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confession romancée
1558 de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confession romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et
1559 tte espèce de confession romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les e
1560 e de confession romancée dont les livres de Bopp, d’ Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples l
1561 ssion romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus ré
1562 livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs 
1563 us ces livres évoquent assez précisément la forme d’ un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. U
1564 se regarder vivre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspirati
1565 t dans un râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé
1566 aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation de mes dé
1567 : ce qui était élan devient recul, et l’évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourr
1568 e n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profon
1569 le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de
1570 la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’il s’acharne à approfo
1571 ofondir — il était venu y chercher quelque raison de vivre, il voulait se voir le plus purement (« cette curiosité donnée
1572 s purement (« cette curiosité donnée comme raison d’ une perpétuelle attente »), — ce que l’auteur découvre c’est ce « merv
1573 uteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tris
1574 l’élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hu
1575 able tristesse qui rôde dans certaine littérature d’ aujourd’hui. J’ai dit : ravages du sincérisme. C’est plus exactement f
1576 plus exactement faillite qu’il faudrait. Faillite de toute introspection, en littérature et en morale. Impossibilité de fa
1577 ction, en littérature et en morale. Impossibilité de faire mon autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de fair
1578 toportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus laid que nature. Fa
1579 e suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il imagine d’ éprouver. » Non. Car à supposer que l’analyse nous crée, elle ne nous
1580 est ». Il voyait dans cet effort sur soi le gage d’ un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avant tout u
1581 s cet effort sur soi le gage d’un enrichissement, d’ une consolidation de l’individu mais avant tout un moyen de se connaît
1582 le gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est
1583 solidation de l’individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que l’hom
1584 ncère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’ être différent », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la
1585 haiter d’être différent », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaiss
1586  », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’
1587 grès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il f
1588 sagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’ un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il ne s’en suit pas
1589 assez étroites empiriquement fournies par le sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire découvrir que
1590 découvrir quelques richesses et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais les bénéfices sont maigres en regard des dang
1591 r, tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuiss
1592 ue dans celui de l’action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissance à inventer. Car inventer, c’est
1593 e l’action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissance à inventer. Car inventer, c’est se porter à l’
1594 Car inventer, c’est se porter à l’extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une différence. Pourquo
1595 r, c’est se porter à l’extrême pointe de soi, et, d’ un élan, se dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi les romanc
1596 créer des personnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité les retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par le
1597 C’est parce qu’une sorte de sincérité les retient d’ imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac les fait v
1598 lairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes qui pourraient entraîner des effets imprévisibles, « réalisme 
1599  réalisme » décourageant, et, bientôt, incapacité d’ agir efficacement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans l’élan qu
1600 paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien d
1601 ments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fonction de l’homme est aussi bi
1602 De quelques sophismes libérateurs La fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sin
1603 érateurs La fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Riviè
1604 fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus ri
1605 e de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’ un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sinc
1606 La sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop sincère, pas s
1607 n’a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que
1608 la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est sincère aussi,
1609 mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne soit sinc
1610 besoin de mentir. Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne soit sincère. Peut-on véritablement se mentir à soi
1611 z pour qu’ils vous aident3 — mais jamais au point d’ oublier la vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’ar
1612 ire à la vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’indétermination violente
1613 ssi que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sinc
1614 ans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, invertie, qui
1615 sincérité tournée au vice, invertie, qui retient de l’oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
1616 ser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce
1617 l’homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaien
1618 s à peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’appeler sincérité et q
1619 t de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’ appeler sincérité et qui me devenait inintelligible en même temps qu’o
1620 inintelligible en même temps qu’odieux. Au hasard de quelques lectures, je pris note des passages suivants (les paraphrase
1621 ote des passages suivants (les paraphraser serait d’ une ingratitude insigne — ils marquent au reste fort bien les jalons d
1622 igne — ils marquent au reste fort bien les jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité et montre
1623 de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité et montrer plus de style. (Georges Duhamel.) … Nous ne somm
1624 ez-vous avouer moins de sincérité et montrer plus de style. (Georges Duhamel.) … Nous ne sommes pas, nous nous créons. Cer
1625 n qui altérerait leur moi ; ils ne souhaitent que d’ être leur propre témoin, intelligent mais immobile : ce sont les mêmes
1626 istant pas ? (François Mauriac.) La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il souffrirait de garde
1627 erait définie par l’aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi la valeur morale d’un homm
1628 -même à son propre regard. Ainsi la valeur morale d’ un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était capable d’entretenir
1629 équivalait-elle à l’illusion qu’il était capable d’ entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhandeau.) Ce qu’on appelle une œuv
1630 appelle une œuvre sincère est celle qui est douée d’ assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un
1631 une œuvre sincère est celle qui est douée d’assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ?
1632 celle qui est douée d’assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le perso
1633 me même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, p
1634 paraît plus sinistre à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’un
1635 il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’ un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque minute de ma
1636 time, ce moi idéal que j’appelle en chaque minute de ma joie est plus réel que celui qu’une analyse désolée s’imaginait re
1637 rs, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par
1638 vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d’ y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’
1639 moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’
1640 Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mo
1641 ................. Le vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’ava
1642 t tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’avais déjà invoquée, hypocrisie consolante e
1643 Mais tu m’offrais un visage un peu crispé, signe d’ une ironie secrète et pour moi douloureuse encore. Pitoyable, trop vis
1644 ent, tu prêtais bien quelques voiles à mon dégoût d’ un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuf
1645 rément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais un pli de ta lèvre, un peu sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’u
1646 sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’ un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux a
1647 quand mon esprit partait dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux aimée ; d’au
1648 t dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une
1649 ux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une symphonie de joies émanait de toute la vie : chaque chose proposait une ferveur no
1650 es soirs, alors qu’une symphonie de joies émanait de toute la vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque
1651 tat de grâce, un amour — ne pouvait se satisfaire de telle possession particulière, ne pouvait non plus s’imaginer qu’elle
1652 ement à l’invite que je soupçonnais la plus riche d’ inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rir
1653 is, vers tout ce que momentanément je choisissais de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’
1654 baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’ attribuer comme objet à ma jubilation, non pas ce but peut-être dériso
1655 vers quoi je me portais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me conciliais pour des retours possibles. C’est ai
1656 C’est ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de l’être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’a
1657 une arrière-pensée sagace et obstinée l’assurance d’ une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à-soi qui ne
1658 discrètement les décisions et les rend complices d’ un dessein logique, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité la pl
1659 lointain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées
1660 — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’ idées et jongleries verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’he
1661 d’idées et jongleries verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et
1662 ur ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’ un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité plus profonde
1663 une volonté — si profonde qu’elle n’a pas besoin de s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de nommer ce dont je
1664 s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’est peut-être qu’u
1665 s souffrir. (Car il n’est peut-être qu’une espèce de souffrance véritablement insupportable, c’est celle qu’on tire de soi
1666 ritablement insupportable, c’est celle qu’on tire de soi-même.) Hypocrisie, ce sourire des sphinx ; hypocrisie, masque amb
1667 ce sourire des sphinx ; hypocrisie, masque ambigu d’ une liberté plus précieuse que toute certitude… Ô vérité, ma vérité, n
1668 é, ma vérité, non pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’éla
1669 , mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, c
1670 me je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes
1671 mettre. Manifester est plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibili
1672 ychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre langage statique. 3. « 
1673 namisme directement dans notre langage statique. 3. « Et certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’affirmation pr
1674 langage statique. 3. « Et certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’affirmation prouve moins une certitude qu’un
1675 que. 3. « Et certes quand il s’agit de parole ou d’ écriture, l’affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de cert
1676 ffirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de quelque doute au fond. » (René Crevel) b. « Paradoxe
1677 e moins une certitude qu’un désir de certitude né de quelque doute au fond. » (René Crevel) b. « Paradoxe de la sincérité
1678 que doute au fond. » (René Crevel) b. « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fr
1679 é Crevel) b. « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, décembre 19
1680 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  1, décembre 1926, p. 13-25.
1681 ausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, décembre 1926, p. 13-25.
37 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
1682 Avant-propos (décembre 1926 )a Une mauvaise humeur qui flotte dans l’air nous proposerait de dé
1683 ise humeur qui flotte dans l’air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les difficultés du temps, en gé
1684 celles en particulier qu’implique la publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que ce serait de m
1685 is nous savons, tout comme M. Coué, que ce serait de mauvaise méthode. Et, comme M. Coué, nous nous persuadons que tout ir
1686 jamais, nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’ être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou
1687 mble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La vie d’ aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de n
1688 le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec une netteté qui a pu paraître parfois quelque peu
1689 que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’ être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en cela uniquement
1690 s n’est-ce pas la meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à nous comprendre et de nous accorder
1691 rcher plus patiemment encore à nous comprendre et de nous accorder une confiance sans laquelle nous ne saurions aller, et
1692 s, ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place a
1693 unes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’ emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’il
1694 e les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de les considérer ave
1695 e retenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Apr
1696 les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on
1697 cile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre « désordre ». Mais
1698  : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours
1699 uge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’ appeler notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un…
1700 notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut-elle fa
1701 eur bénévole, un exercice mensuel à votre faculté d’ indulgence. Par contre, nous nous empressons de vous laisser le soin d
1702 té d’indulgence. Par contre, nous nous empressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modeste
1703 tre, nous nous empressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, av
1704 ns de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à l
1705 plus » ; nous ne voulons pas être « l’expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est t
1706 us le saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que notre revue reste cette chose unique et indéfini
1707 indéfinissable, comme toute chose vivante… Gerbe de fleurs disparates, aux tiges divergentes, mais qu’un ruban rouge et v
1708 , mais qu’un ruban rouge et vert lie par la grâce d’ une volonté sans doute divine… a. « Avant-propos », Revue de Belles-
1709 é sans doute divine… a. « Avant-propos », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, décembre 19
1710 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  1, décembre 1926, p. 3-5. Signé : Le Comité central.
1711 ausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, décembre 1926, p. 3-5. Signé : Le Comité central.
38 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
1712 Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne mes parole
1713 Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927 )ab « Je n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppo
1714 s, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’ un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour le
1715 les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques,
1716 ur temps à recenser les incohérences pittoresques de ce petit livre. Quant à ceux que certaines envolées magnifiques et ha
1717 il leur réserve mieux encore : après une kyrielle d’ injures qui ne font pas honneur à l’imagination d’autres fois si prest
1718 ent ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de la persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion
1719 et une passion farouche pour la liberté, qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau surréaliste. Devant
1720 qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau surréaliste. Devant cette ostentation de révolte, ce mélange
1721 de Rousseau surréaliste. Devant cette ostentation de révolte, ce mélange de fanfaronnade et d’intense désespoir, on songe
1722 . Devant cette ostentation de révolte, ce mélange de fanfaronnade et d’intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et
1723 ntation de révolte, ce mélange de fanfaronnade et d’ intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à qui
1724 ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’em
1725 fais-tu le bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’ insistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon
1726 nsistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus origi
1727 le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la gr
1728 nts ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi trop de talents intéressants, un écrivain qui s’impose avec des qualités et d
1729 tre littérature pour trouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image,
1730 e. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques
1731 fatigantes et quelques sombres délires, des pages d’ un lyrisme inouï. Que Louis Aragon ne se croie pas tenu de justifier s
1732 isme inouï. Que Louis Aragon ne se croie pas tenu de justifier ses visions par le moyen d’une métaphysique aussi prétentie
1733 ie pas tenu de justifier ses visions par le moyen d’ une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est
1734 l’hallucination du décor des capitales, créatrice d’ un merveilleux de chaque instant, d’une véritable « mythologie moderne
1735 u décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de chaque instant, d’une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de
1736 es, créatrice d’un merveilleux de chaque instant, d’ une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite
1737 d’une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est pas sans
1738 logie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est pas sans rappeler celle des Nuit
1739 mposition n’est pas sans rappeler celle des Nuits d’ octobre de Nerval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de la phil
1740 d’octobre de Nerval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par
1741 Nerval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la descript
1742 n passant par la description réaliste ou imaginée d’ une boîte de nuit, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le
1743 r la description réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur liv
1744 ription réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’ une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’a
1745 ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture, d’ un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C
1746 d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romant
1747 ublic. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur d’ Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantisme nouveau
1748 e, un Nerval sans pudeur, un Musset ivre non plus de vin de France, mais d’alcools pleins de démons, de drogues peut-être
1749 erval sans pudeur, un Musset ivre non plus de vin de France, mais d’alcools pleins de démons, de drogues peut-être mortell
1750 r, un Musset ivre non plus de vin de France, mais d’ alcools pleins de démons, de drogues peut-être mortelles. ab. « Loui
1751 non plus de vin de France, mais d’alcools pleins de démons, de drogues peut-être mortelles. ab. « Louis Aragon : Le Pay
1752 e vin de France, mais d’alcools pleins de démons, de drogues peut-être mortelles. ab. « Louis Aragon : Le Paysan de Pari
1753 -être mortelles. ab. « Louis Aragon : Le Paysan de Paris (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
1754 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1927, p. 123-124.
1755 e universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1927, p. 123-124.
39 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Billets aigres-doux (janvier 1927)
1756 Billets aigres-doux (janvier 1927 )c Pour Harriet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur le mo
1757 dues Sur le mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beauté froide ? Oui, mais à qui s’adresser
1758 s pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’ un faux nom. c. « Billets aigres-doux », Revue de Belles-Lettres,
1759 n faux nom. c. « Billets aigres-doux », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 2, janvier 192
1760 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  2, janvier 1927, p. 40. Signé : Julien Domingue.
1761 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 2, janvier 1927, p. 40. Signé : Julien Domingue.
40 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
1762 Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)d Comme le démiurge venait de peser sur le
1763 ysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927 )d Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles
1764 ateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’ hésitation, se mit à pérégriner dans les régions de chasse gardée du c
1765 ’hésitation, se mit à pérégriner dans les régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, premier du nom
1766 famille, laquelle n’avait compté jusqu’alors que d’ authentiques avocats et un chapelier dont tous s’accordaient à dire qu
1767 accordaient à dire qu’il ne péchait que par excès de bonne humeur printanière, Urbain donc, premier mauvais garçon d’une r
1768 printanière, Urbain donc, premier mauvais garçon d’ une race entre toutes bénie — par qui ? elle était anticléricale, on n
1769 s, tout scintillement pudiquement dissimulé. Vers 1 heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d
1770 pudiquement dissimulé. Vers 1 heure, elle éclaira d’ une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’Urbain, et son nez, le
1771 a d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’ Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions remarquablement exagéré
1772 s remarquablement exagérées, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les é
1773 On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommag
1774 s irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de
1775 un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui souri
1776 oue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’ une hérédité judiciaire et française, dédaigna des avances que la pert
1777 e et française, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sens étymolo
1778 se, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du ter
1779 pleurait, sentimentale. d. « L’individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Ne
1780 atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 2, janvier 192
1781 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  2, janvier 1927, p. 54-55. Signé : Salomon de Crac.
1782 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 2, janvier 1927, p. 54-55. Signé : Salomon de Crac.
41 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Dans le Style (janvier 1927)
1783 Dans le Style (janvier 1927 )e Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet « Hommage à Paul Mo
1784 Dans le Style (janvier 1927)e Nous recevons d’ un bellettrien facétieux cet « Hommage à Paul Morand » : Billet circ
1785  : Billet circulaire pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène » L’auteur de maint roman de caractère gras quitte
1786 ul Morand, auteur de « Lewis et Irène » L’auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant aux titr
1787 ur de « Lewis et Irène » L’auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant aux titres, aux tire-l’
1788 matique, fait balle au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose d
1789 tenant des Anglais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en f
1790 eillant en français, termine : … Irène. (Grasset, 1924 … … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles li
1791 e.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante : Mardi dernier a été célébré en
1792 it dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grec
1793 : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse H
1794 église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaien
1795 la mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans le style. e. « Dans le st
1796 ieux dans le style. e. « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 2, janvier 192
1797 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  2, janvier 1927, p. 61-62.
1798 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 2, janvier 1927, p. 61-62.
42 1927, Articles divers (1924–1930). Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)
1799 Conférence d’ Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1
1800 Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)i Le sujet que M. Esmonin, pro
1801 smonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » ( 16 février 1927)i Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté de
1802 « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927 )i Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de
1803 e M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle des Conférences, devant
1804 un des plus passionnants et des plus controversés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de reste
1805 ants et des plus controversés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester impartial. M. Lomb
1806 L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Université, en introduisan
1807 ifficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux di
1808 cation. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et le
1809 (Cette attitude est plus rare qu’on ne le croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté comment, entre
1810 nin montra avec beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la
1811 avec beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France
1812 arté comment, entre 1578, date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus gr
1813 entre 1578, date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la
1814 date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus gr
1815 , et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la li
1816 religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur religion
1817 de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’ exercer leur religion, mais en même temps de quitter le pays, Louis XI
1818 ormés d’exercer leur religion, mais en même temps de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires qu
1819 oire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orat
1820 gistrés. Après avoir fait un tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose co
1821 e la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révocation. C’es
1822 a France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abo
1823 tion. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis ce sont les conseillers intime
1824 t fort bien leurs intérêts immédiats à leur désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuv
1825 n serait une œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en
1826 eil et capable de lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa
1827 e roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la princesse palatine, se laisse facilement convaincre
1828 jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuvent faire croir
1829 ants. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de l’émigration des fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On esp
1830 eurs pasteurs proscrits. On espère bien convertir de gré ou de force tous ceux qui resteront « Les enfants seront du moins
1831 urs proscrits. On espère bien convertir de gré ou de force tous ceux qui resteront « Les enfants seront du moins catholiqu
1832 ont presque anéanties ; les conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la
1833 e anéanties ; les conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la confessio
1834 cation commencent à se révéler politiques (guerre de la confession d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félici
1835 à se révéler politiques (guerre de la confession d’ Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félicitations arrachées
1836 par Louis XIV au pape, les catholiques sont loin d’ être unanimes à louer la révocation. L’un d’eux s’indigne, dans une le
1837 loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’ eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont
1838 L’un d’eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évan
1839 « les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contre ceux qui n’ont commis d’
1840 Et les persécutions contre ceux qui n’ont commis d’ autre crime que de « déplaire au roi » vont reprendre de plus belle :
1841 ns contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de « déplaire au roi » vont reprendre de plus belle : la guerre civile s
1842 le succède aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’ en faire un tableau qu’il suppose présent à l’esprit de ses auditeurs.
1843 faire un tableau qu’il suppose présent à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sorel, selon
1844 e ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’ Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque une déviatio
1845 le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la France. Dévia
1846 t d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la France. Déviation telle, e
1847 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséqu
1848 e, en effet, que nous en sentons les conséquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvons que nous réjo
1849 e M. Esmonin. Et nous ne pouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans l’ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’exp
1850 qu’il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris, si libre et d’une si élégante science du sympathique prof
1851 XIV l’exposé si dénué de parti pris, si libre et d’ une si élégante science du sympathique professeur de Grenoble. i. « 
1852 une si élégante science du sympathique professeur de Grenoble. i. « Troisième conférence des Amis de la pensée protestan
1853 de Grenoble. i. « Troisième conférence des Amis de la pensée protestante : La révocation de l’édit de Nantes », Feuille
1854 des Amis de la pensée protestante : La révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39, 16 février 19
1855 te : La révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’ Avis de Neuchâtel, n° 39, 16 février 1927, p. 8.
1856 révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39, 16 février 1927, p. 8.
1857 édit de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n°  39, 16 février 1927, p. 8.
1858 de Nantes », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39, 16 février 1927, p. 8.
1859 », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 39, 16 février 1927, p. 8.
43 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
1860 Bernard Barbey, La Maladère (février 1927 )ac « Quel admirable sujet de roman, écrit Gide, au bout de quinze
1861 ladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet de roman, écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans de vie conjuga
1862 admirable sujet de roman, écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive
1863 ujet de roman, écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive et récip
1864 t de roman, écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive et réciproque
1865 , écrit Gide, au bout de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive et réciproque des con
1866 ait que Beyle appelait cristallisation une fièvre d’ imagination qui orne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais le
1867 cristallisation une fièvre d’imagination qui orne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce tem
1868 magination qui orne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fi
1869 lusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait
1870 vre. Et comme la morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques
1871 encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre de le
1872 plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit e
1873 aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit entre eux dans leur isolement, ine
1874 e qu’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. M
1875 ais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’ eux-mêmes pour que ce mot, ce geste, soient possibles. C’est d’Armande
1876 our que ce mot, ce geste, soient possibles. C’est d’ Armande surtout qu’on les attendrait, plus franche d’allure. On ne sai
1877 rmande surtout qu’on les attendrait, plus franche d’ allure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour 
1878 e sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’ amour ? Pour Jacques, il souffre d’une incurable adolescence, d’un déf
1879 r ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d’ une incurable adolescence, d’un défaitisme sentimental qui l’empêtre d
1880 Jacques, il souffre d’une incurable adolescence, d’ un défaitisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et le fait joue
1881 scence, d’un défaitisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « 
1882 es, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’ homme… « Captif de sa propre jeunesse. » C’est ici un autre sujet du r
1883 er bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propre jeunesse. » C’est ici un autre sujet du roman, qui se mêle
1884 tte analyse trahit Barbey : son art est justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un ge
1885 st justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image
1886 es moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange h
1887 iolence, autour de ces êtres dont la détresse est d’ autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des dehors trop polis. U
1888 us des dehors trop polis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer plus que
1889 s fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se condense le sen
1890 os, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’ une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arb
1891 uvrant le manoir perdu, des fumées sur un paysage d’ hiver et soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de p
1892 s sur un paysage d’hiver et soudain sous la lueur d’ un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est admirable,
1893 e d’hiver et soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est admirable, dont la brutalité
1894 sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est admirable, dont la brutalité si longtemps dési
1895 la brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’ un passé obsédant, d’une jeunesse trop complaisante à son tourment.
1896 emps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant, d’ une jeunesse trop complaisante à son tourment. ac. « Bernard Barbey 
1897 sset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 265.
1898 e universelle et Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 265.
44 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
1899 Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927 )ad L’on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le rece
1900 mmes, écrire ne soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse.
1901 ensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’ une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’auteur de vers
1902 action qu’elle leur laisse. Montclar est l’auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comprend que ce
1903 u’elle leur laisse. Montclar est l’auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comprend que ce journal
1904 joindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste en toute occasion de sa vie est peut-
1905 ne pas y tenir, qu’il manifeste en toute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Offic
1906 ux ? » pour lui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que phil
1907 our Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour
1908 r la souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour n
1909 isir, un peu plus viennois que naturel s’il parle de choses d’art comme on fait dans Proust, si les passions qu’il nous pe
1910 eu plus viennois que naturel s’il parle de choses d’ art comme on fait dans Proust, si les passions qu’il nous peint sont i
1911 Il se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous trompe
1912 pour savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se c
1913 s tromper là-dessus. Il se connaît avec une sorte de froideur que l’on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de
1914 n dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus que ses succès, certaines faiblesses qu’il recherche
1915 faiblesses qu’il recherche secrètement, parce que de ces « ratages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la conditi
1916 e que de ces « ratages » naît le perpétuel besoin d’ évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il c
1917 e perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans une impercepti
1918 , non sans une imperceptible satisfaction, l’aveu d’ une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vie volup
1919 . Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n’a pas exténués. Mais alors quelle av
1920 etites blessures. Ce n’est pas le moins troublant d’ une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en dégage, sagesse qu
1921 r est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me s
1922 ouffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’ éternité. » Il est juste, ce me semble, d’insister sur ce qui forme da
1923 pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me semble, d’ insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme une arrière
1924 semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que l
1925 e inquiète et un peu hautaine. Que la composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on hésite à en fa
1926 site à en faire reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps q
1927 ire reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’i
1928 ant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre d’ une résonance si humaine, est mieux que charmant, — douloureux et dési
1929 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un mo
1930 e universelle et Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau de phrase dans l’édition
1931 927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau de phrase dans l’édition originale.
45 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
1932 Lettre du survivant (février 1927 )f « Triste, mais vrai. » (Les journaux.) Mademoiselle, Il faut d
1933 ’abord que je m’excuse : c’est un peu prétentieux de vous écrire au moment où je vais me suicider, d’autant plus que vous
1934 de vous écrire au moment où je vais me suicider, d’ autant plus que vous n’y croirez pas — et pourtant… Il faut aussi que
1935 ez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lie
1936 allusion de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on dit, sans doute parc
1937 de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on dit, sans doute parce que c’
1938 ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on dit, sans doute parce que c’est là que se nouent le
1939 existiez en moi, à certain désagrément que j’eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les
1940 entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes a
1941 nfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la
1942 vais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèr
1943 romesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’ une fois pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous les détourni
1944 ecrètement attirante ; et je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je d
1945 sais quel démon du malheur me paralysa. Je venais d’ entrevoir l’image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondan
1946 alheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’image d’ un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, comme on
1947 vexé ; vous disparaissiez au milieu d’un cortège de rires empressés. Une autre danse reprenait. Je sentis une invincible
1948 dait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’ un geste incertain quelques bouteilles de champagne vides ; car on par
1949 ésignais d’un geste incertain quelques bouteilles de champagne vides ; car on pardonne l’ivresse, mais non certaines doule
1950 mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes
1951 es œillères géantes aux pensées, le ciel trop bas d’ un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil sans fin… J’avai
1952 op bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’ un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liquide me s
1953 sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’ un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les
1954 a table en désordre où je venais de jeter mon col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont le se
1955 n col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d’ une autre femme dont le seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux,
1956 illesse d’une autre femme dont le seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée, et ce refus au so
1957 l défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à l’âme.) Co
1958 sommeil qui meurtrit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’ oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le ch
1959 une chambre étroite… J’ai dormi quelques heures, d’ un sommeil triste, tout enfiévré par la crainte du réveil. Puis je sui
1960 passer trop souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, j
1961 disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’ elle, je pourrai lui dire très vite quelques mots si bouleversants qu’
1962 evais paraître si perdu. Chaque fois qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’
1963 is paraître si perdu. Chaque fois qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’épro
1964 r descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué, sourian
1965 tre bel ami laqué, souriante… Enfin, un peu après 6 heures, je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans les rues, so
1966 oule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par vous voir partout.
1967 Je finissais par vous voir partout. Chaque visage de femme révélait soudain un trait de votre visage. Il aurait fallu cour
1968 Chaque visage de femme révélait soudain un trait de votre visage. Il aurait fallu courir après celle-là qui venait de tou
1969 ir après celle-là qui venait de tourner à l’angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps, vous p
1970 éticents, maladroits, contradictoires… Un autobus de luxe s’était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à l’intérieur
1971 Mais je n’osais presque pas la regarder, à cause d’ une incertitude qui redonnait tout son empire à ma timidité. Peut-être
1972 tre était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder.
1973 s parapluies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièr
1974 utes les femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’ un long regard de damné. À minuit, tellement épuisé que je mêlais à me
1975 ue j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À minuit, tellement épuisé que je mêlais à mes pensées des fra
1976 épuisé que je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans
1977 nts, je me pris à parler à haute voix, par bribes de phrases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie les employés et
1978 les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheu
1979 roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux
1980 vant de retrouver ma rue. Il doit être maintenant 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il me se
1981 tre maintenant 5 heures du matin. Premiers appels d’ autos dans la ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent d
1982 , mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigineusement, par cette aube incolore. Il y a vingt-quatre he
1983 vertigineusement, par cette aube incolore. Il y a vingt-quatre heures donc, j’étais encore au bal. Cette constatation machinale ne c
1984 du la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupportable et définitive de mon désir. Je ne vous
1985 ue de cette déception insupportable et définitive de mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoque
1986 -je pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destruction, ce rongement, cette sournoise recherche de tout ce qu
1987 truction, ce rongement, cette sournoise recherche de tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est char
1988 recherche de tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, en
1989 st chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image
1990 sse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends pl
1991 audrait que je dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai pas son nom. f. « Lettre d
1992 i pas son nom. f. « Lettre du survivant », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 3, février 192
1993 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  3, février 1927, p. 67-72. Signé : Arthur.
1994 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 3, février 1927, p. 67-72. Signé : Arthur.
46 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
1995 Orphée sans charme (février 1927 )g « Cet âge est sans pitié. » « Le véritable symbole n’est jamai
1996 ur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’i
1997 préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’ Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dan
1998 Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne
1999 e dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’ y découvrir possibles deux interprétations symboliques au moins ; de n
2000 i me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux interprétations symboliques au moins ; de ne pouvoir m’empêcher d’y s
2001 ibles deux interprétations symboliques au moins ; de ne pouvoir m’empêcher d’y songer sans cesse en lisant cette « tragédi
2002 s symboliques au moins ; de ne pouvoir m’empêcher d’ y songer sans cesse en lisant cette « tragédie » ; de ne pouvoir m’emp
2003 songer sans cesse en lisant cette « tragédie » ; de ne pouvoir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus
2004 « tragédie » ; de ne pouvoir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus ou moins consciemment concerté la
2005 pouvoir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’ en avoir plus ou moins consciemment concerté la possibilité. Orphée, p
2006 , dit-il, il faut obtenir un scandale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer l’inconnu
2007 prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une phrase »
2008 est un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagram
2009 ur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves pu
2010 s, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les q
2011 l’inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quelques préoccupations assez simples dont l’étude cha
2012 ursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a-t-on dit5. Certes, cette pièce n’est pas
2013 -on dit5. Certes, cette pièce n’est pas dépourvue de certaines des qualités qui, selon Max Jacob, permettraient seules de
2014 alités qui, selon Max Jacob, permettraient seules de taxer de chrétienne une œuvre d’art. Mais, d’autre part, cette équivo
2015 i, selon Max Jacob, permettraient seules de taxer de chrétienne une œuvre d’art. Mais, d’autre part, cette équivoque des s
2016 ettraient seules de taxer de chrétienne une œuvre d’ art. Mais, d’autre part, cette équivoque des symboles, cette simplicit
2017 dmire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même indiquer aucun endroit p
2018 cipes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif
2019 tif restera l’un des titres les plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingénieuse utilisation des
2020 se utilisation des expressions courantes, maximum de « situation » des personnages obtenu avec un minimum de répliques ; e
2021 ituation » des personnages obtenu avec un minimum de répliques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans le détail, un vr
2022 parfaitement pauvre dans le détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pas maigre, d’une familiari
2023 pauvre dans le détail, un vrai style de théâtre, d’ une netteté qui pourtant n’est pas maigre, d’une familiarité dramatiqu
2024 tre, d’une netteté qui pourtant n’est pas maigre, d’ une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’un trait pur. Il sem
2025 d’une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’ un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exactement ce qu’il
2026 es. « Puisque ces mystères me dépassent, feignons d’ en être l’organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphé
2027 n somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’est d’ avoir réussi complètement une pièce, prouvant une fois de plus que l’a
2028 pièce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon
2029 rphée, sinon peut-être cette indispensable « part de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’imp
2030 ieu » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que l
2031 ’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de roses dans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’art, mais
2032 s dans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parf
2033 de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.   (Tout de même, Cocteau est un poète : j’en v
2034 ur mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette d
2035 is parler de lui autrement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée
2036 par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’amour conju
2037 sanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… g. « Or
2038 dions pas tant… g. « Orphée sans charme », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 3, février 192
2039 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  3, février 1927, p. 85-87.
2040 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 3, février 1927, p. 85-87.
47 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
2041 L’autre œil (février 1927 )h Décembre L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la
2042 que s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut
2043 s ne sommes pas des imbéciles, nous ne sommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et
2044 s, nous ne sommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des
2045 us ne sommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des soir
2046 ommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des soirs où tout
2047 out ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de la responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de
2048 s soirs où une idée de la responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en hu
2049 s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heu
2050 nous. Et nous calculons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Ma
2051 culons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapi
2052 it de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue
2053 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par chacun dans so
2054 trevue par chacun dans son for le plus intérieur, d’ une fuite en auto, nous rassure provisoirement… Prosopopée, à propo
2055 , à propos d’une apparition La vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine mauvaise, édentée
2056 e, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’ un comique assez macabre. Ses derniers sectateurs, désignant d’un doig
2057 assez macabre. Ses derniers sectateurs, désignant d’ un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri, la suivaient en hurlant :
2058 oi là ! »… Est-il plus atroce spectacle que celui d’ une maîtresse jadis belle et diserte qui tombe au ruisseau en prononça
2059 le et diserte qui tombe au ruisseau en prononçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur, les bellettriens avaient fui.
2060 eau en prononçant de séniles calembours… Pénétrés d’ horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils re
2061 ’horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’ une ivresse, ils rencontrèrent une créature évadée d’anciens rêves qui
2062 ne ivresse, ils rencontrèrent une créature évadée d’ anciens rêves qui hantait les limbes depuis un an déjà. Ils ne tardère
2063 dèrent pas à reconnaître Cinématoma. Naissance de Cinématoma Cinq bellettriens furent commis au soin d’engendrer cet
2064 nnaître Cinématoma. Naissance de Cinématoma Cinq bellettriens furent commis au soin d’engendrer cet adorable monstre.
2065 matoma Cinq bellettriens furent commis au soin d’ engendrer cet adorable monstre. Ils se réunissent parfois autour d’un
2066 dorable monstre. Ils se réunissent parfois autour d’ un feu et le contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit
2067 . Quelquefois, Mossoul amène un scénario né entre deux cafés-nature, et presque sans qu’il s’en soit rendu compte. Clerc ent
2068 en soit rendu compte. Clerc entrevoit un projet à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. To
2069 rojet à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jama
2070 de ce paludesque et stérile consistoire, une idée de génie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin
2071 s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un
2072 par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur
2073 se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. »
2074 uration. » Enfin l’on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la
2075 partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revint juste à
2076 revint juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeun
2077 assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née
2078 u point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos
2079 ts de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le
2080 ovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu
2081 ue le disait si poétiquement le programme. Un peu d’ histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’I
2082 iquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à
2083 ramme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où le
2084 que de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. P
2085 ran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M. Grosclaude son fils Lucas Loukitch et une mise en scène
2086 ise en scène fort ingénieuse qui permit à Mossoul de se perdre dans des jupons autrement que par métaphore. À La Chaux-de-
2087 que par métaphore. À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds
2088 . À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’oreillles ?
2089 onds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fu
2090 cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’ét
2091 dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’ oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans
2092 -il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s’aperçut
2093 on appelle, sans doute par antiphrase, la vie. 6. Revue ou prologue. h. « L’autre œil », Revue de Belles-Lettres, Laus
2094 6. Revue ou prologue. h. « L’autre œil », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 3, février 192
2095 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  3, février 1927, p. 94-95. Signé : Topinet.
2096 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 3, février 1927, p. 94-95. Signé : Topinet.
48 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
2097 Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927 )af M. Edmond Jaloux offre l’exemple rare d’un homme que son évolut
2098 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’exemple rare d’ un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans sa maturité, de
2099 té, des jeunes générations, en sorte que l’espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement d
2100 ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son autorité de critique et surtout de son expérience déjà riche de r
2101 emporains, et qu’il vient appuyer de son autorité de critique et surtout de son expérience déjà riche de romancier. Son re
2102 nt appuyer de son autorité de critique et surtout de son expérience déjà riche de romancier. Son regard se promène sur le
2103 critique et surtout de son expérience déjà riche de romancier. Son regard se promène sur le même monde où se plaisent nos
2104 s, mais il garde une certaine discrétion, cet air de rêverie d’un homme qui en sait long… Et, certes, il faut être un peu
2105 garde une certaine discrétion, cet air de rêverie d’ un homme qui en sait long… Et, certes, il faut être un peu mage pour p
2106 es avec cette mélancolique grâce. Si quelques-uns de ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux, j’y vois un signe ch
2107 uelques-uns de ses bijoux sont taillés comme ceux de Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de l’aîné au plus jeun
2108 mme ceux de Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’ amitié de l’aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages
2109 de Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de l’aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour reme
2110 mitié de l’aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remercier ; (pouvait-il mieux trouver qu’un René
2111 va pas s’attabler au café en face des personnages de Jaloux. Et peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul M
2112 dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confidences qu’elle livre si facilement au héros plus c
2113 t au héros plus confiant et secrètement incertain de ce roman. À la veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste pari
2114 et secrètement incertain de ce roman. À la veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre une femme
2115 incarne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il ai
2116 sa femme, « mais comme on aime une petite maison de province quand on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’imag
2117 tite maison de province quand on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gag
2118 ailli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’image d’ Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une merveilleuse o
2119 Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’ une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans les
2120 ssance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’a
2121 rd’hui un réalisme discret mais précis et le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos actes avant
2122 et mais précis et le sens de ce qu’il y a en nous d’ essentiel, de ce qui détermine nos actes avant que la raison n’intervi
2123 s et le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos actes avant que la raison n’intervienne, mouveme
2124 tes avant que la raison n’intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoués, rêves éveillés. Tout un système d
2125 s-mêmes inavoués, rêves éveillés. Tout un système de valeurs lyriques et sentimentales que la raison ignore ou tyrannise a
2126 ère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’ un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équilibre qu’il
2127 yrique, par l’équilibre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que
2128 itent des personnages spirituellement dessinés un de ces drames tout intérieurs dont il dit : « Personne ne peut juger du
2129 Personne ne peut juger du drame qui se joue entre deux êtres, personne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans l’Âge d’or
2130 , pas même eux ». Dans ce roman, comme dans l’Âge d’ or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mélancoli
2131 d’or, un désenchantement profond prend le masque d’ une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses qui vous
2132 dues, aveux incompris, et peut-être, un quiproquo de destinées… Le tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières
2133 ut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si l
2134 odique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’ orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et déc
2135 onde et délicieuse, gagnera à son auteur beaucoup d’ amis inconnus. af. « Edmond Jaloux : Ô toi que j’eusse aimée… (Plon,
2136 Plon, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1927, p. 387-388.
2137 èque universelle et Revue de Genève, Genève, mars 1927, p. 387-388.
49 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
2138 Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)i Surprendre est peu
2139 r’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927 )i Surprendre est peu de chose, il faut transplanter. Max Jacob.
2140 b. Ce soir-là, le programme comprenait : un film d’ avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et le Voyage imaginaire, d
2141 ilm japonais ; Entr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’un
2142 et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de province s’a
2143 naire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905 ) : quelques acteurs d’une troupe de province s’agitent incompréhensib
2144 Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’ une troupe de province s’agitent incompréhensiblement dans un décor tr
2145 re (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de province s’agitent incompréhensiblement dans un décor très pauvre, lé
2146 cipe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ; et une crise intérieure par un co
2147 simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ; et une crise intérieure par un court accès
2148 rine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’Hyppolite se passe en c
2149 une crise intérieure par un court accès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’Hyppolite se passe en coulisse.
2150 ès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’ Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant le cad
2151 te bande est antérieure à l’époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiette un peu plus banale que
2152 bien photographiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de
2153 ardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens bien habillés. » Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une
2154 s gens bien habillés. » Soudain éclate Entr’acte ( 1925 ). « Une étude sur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le c
2155 25). « Une étude sur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des p
2156 inées dans le ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, t
2157 sent au fond à toute vitesse. Rigueur voluptueuse d’ une colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur la corniche d’un gr
2158 Rigueur voluptueuse d’une colonnade, puis un jeu d’ échec serré, mais sur la corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à desc
2159 , puis un jeu d’échec serré, mais sur la corniche d’ un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de papier, sur
2160 hec serré, mais sur la corniche d’un gratte-ciel, d’ où se met à descendre un petit bateau de papier, sur fond de boulevard
2161 tte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi les toits flottants, c’est as
2162 t à descendre un petit bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi les toits flottants, c’est assez tragique. Mitrai
2163 its flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides.
2164 nts, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’ auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasse
2165 ssez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100  000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours
2166 tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100  000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur
2167 . Mitrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit
2168 asseur, toujours sur son toit ; il tire sur l’œuf d’ où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de
2169 be. Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de l’aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l
2170 apillon éclatant qui battait de l’aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’écran : une danseuse
2171 e enfin sur l’écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelques miracles qui suivent sont embrumés d
2172 ont embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux
2173 ur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées
2174 qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec
2175 le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteur et une pe
2176 de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteur et une perfection dont une brève v
2177 . Ils revoient la danseuse, font une ronde autour d’ une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, pu
2178 danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Ch
2179 , font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Ély
2180 nde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une al
2181 e tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissan
2182 il roule dans les marguerites, il en sort un chef d’ orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂
2183 es personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans le domai
2184 e pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’ entraînement dans le domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et no
2185 eux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût
2186 rne. Un peu plus et nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même
2187 ’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand l
2188 oupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où il
2189 là par exemple, où nous ne pouvons nous empêcher d’ admirer l’utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines th
2190 er l’utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous
2191 n ça, c’est comme quand on rêve. » Un des défauts d’ Entr’acte, c’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterr
2192 éfauts d’Entr’acte, c’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le mond
2193 oit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur ; toute bizarrerie détourne du véritable miracle auquel nous
2194 du véritable miracle auquel nous assistons. Mais de pareils défauts sont presque inévitables dans une production de début
2195 auts sont presque inévitables dans une production de début, et Entr’acte mérite d’être ainsi qualifié : c’est peut-être le
2196 dans une production de début, et Entr’acte mérite d’ être ainsi qualifié : c’est peut-être le premier film où l’on a fait d
2197 aphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mai
2198 il exprime, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une quest
2199 is comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d’épuration des moyen
2200 ilm 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d’épuration des moyens. Rendre le plus
2201 e crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d’ épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un
2202 oyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’ un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’ores et dé
2203 d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair u
2204 e. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne parle pas
2205 ersant. Et je ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré).
2206 cière transforme un homme en chien, cela n’a rien d’ étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne serait ét
2207 rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’ une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; ce n’est pas enco
2208 que dans le réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi q
2209 miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’ une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncidences de mou
2210 omme qui court au ralenti, certaines coïncidences de mouvements… C’est une réalité quotidienne dans une lumière qui la mét
2211 l » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille figures que peut revêtir une substantia dont nos sens trop faibles —
2212 des nées des nécessités sociales — nous empêchent de découvrir la richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’inc
2213 ichesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’ incompréhensible, non Madame, car alors quoi de plus surréaliste que l
2214 e, car alors quoi de plus surréaliste que le film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il reste qu’un fil
2215 le film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’ imagination ; il reste qu’un film comme Entr’acte est une aide puissan
2216 faisons nos premiers pas, étourdis, dans un pays d’ illuminations vertigineuses, et nous en sommes encore à nous frotter l
2217 and nos regards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse les prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par
2218 s-nous, pris par surprise dans l’exploration ivre d’ un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’un ange. i. « Entr
2219 d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’ un ange. i. « Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle », Revu
2220 fatidiques, le visage d’un ange. i. « Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausann
2221 cte de René Clair, ou L’éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 4, mars 1927,
2222 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  4, mars 1927, p. 124-127.
2223 s, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 4, mars 1927, p. 124-127.
50 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
2224 Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927 )ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur les générations nouvell
2225 rise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée maintient
2226 intelligence très nuancée maintient en une sorte d’ instable équilibre, les tendances que ses contemporains ont poussées à
2227 contemporains ont poussées à l’extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras s
2228 ées à l’extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans l’aimer ; saluant e
2229 ré par les thèses extrémistes mais non dépourvues d’ une sombre grandeur, des surréalistes, et en même temps par cette solu
2230 ette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte
2231 irections générales. « Hamlétisme », pouvoir aigu d’ analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’approfondissement du
2232 sion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’absolu à la
2233 dissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’absolu à la fois mystique et anarchiqu
2234 oif de tout et pourtant mépris de tout, procédant d’ un goût de l’absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien le
2235 t et pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands t
2236 ue et anarchique : ce sont bien les grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé le rôle
2237 e extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l
2238 en face de l’inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’
2239 les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’ aujourd’hui. Il constate que l’une (celle de Gide) ne fait que différe
2240 gens d’aujourd’hui. Il constate que l’une (celle de Gide) ne fait que différer notre inquiétude, tandis que l’autre « ne
2241 angoisse qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible,
2242 ient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’ un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans remède. Mai
2243 , M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à la tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconsciente ruse d’un i
2244 emmes irréductibles, suprême et inconsciente ruse d’ un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer
2245 ciente ruse d’un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiétude ou foi. Dès lo
2246 rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment les deux terme
2247 quiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’autre ?
2248 foi. Dès lors sont-elles vraiment les deux termes d’ un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la fo
2249 ue le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiét
2250 utre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité…
2251 autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase qui formule admirablement les exigence
2252 ui formule admirablement les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le
2253 ement les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… »
2254 rrin, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1927, p. 563-564.
2255 que universelle et Revue de Genève, Genève, avril 1927, p. 563-564.
51 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
2256 Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927 )j Ah ! je sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de mon êt
2257 je sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle
2258 mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fantaisie, même si
2259 isie, même si cela doit m’anéantir. Hoffmann. I (Notes écrites en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur le
2260 ir. Hoffmann. I (Notes écrites en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en
2261 I (Notes écrites en décembre 1925, au sortir d’ une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne
2262 bre 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules
2263 ne une rage. Sur quelles épaules jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier l’ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique
2264 ce manteau de flammes, puis à qui dédier l’ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon échappé
2265 our le pittoresque. — Attrape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’existe que des systèmes pour faire taire en no
2266 des Dieux, mais c’est pour détourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en v
2267 s nous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de la sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’
2268 eules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, d
2269 lairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés, les vices en
2270 st un ricanement splendide comme un éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité. Le diable avait pris des avocats don
2271 s palinodies, font encore rêver les anges écœurés d’ azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix torturée, hurle au pap
2272 es écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’ une voix torturée, hurle au pape et au diable un anathème sanglant. Lo
2273 diable un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On
2274 ouis Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu
2275 ’on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un savant. Je ne connais pas de meilleur remède contre Di
2276 !, trois mots dont l’un savant. Je ne connais pas de meilleur remède contre Dieu. Monsieur, vous avez dit : « C’est incomp
2277 ! » — avec une indignation où j’admire une pointe d’ ironie vraiment supérieure. Car rien ne pouvait mieux exciter, signe d
2278 érieure. Car rien ne pouvait mieux exciter, signe d’ aise extrême, vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par le rep
2279 éprouvées par le repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieu
2280 protège votre paresse à concevoir en esprit. Ces trois mots vous ont délivré du plus absurde malaise, et vous rallumez votre
2281 la porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ....................................
2282 ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques h
2283 désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir. Le derni
2284 e s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque
2285 n eux. Ni même celui de souffrir. Le dernier rire d’ Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux somme
2286 souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des faibles
2287 r rire d’Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque d’ être seul sur un faux sommet vers quoi des faibles s’efforcent — mais
2288 es nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses rires scandaleux, quelques « goujateries » affecté
2289 ux, quelques « goujateries » affectées par mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant
2290 eries » affectées par mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô grand Rê
2291 neur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’ un fascinant éclat : « Ô grand Rêve, au matin pâle des édifices, ne qu
2292 ne quitte plus, attiré par les premiers sophismes de l’aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits p
2293 les premiers sophismes de l’aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à l’immobili
2294 bilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique littéraire ! Nous sommes ici en présence d’une des tentative
2295 Nous sommes ici en présence d’une des tentatives de libération les plus violentes et belles — malgré tant de maladresses
2296 belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, de bravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. S
2297 tant de maladresses dédaigneuses, de bravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu
2298 tricheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutis
2299 it connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il
2300 Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impratic
2301 ’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticables quelques portes de sortie » ou compromis :   « N
2302 Il s’agit de rendre impraticables quelques portes de sortie » ou compromis :   « Nous étions dominés par le sens d’une réa
2303 u compromis :   « Nous étions dominés par le sens d’ une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent acheté au
2304 que certains d’entre nous eussent acheté au prix d’ un martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de l’inf
2305 Nos jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté l
2306 aurions-nous accepté le sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Auguste Comte cette tranquillité
2307 i ont puisé dans Auguste Comte cette tranquillité de rejeter définitivement les problèmes métaphysiques ? »   Nous naisson
2308 à quelque chose qui imite la vie dans une époque d’ inconcevables compromissions où triomphe sous tous les déguisements, d
2309 omissions où triomphe sous tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit
2310 pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’ une foi que plus rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur la C
2311 s paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’ expression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rire,
2312 il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’e
2313 pharisiens, et dire qu’elle est née dans un café de Paris. « Je n’attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Rie
2314 . « Je n’attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Riez-en donc, pantins officiels, et vous repus, et vous, dubi
2315 vous repus, et vous, dubitatives barbes. Je viens d’ entendre la voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dog
2316 , dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix d’ un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingén
2317 ix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à l
2318 es bassement ingénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle pu
2319 « Si j’essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun cas servir
2320 je me révolte qu’elle puisse en aucun cas servir d’ argument à un homme. » Voilà qui nous fait oublier certaines morales d
2321 . » Voilà qui nous fait oublier certaines morales d’ extrême moyenne d’où sont exclues toutes grandeurs au profit de fuites
2322 fait oublier certaines morales d’extrême moyenne d’ où sont exclues toutes grandeurs au profit de fuites lâches qu’on veut
2323 enne d’où sont exclues toutes grandeurs au profit de fuites lâches qu’on veut nommer renoncements ! Jouant tout sur une ré
2324 tout sur une révélation possible, ou la naissance d’ un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est pas à genoux
2325 : pour que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes enc
2326 s gestes encore, interceptant les messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa gra
2327 atteindre Dieu ou n’espérer plus aucun pardon. II Novembre 1926. Je viens de retrouver quelques pages écrites il y a
2328 ou n’espérer plus aucun pardon. II Novembre 1926. Je viens de retrouver quelques pages écrites il y a un an, tel soir d
2329 ver quelques pages écrites il y a un an, tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. E
2330 tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Aragon revêtu d’une dignité tragi
2331 selon toute vraisemblance. Et voici Aragon revêtu d’ une dignité tragique qu’il trouverait sans doute un peu ridicule. C’es
2332 tagieuses. Comment, en effet, ne pas voir la part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit des préte
2333 qui fait, en dépit des prétentions désobligeantes de l’auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais
2334 duction ». Pour un peu, je découvrais une manière de prophète un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je le verrais
2335 un Musset triple-sec). Au lieu du cynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pa
2336 orie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore un Musset,
2337 osé dans notre siècle et chez qui tout est devenu de quelques degrés plus violent, plus acerbe, plus profond. En somme, et
2338 . Et qui sait tirer un admirable parti littéraire de son tempérament vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à la grand
2339 on prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme assez fréquent dans les cafés littéraires et dont il
2340 dont il serait le premier à s’amuser ?   Février 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certai
2341 emier à s’amuser ?   Février 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — ma
2342 vrier 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus belle, — ce
2343 me un désespoir en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphys
2344 ais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’une phra
2345 êcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’une phrase de Vinet —
2346 de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’ une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement les auteur
2347 sespoir métaphysique. Je me souviens d’une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels
2348 laissons s’esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé est le con
2349 esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé est le contrecoup du
2350 le savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle part » est sans dérobade possible par sous-entend
2351 entendu. Pas plus « ailleurs » que sur ce « globe d’ attente » comme dit Crevel. Pourtant, le plus irrévocable désespoir n’
2352 est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par scepticisme ; par ex
2353 re qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par scepticisme ; par excès que pa
2354 ma plume, comme une mouche qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’elle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne l
2355 as mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Pari
2356 ise tout cet état d’esprit « bien Parisien » dont de récentes statistiques de librairie montrèrent les ravages bien plus é
2357 t « bien Parisien » dont de récentes statistiques de librairie montrèrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le c
2358 enu qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler d
2359 nie à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ic
2360 e droit à parler des choses de la foi comme étant d’ un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici certain sens critiqu
2361 nt on voudrait que soient justiciables les œuvres d’ un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un
2362 ticiables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas le
2363 s visions. Un critique qui n’épouse pas le rythme d’ une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à frigorifi
2364 me d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises
2365 e à sa rencontre armé de l’appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. Cf. certaines remarques —
2366 s bêtises. Cf. certaines remarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse r
2367 f. certaines remarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous tr
2368 ines remarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous trompe
2369 emarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous tromper sur ce q
2370 gueilleuse raison à nous tromper sur ce qu’il y a de profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré. » (Edmond
2371 loux.) Entre un monsieur en noir : Permettez-moi de me présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critique.
2372 dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque utilité… Moi. — Ah ! oui, oui… c’est cela, utilité,… en effe
2373 es jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’ êtres et de choses à aimer, et vous savez ce que cela suppose. Compren
2374 , beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et de choses à aimer, et vous savez ce que cela suppose. Comprenez-moi : su
2375 ntion… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part. (Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plu
2376 nous sommes débordés, voyez vous-même, pas moyen de causer aujourd’hui… Quoi ?… Bon, bon, c’est entendu, on ne peut rien
2377 Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphysique, vous lirez ça en attendant. Très bien fait. Excellente
2378 ez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… III Il y a des
2379 errière un rideau). — J’attends votre plaisir… III Il y a des gens qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à
2380 t avoir tout dit quand ils ont montré à l’origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des troubles organ
2381 opposent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas
2382 Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin
2383 gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s
2384 comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en écarter. Voilà bien leur désinvolture, car enfin, elle est déess
2385 tisane assagie, parfois dévote, phraseuse, sèche, d’ humeur acariâtre et réactionnaire. Vous tracez des frontières géograph
2386 « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardk à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont o
2387 s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’obscurit
2388 significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature mo
2389 sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’ obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifest
2390 la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’ind
2391 ce divorce radical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réalité. C’est pourquo
2392 ical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’ individus pour qui l’esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous
2393 pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de l’esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le pl
2394 ourrons plus séparer du concept de l’esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a e
2395 nds ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize , la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas
2396 e-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite révolution à
2397 rx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite révolution à nous, dans tel domaine. Et c’est mê
2398 tes : qu’ils aient voulu s’allier aux dogmatiques d’ extrême gauche. Je ne dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli
2399 e dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli de crier merde pour Horace, Montaigne, Descartes, Schiller, Voltaire, et
2400 , pourquoi se faire marchand des œuvres complètes de Karl Marx ? Si vous ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je
2401 as s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10 ans, une révolution en fonction du capitalisme. Est-ce que vraiment v
2402 . Est-ce que vraiment vous ne pouvez vous libérer de cette manie française, la politique, et ne voyez-vous pas que c’est f
2403 ique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier rouge p
2404 ez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple r
2405 ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous
2406 cet esprit « bien français » qui s’associe à tant d’ objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il ins
2407 t « bien français » qui s’associe à tant d’objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Al
2408 objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même est ce qu’il y
2409 tent Aragon, Breton et leurs amis alternativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heur
2410 Breton et leurs amis alternativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heure est venue
2411 urs amis alternativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heure est venue de clore des
2412 ernativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heure est venue de clore des discussions
2413 qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand
2414 de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand principe de violence commandait à nos mœurs. … et
2415 des entrepreneurs de tempêtes. Un grand principe de violence commandait à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à
2416 s. … et nous portant dans nos actions à la limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie. Saint-Joh
2417 ction contre tout ce qui prétendait nous empêcher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du moi avec ses recettes garan
2418 re tout ce qui prétendait nous empêcher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du moi avec ses recettes garanties, chap
2419 ui prétendait nous empêcher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du moi avec ses recettes garanties, chapelets d’opti
2420 lte du moi avec ses recettes garanties, chapelets d’ optimisme, tyranniques évidences, ordre et désordre, principes de Desc
2421 ranniques évidences, ordre et désordre, principes de Descartes, mathématiques aux pinces de crabe, examens de conscience t
2422 principes de Descartes, mathématiques aux pinces de crabe, examens de conscience toujours ratés — on ne m’y prendra plus 
2423 artes, mathématiques aux pinces de crabe, examens de conscience toujours ratés — on ne m’y prendra plus ! — morales améric
2424 eurs abstractions que nous haïssions. Notre haine de certaine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’on mesurait
2425 Notre haine de certaine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’on mesurait odieusement une sympathie humaine pour
2426 ine pour nous sans prix ? Mais nous avions besoin de révolution pour vivre, pour nous perdre. Vivre était devenu synonyme
2427 re, pour nous perdre. Vivre était devenu synonyme de magnifique perdition dans des choses plus grandes que nous. Nous nous
2428 nous connaissions dans les coins et nous mourions d’ ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisai
2429 s d’ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître les petits faits de nos longues jou
2430 ous-mêmes que faisaient paraître les petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comme on aime l’amou
2431 esse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos forces et séductions, comme on cherche cette femme à trave
2432 révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense qu
2433 les brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasard nasille : Nous avons tous fait ça Plus ou moi
2434 vague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux , ces bonnes farces, et aussi pourtant des histoires de copains qui on
2435 es bonnes farces, et aussi pourtant des histoires de copains qui ont mal tourné, on pensait bien, ah ! cette jeunesse, mai
2436 omment dites-vous, surréalisme ? — Baptisé il y a cinq ou six ans et mort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la j
2437 ites-vous, surréalisme ? — Baptisé il y a cinq ou six ans et mort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, p
2438 u six ans et mort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations pa
2439 mace. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la no
2440 ale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se gausser quand nous écriv
2441 finalement nous écraser par l’évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une vérité changeante et to
2442 fait une vérité changeante et toujours évidente, de laquelle il se demande vainement pourquoi il n’arrive pas à se conten
2443 contenter13 ». Acculés à ce choix : inconscience de ruminants ou neurasthénie, est-ce que vraiment vous vous êtes telleme
2444 st plus combattre, c’est l’épanouissement violent d’ une immense fleur palpitante au parfum de passions, c’est une atmosphè
2445 violent d’une immense fleur palpitante au parfum de passions, c’est une atmosphère toute chargée d’éclairs qui nous attei
2446 m de passions, c’est une atmosphère toute chargée d’ éclairs qui nous atteignent sans cesse au cœur et nous revêtent miracu
2447 ns cesse au cœur et nous revêtent miraculeusement d’ aigrettes de folies et de joies ; n’allez pas nous toucher, nous somme
2448 cœur et nous revêtent miraculeusement d’aigrettes de folies et de joies ; n’allez pas nous toucher, nous sommes dangereux.
2449 revêtent miraculeusement d’aigrettes de folies et de joies ; n’allez pas nous toucher, nous sommes dangereux. Un orage de
2450 pas nous toucher, nous sommes dangereux. Un orage de tendresse va crever sur le monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cr
2451 orage de tendresse va crever sur le monde. Aigles d’ amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos langues aériennes.
2452 es aériennes. On n’acceptera plus que des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le grand Libre-Éc
2453 s que des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des
2454 rsuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré certaines théories
2455 us sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré certaines théories bien superfic
2456 illir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré certaines théories bien superficielles et hâtives, comme ce
2457 surtout pour un homme qui élit Freud « président de la République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’abs
2458 République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie d
2459 ie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ces chaînes sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset d
2460 s se libérer que de brasser ces chaînes sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais ou
2461 ces chaînes sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les
2462 s sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres le
2463 coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de For
2464 s plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennent des Fra
2465 in derrière viennent des France et des Bordeaux. 12. Proust excepté, et dans un domaine plus étroit, quelques esthètes du
2466 ne plus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13. Le Paysan de Paris. j. « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de
2467 , quelques esthètes du machinisme. 13. Le Paysan de Paris. j. « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Belles-Lettre
2468 is. j. « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 5, avril 1927,
2469 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  5, avril 1927, p. 131-144. k. On a conservé la graphie de l’original, s
2470 , Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 5, avril 1927, p. 131-144. k. On a conservé la graphie de l’original, sans doute vo
2471 il 1927, p. 131-144. k. On a conservé la graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
52 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
2472 Quatre incidents (avril 1927)l La maîtresse d’École Au printemps pur
2473 Quatre incidents (avril 1927 )l La maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École
2474 e femme dans les rues tant soit peu métaphysiques d’ une capitale de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels
2475 s rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ail
2476 ysiques d’une capitale de mes songes. On exigeait d’ une saison de marque de tels soupirs, d’ailleurs invraisemblables, qu’
2477 capitale de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ailleurs invraisemblables, qu’à leurs refle
2478 de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ailleurs invraisemblables, qu’à leurs reflets se fuss
2479 eurs reflets se fussent évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous les poèmes où détresse rimait avec maîtresse. Écol
2480 e du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’ un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qu
2481 la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils jusqu’au soleil toujours de fa
2482 s qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils jusqu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule
2483 e deux séries de profils jusqu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule des yeux bleus, son éblouissement.
2484 ci, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’ un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvre en passan
2485 . Elle découvre en passant près de lui le sourire d’ amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’es
2486 en passant près de lui le sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’est pas elle. Il p
2487 ce n’est pas elle. Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux d
2488 la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Pu
2489 on de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’ un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui fut très r
2490 uchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué. L
2491 Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui.
2492 Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos. Le jour t
2493 des halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques ro
2494 issait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses, un sourire qui perce le c
2495 esses des flocons, plus perfides que des murmures d’ adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’amitié pensive des jardins.
2496 rt. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’o
2497 s’ouvre ce cœur de l’après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeur merveilleuse des objets et de
2498 t bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est une question d’ amitié. Pourtant je suis seul dès cette heure, et mes amis fuiront un
2499 que je reviens seul. Mais moi, qui regarde comme de l’autre bord, je songe qu’il est des visites à de certaines grandes d
2500 de l’autre bord, je songe qu’il est des visites à de certaines grandes dames où je préférais — et lui aussi — me rendre se
2501 s le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. l. « Quatre incidents », Revue de
2502 n dit de ces phrases. Même, on en pleure. l. «  Quatre incidents », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
2503 , on en pleure. l. « Quatre incidents », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 5, avril 1927,
2504 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  5, avril 1927, p. 151-153. Signé : Salomon de Crac.
2505 , Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 5, avril 1927, p. 151-153. Signé : Salomon de Crac.
53 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
2506 Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927 )j Neuchâtel va-t-elle redevenir le centre artistique qu’elle fut a
2507 le passé ? Allons-nous assister à un regroupement de ses forces créatrices ? La question est peut-être prématurée. Mais le
2508 se pose me paraît indiquer que l’un au moins des deux éléments nécessaires à ce regroupement existe : il y a de jeunes pein
2509 nts nécessaires à ce regroupement existe : il y a de jeunes peintres neuchâtelois. Quant à savoir s’il est possible déjà d
2510 uchâtelois. Quant à savoir s’il est possible déjà de discerner parmi eux certaines tendances générales, nous y reviendrons
2511 que le meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes tempéraments le
2512 ’atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes tempéraments leur fait défaut dans la même mesure. Ai
2513 r fait défaut dans la même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs un peu bourgeoises dont je ne vais p
2514 a même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’ eux des mœurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès,
2515 dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’ amateurs de découvertes, de snobs, de marchands de tableaux, de critiq
2516 des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de découvertes, de snobs, de marchands de tableaux, de critiques d’avant
2517 stiques. Tout ce monde d’amateurs de découvertes, de snobs, de marchands de tableaux, de critiques d’avant-garde, ce monde
2518 out ce monde d’amateurs de découvertes, de snobs, de marchands de tableaux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous l
2519 d’amateurs de découvertes, de snobs, de marchands de tableaux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous les extrémisme
2520 découvertes, de snobs, de marchands de tableaux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous les extrémismes sont prônés
2521 de snobs, de marchands de tableaux, de critiques d’ avant-garde, ce monde où tous les extrémismes sont prônés comme vertus
2522 e à nous revenir munis du passeport indispensable d’ une consécration étrangère. Un jour en effet l’on apprend que tel tabl
2523 re. Un jour en effet l’on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez un gros marchand. Aussitôt, les feuilles loca
2524 hand. Aussitôt, les feuilles locales retentissent de touchants échos : « C’est avec un légitime orgueil que notre petit pa
2525 eillera cette consécration bien méritée du talent d’ un de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans u
2526 ra cette consécration bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Ro
2527 ccorde à dire qu’on n’attendait pas moins du fils d’ un tel père. « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’il en fai
2528 force se développe. N’était certain petit plaisir d’ impertinence, je me fusse dispensé de redire ces lieux communs, auxque
2529 etit plaisir d’impertinence, je me fusse dispensé de redire ces lieux communs, auxquels pourtant nos circonstances confère
2530 D’ailleurs, sachons le reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements du public, et moins d’incomp
2531 achons le reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements du public, et moins d’incompréhension que
2532 de paresse dans les jugements du public, et moins d’ incompréhension que de timidité. ⁂ On ne m’en voudra pas de ne citer n
2533 gements du public, et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On ne m’en voudra pas de ne citer ni dates de naissance,
2534 éhension que de timidité. ⁂ On ne m’en voudra pas de ne citer ni dates de naissance, ni traits d’enfance géniaux et prophé
2535 ité. ⁂ On ne m’en voudra pas de ne citer ni dates de naissance, ni traits d’enfance géniaux et prophétiques, ni opinions d
2536 pas de ne citer ni dates de naissance, ni traits d’ enfance géniaux et prophétiques, ni opinions de critiques autorisés. D
2537 ts d’enfance géniaux et prophétiques, ni opinions de critiques autorisés. Du benjamin, Eugène Bouvier, qui a 25 ans, jusqu
2538 ues autorisés. Du benjamin, Eugène Bouvier, qui a 25 ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si les peintres dont n
2539 i a 25 ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si les peintres dont nous allons parler méritent d’être appelés jeune
2540 si les peintres dont nous allons parler méritent d’ être appelés jeunes, c’est par leurs œuvres avant tout. D’autre part j
2541 graphie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion contre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucu
2542 tre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’ aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un critique d’a
2543 el je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un critique d’art diplô
2544 plômé. Premier péché contre l’histoire : au seuil d’ un article consacré aux jeunes artistes neuchâtelois, je vous présente
2545 ésente Conrad Meili, un Zurichois qui nous arriva de Genève il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors des natures
2546 li, un Zurichois qui nous arriva de Genève il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors des natures mortes, de petits
2547 urichois qui nous arriva de Genève il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors des natures mortes, de petits paysages,
2548 qui nous arriva de Genève il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors des natures mortes, de petits paysages, il des
2549 ou six ans. Il peignait alors des natures mortes, de petits paysages, il dessinait des nus aux crayons de fard. C’était un
2550 petits paysages, il dessinait des nus aux crayons de fard. C’était un peu plus Blanchet que Barraud, plus Picasso que Mati
2551 ans cette petite maison qu’on reconnaissait entre trente pareilles, aux cactus qui ornaient les fenêtres, dans une chambre pei
2552 res, dans une chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants batiks, il s’est livré pendant quelques années à des rech
2553 à des recherches un peu théoriques et abstraites. De cette époque datent des toiles comme le Souvenir de l’Évêché. Décors
2554 cette époque datent des toiles comme le Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière idéale. Tout e
2555 venir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’ une matière idéale. Tout est lisse et parfait. Trop parfait seulement.
2556 parfait seulement. Il manque à ces recompositions de la nature, à ces natures remises à neuf, l’imperfection humaine qui t
2557 ompositions de la nature, à ces natures remises à neuf , l’imperfection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces esp
2558 ection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas un certain mystère.
2559 dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’épuration rigoriste de sa technique sert une visi
2560 veille de constater combien l’épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures su
2561 n rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité
2562 chnique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un petit chef-d
2563 qu’il intitule la cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art très volontaire, qui connaît ses res
2564 un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’ un art très volontaire, qui connaît ses ressources et sait en user ave
2565 t en user avec la sobriété qui produit le maximum d’ expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conférer à tout
2566 affiche ou une mosaïque, c’est elle qui permettra de reconnaître une de ses œuvres. Et aussi ce brin de comique un peu biz
2567 ïque, c’est elle qui permettra de reconnaître une de ses œuvres. Et aussi ce brin de comique un peu bizarre qu’il glisse s
2568 e reconnaître une de ses œuvres. Et aussi ce brin de comique un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend le m
2569 ad Meili apporte chez nous une inspiration neuve, d’ origine germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à la voluptueuse
2570 on neuve, d’origine germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à la voluptueuse rigueur latine, et qui tout en s’épuran
2571 les renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative qui manque trop souvent au Neuchâtelois. S’il cass
2572 pour le plaisir, mais plutôt par amour du courant d’ air. Cela dérange toujours quelques frileux, mais les autres sont soul
2573 e fût-ce qu’en prenant une initiative comme celle de Neuchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuc
2574 n prenant une initiative comme celle de Neuchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actue
2575 nant une initiative comme celle de Neuchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actuell
2576 âtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’ une salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui eût cru que ce
2577 uellement, Meili achève la décoration d’une salle d’ hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui eût cru que ce paysagiste
2578 pressionniste s’astreindrait jamais aux exigences de la technique décorative ! Voilà qui laisse espérer parmi nos artistes
2579 rapprochements moins paradoxaux. Donzé n’est pas de ceux pour qui la peinture consiste à habiller une idée. Voyez son por
2580 consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il taille ce v
2581 a presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui s
2582 l voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate quand du haut
2583 nsualité qui sait se faire délicate quand du haut de San Miniato ou de Fiesole, il peint Florence avec des roses et des ja
2584 se faire délicate quand du haut de San Miniato ou de Fiesole, il peint Florence avec des roses et des jaunes jamais mièvre
2585 x allures discrètes promène sur le monde des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient plus loin qu’on ne c
2586 scrètes promène sur le monde des yeux de Japonais d’ une ironie mélancolique et qui voient plus loin qu’on ne croit, mais i
2587 lus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa premièr
2588 peinture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’ une tristesse qui ne s’affiche pas, mais s’insinue dans toute sa palet
2589 qu’on cherche en vain chez beaucoup des meilleurs de nos artistes. Mais n’allez pas croire à des grâces faciles ou sentime
2590 grâces faciles ou sentimentales. Il y a une sorte d’ aristocratique dissimulation dans l’œuvre de Bouvier. Sa technique qui
2591 sorte d’aristocratique dissimulation dans l’œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses intenti
2592  ; mais il faut pour comprendre cet art emprunter de singuliers chemins d’accès. Ce qui d’abord vous prend et vous retient
2593 omprendre cet art emprunter de singuliers chemins d’ accès. Ce qui d’abord vous prend et vous retient dans un tableau de Bo
2594 ’abord vous prend et vous retient dans un tableau de Bouvier, c’est toujours une sorte de dissonance, un défaut par où l’o
2595 s un tableau de Bouvier, c’est toujours une sorte de dissonance, un défaut par où l’on va peut-être se glisser dans l’atmo
2596 où l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation, et tout dev
2597 e mystique exige pour être compris une complicité de sentiments ou d’état d’âme. Je ne verrais guère que Louis de Meuron,
2598 pour être compris une complicité de sentiments ou d’ état d’âme. Je ne verrais guère que Louis de Meuron, parmi ses aînés,
2599 rapprocher, parce qu’il est un des rares peintres de ce pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de B
2600 i la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épano
2601 t tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur les toiles de M
2602 de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur les toiles de Meuron. Il semble toujo
2603 ins de sourires qui s’épanouissent sur les toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies. Il aime ce
2604 de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies. Il aime ces heures où ciel et onde se mêlent, et sait rendre
2605 t, et sait rendre mieux que personne la liquidité d’ un lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temps couvert, ca
2606 urtant l’impression, à voir ses dernières toiles, d’ une plus grande certitude intérieure. Les visages sont plus calmes, le
2607 paraître… Charles Humbert ou comment on passe en cinq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où l’on put craindre que
2608 Charles Humbert ou comment on passe en cinq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où l’on put craindre que Charles
2609 ut craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’ une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures mortes
2610 t, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’ une bizarre fantaisie, un mélange de Rops et d’Ensor ; pensait-on… Déj
2611 en des scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops et d’Ensor ; pensait-on… Déjà il avait des disciples (Madeleine
2612 es d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops et d’ Ensor ; pensait-on… Déjà il avait des disciples (Madeleine Woog, G. H.
2613 l avait fondée avec J. P. Zimmermann) des dessins d’ un dynamisme impétueux révélant un tempérament très rassurant. C’était
2614 intermédiaire, un peu pénible. Dans des bouquets d’ une opulence assez désordonnée, des rouges trop violents éclataient av
2615 tureuse que les formes, il y a une belle richesse de lueurs sur une matière traitée largement et d’une abondance très sûre
2616 se de lueurs sur une matière traitée largement et d’ une abondance très sûrement ordonnée. Je crois qu’on doit beaucoup att
2617 t ordonnée. Je crois qu’on doit beaucoup attendre de ce tempérament qui fait jaillir en lui sans cesse des possibilités im
2618 es possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de la Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale.
2619 n a plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux
2620 yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’ un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout cela commu
2621 lle lourdeur, tout cela communique une impression de puissance domptée et qui semble se faire une volupté de la discipline
2622 ssance domptée et qui semble se faire une volupté de la discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renai
2623 ampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’ un œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis
2624 e (elle peint aussi, d’un œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Barraud, le p
2625 ssins qui ressemblent beaucoup aux petites huiles de Charles, moins intensément réalistes, plus fins, mais tout aussi habi
2626 implifie et renforce l’expression. Décidément ces trois frères sont une école. Délaissant un moment ce trésor du meilleur réa
2627 is retrouver, allons errer un peu dans le royaume d’ Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurions trouver
2628 rcevoir, peut-être. Il suivait son petit bonhomme de chemin sans se douter qu’il avait pris quelques années d’avance sur s
2629 n sans se douter qu’il avait pris quelques années d’ avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Saluta
2630 s choses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges
2631 la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. Il administre une feuille religieuse. Il déniche à
2632 rie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’ oranges. Il administre une feuille religieuse. Il déniche à Paris des
2633 e, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’ oranges . Il administre une feuille religieuse. Il déniche à Paris des tableau
2634 r… Retournez-en une autre, ce doit être un dessin d’ horlogerie, ou quelque plan d’une machine à mouvement perpétuel. Une a
2635 doit être un dessin d’horlogerie, ou quelque plan d’ une machine à mouvement perpétuel. Une autre encore : cette fois-ci c’
2636 eux où se coupent des plans transparents, cellule de quelque palais de glaces en miniature, sorte de boîte à miracles où s
2637 des plans transparents, cellule de quelque palais de glaces en miniature, sorte de boîte à miracles où sous un éclairage t
2638 e de quelque palais de glaces en miniature, sorte de boîte à miracles où sous un éclairage très net, mais inusité, l’objet
2639 et, mais inusité, l’objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ? Et ces roses sont le signe
2640 se passer là-dedans ? Et ces roses sont le signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous pensiez n’
2641 intitulé « nature morte ». Pourquoi pas naissance d’ un songe ? C’est en effet un rêve de précision qui s’incarne dans ces
2642 pas naissance d’un songe ? C’est en effet un rêve de précision qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour le plaisir
2643 rne dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songe
2644 a perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songeries ! Ces horlogeries impossibles sont des pièges à c
2645 rte. Attention qu’André Evard n’aille trouver une de ces machines à explorer l’au-delà. En vérité il faut être sorcier ou
2646 r en instruments métaphysiques ces bonnes montres de précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappel
2647 nts métaphysiques ces bonnes montres de précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souven
2648 nt de quitter les peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner toute sa mes
2649 toute sa mesure. Il a laissé surtout des dessins, d’ une sûreté un peu traditionnelle, d’un style pourtant assez large et q
2650 des dessins, d’une sûreté un peu traditionnelle, d’ un style pourtant assez large et que n’entravait pas son scrupule réal
2651 scrupule réaliste. ⁂ Mais voici dans son costume d’ aviateur, retour de Vienne, un sculpteur qui saura s’imposer. Léon Per
2652 ⁂ Mais voici dans son costume d’aviateur, retour de Vienne, un sculpteur qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout
2653 uelque lourdeur dans des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’at
2654 rceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignai
2655 it le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre.
2656 semble avoir évolué vers une plus grande harmonie de lignes. Je pense surtout à ses bas-reliefs du BIT où se manifeste un
2657 par les sujets et un style qui sait rester ample, d’ une simplicité non dépourvue de puissance. Une fois de plus l’on peut
2658 sait rester ample, d’une simplicité non dépourvue de puissance. Une fois de plus l’on peut admirer la salutaire leçon de s
2659 fois de plus l’on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son
2660 par le cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique. C’est dans la manière cubiste encore que Perr
2661 errin décora naguère fort plaisamment une pendule de Ditisheim ; que Vincent Vincent, peintre, romancier et critique d’art
2662 ique d’art, compose des coussins, des couvertures de livres, des étoffes, d’une somptueuse fantaisie ; et qu’Alice Perreno
2663 coussins, des couvertures de livres, des étoffes, d’ une somptueuse fantaisie ; et qu’Alice Perrenoud combine de petits tab
2664 ptueuse fantaisie ; et qu’Alice Perrenoud combine de petits tableaux en papiers découpés, avec une ingéniosité délicieusem
2665 tes pas complète. Mais elle a du moins l’avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances peut-être plu
2666 le fait des circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités, se trouvent former un mouvement actif déjà, et
2667 former un mouvement actif déjà, et dont Neuchâtel 1927 sera la première manifestation collective. Est-il possible, au sein
2668 ctive. Est-il possible, au sein de ce mouvement, d’ en distinguer d’autres plus organiques ? D’une part il y a des préoccu
2669 s qui pourraient aboutir peut-être à la formation d’ un groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des
2670 et et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche
2671 , Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la
2672 toutes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui
2673 t de même une orientation générale vers une sorte de classicisme moderne dont les frères Barraud ne seraient pas très éloi
2674 n avenir peut-être proche dira dans quelle mesure de tels groupements correspondent à une réalité artistique. Pour aujourd
2675 vions fait qu’affirmer l’existence et la vitalité d’ une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop souvent plu
2676 est trop souvent plu à dire si âpre, prosaïque et d’ une maigre végétation artistique. Pays où l’on préfère la netteté util
2677 les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publication dont cette revue entretenait récemment ses lecteurs. 8.
2678 cette revue entretenait récemment ses lecteurs. 8. Voir sur cet artiste neuchâtelois, de son vrai nom Ch. E. Jeanneret,
2679 lecteurs. 8. Voir sur cet artiste neuchâtelois, de son vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans le numéro de févr
2680 Ch. E. Jeanneret, un article paru dans le numéro de février de cette revue. j. « Jeunes artistes neuchâtelois », Das Wer
2681 nneret, un article paru dans le numéro de février de cette revue. j. « Jeunes artistes neuchâtelois », Das Werk, Zurich,
2682 s artistes neuchâtelois », Das Werk, Zurich, vol. 14, avril 1927, p. 123-129.
2683 neuchâtelois », Das Werk, Zurich, vol. 14, avril 1927, p. 123-129.
54 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
2684 Bernard Lecache, Jacob (mai 1927 )ah Voici un livre dur et sans grâces, qui ne manque pas d’une beau
2685 ci un livre dur et sans grâces, qui ne manque pas d’ une beauté assez brutale, pour nous choquer et s’imposer pourtant. M.
2686 un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ ambition que pour ses enfants. Jacob, l’aîné se révolte. Sensualité, i
2687 ité : les caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’argent qu’on domine notre âge : il devient gra
2688 ssure sa fortune au prix du peu cynique reniement de ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On v
2689 niement de ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Ma
2690 es origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a r
2691 père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non
2692 eu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulga
2693 on de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, viol
2694 s luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont le
2695 , on connaît mon orgueil : osez donc me condamner d’ être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin
2696 être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de
2697 que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. « Bernard Lecache : Jacob (NRF, Paris) », Biblio
2698 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 689-690.
2699 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 689-690.
55 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
2700 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927 )ai Le jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’
2701 Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétude actue
2702 e tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’a
2703 é qu’on y apporte, l’on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment 
2704 inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’exigence d’ une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute joie comme il
2705 sincérité ne serait-elle à son tour que le masque d’ un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on voit commen
2706 le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son
2707 écrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur
2708 nd l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche
2709 féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force
2710 lle les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’ Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de
2711 ’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur le
2712 vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur le détail dégoûtant e
2713 elle s’acharne sur le détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’auteur n’est pas en
2714 n voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mai
2715 ore détaché de la matière pour en tirer une œuvre d’ art. La sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa
2716 mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur de document humain, nuit à sa valeur littéraire. Je n’aime guère ce styl
2717 ttéraire. Je n’aime guère ce style abstrait, semé de redites et d’expressions toutes faites qui trahissent une écriture hâ
2718 ’aime guère ce style abstrait, semé de redites et d’ expressions toutes faites qui trahissent une écriture hâtive. Mais il
2719 ent une écriture hâtive. Mais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui forcent la
2720 . Mais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. « Ren
2721 Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 690.
2722 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 690.
56 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
2723 Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme cer
2724 Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927 )aj Nocturnes aux caresses coupantes comme certaines herbes. Capita
2725 resses coupantes comme certaines herbes. Capitale de la douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette vill
2726 rtaines herbes. Capitale de la douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus séd
2727 t gracieux des noctambules. Rêves éveillés, entre deux gorgées d’un élixir dont il voudrait bien nous faire croire que le di
2728 s noctambules. Rêves éveillés, entre deux gorgées d’ un élixir dont il voudrait bien nous faire croire que le diable est l’
2729 faire croire que le diable est l’auteur. Beaucoup d’ oiseaux volètent, se balancent au bord des verres, se posent sur les c
2730 cent au bord des verres, se posent sur les cordes d’ une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’air, becquèt
2731 l’accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’ une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèc
2732 mme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Quelque chose, tout de même, de laqué, d
2733 lèches empoisonnées. Quelque chose, tout de même, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici
2734 oisonnées. Quelque chose, tout de même, de laqué, d’ élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tac
2735 Quelque chose, tout de même, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache de coule
2736 çais » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai la beauté facile et c’est
2737 sque pas sa blessure. Mais c’est ici qu’il s’agit de ne pas confondre inexplicable avec incompréhensible. aj. « Paul Élu
2738 incompréhensible. aj. « Paul Éluard : Capitale de la douleur (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
2739 ouleur (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’édition o
2740 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’édition originale.
57 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
2741 e Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927 )al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafistoler ? » Entre ce
2742 chelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al «  De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafistoler ? » Entre ces deux tent
2743 s les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafistoler ? » Entre ces deux tentations, cédant à l’u
2744 i 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafistoler ? » Entre ces deux tentations, cédant à l’une autant qu’à
2745 t-il ? de détruire ou de rafistoler ? » Entre ces deux tentations, cédant à l’une autant qu’à l’autre, Drieu s’examine. Enco
2746 un ? Non, enfin un. Tous les autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée d’apologie, ou même sim
2747 de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée d’ apologie, ou même simplement un besoin d’être aimés qui faussaient leu
2748 e-pensée d’apologie, ou même simplement un besoin d’ être aimés qui faussaient leurs voix pour les rendre plus touchantes.
2749 une saine rudesse. « Il s’examine jusqu’au ventre de sa mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonn
2750 te » qui révèle encore dans le fond quelque chose de solide, d’authentique. J’aime cette violence de redressement où je di
2751 vèle encore dans le fond quelque chose de solide, d’ authentique. J’aime cette violence de redressement où je distingue bie
2752 e de solide, d’authentique. J’aime cette violence de redressement où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’i
2753 où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceau
2754 hique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de rencontrer chez les jeunes écrivains français un homme qui ait à ce p
2755 ains français un homme qui ait à ce point le sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Oc
2756 de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs d
2757 ision si claire et si tragique de la civilisation d’ Occident. Les questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par
2758 nce par quelques jeunes gens. Il faut louer Drieu d’ avoir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la
2759 u surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour
2760 ue le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’ avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu’au boutisine
2761 ion, — et je sais bien que c’est là un des signes de sa décadence. Il y a du chirurgien chez ce soldat devenu « scribe » e
2762 utal : mais faisons-lui confiance, voici un homme d’ aujourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser le bluff. al. «
2763 Sans Pareil) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 694.
2764 hèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 694.
58 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
2765 Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927 )m … et je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’a appris à
2766 st l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et le corps se fige
2767 ù l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et le corps se fige à mesure
2768 rit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet âge, logé,
2769 , Monsieur, normalement bon. L’idée, par exemple, d’ étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner
2770 n chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le méprisais trop
2771 Mes parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leu
2772 . Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de moi. Un soir qu’e
2773 e détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je
2774 te femme, qui m’aimait, et nous étions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon
2775 m’aimait, et nous étions très jolis de bonheur et d’ insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait t
2776 jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de
2777 soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses lèvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le
2778 lui, sans doute, j’étais perdu. Mais il souffrait d’ autre chose encore : il se savait vieux, maintenant. » Je songeais jus
2779 maintenant. » Je songeais justement à un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertig
2780 it mon sourire et pleura. Alors une rage s’empara de mon corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus
2781 e plus tard, j’étais à la gare, j’écrivais un mot d’ adieu à ma maîtresse d’une nuit et je partais dans une direction quelc
2782 la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’ une nuit et je partais dans une direction quelconque. Il advint que ce
2783 direction quelconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la m
2784 l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’ articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux
2785 divers journaux. Un jour, parcourant un quotidien de mon pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosse
2786 m en grosses lettres : c’était l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une b
2787 n père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’ un café ; une brise passa, et une femme en robe bleue légère qui me re
2788 augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un établissement luxueux d’où sortaient à c
2789 hantonner. J’entrai dans un établissement luxueux d’ où sortaient à chaque tour du tambour des bouffées de musique. » La fe
2790 ù sortaient à chaque tour du tambour des bouffées de musique. » La femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après de
2791 me en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où l’on ne vo
2792 x tangos, nous montions ensemble dans une chambre d’ hôtel où l’on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumiè
2793 uet transfiguré par la lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’ouvris firent tourner des solei
2794 une avenue et ses autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore
2795 ses autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants
2796 s aimâmes en sifflotant encore par instants l’air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à cause d
2797 e la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à cause du soir trop limpide et trop vaste, comme un avenir
2798 soir trop limpide et trop vaste, comme un avenir de bonheur fiévreux — celui justement que j’entrevoyais. » Quand elle se
2799 fut endormie, je me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’était assez pour me permettre d’entrep
2800 son sac à main : c’était assez pour me permettre d’ entreprendre quelques beaux vols… » Dès lors, je vécus, comme vous me
2801 s, comme vous me voyez vivre encore, dans un état de sincérité perpétuelle envers tous mes élans, accueillant avec un enth
2802 moral et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de
2803 e de l’Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit, au moment de
2804 — région où l’on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit, au moment de m’endormir, que ma pas
2805 ue vengeance. Ne m’avait-on pas dérobé des années de joie au profit d’une vertu que tout en moi reniait obscurément. Je se
2806 ’avait-on pas dérobé des années de joie au profit d’ une vertu que tout en moi reniait obscurément. Je sentais bien que le
2807 bscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportuni
2808 unisme social, résultante des paresses accumulées de tous les cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vie
2809 umulées de tous les cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles filles, sans capitalistes et sans ge
2810 endarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette escroque
2811 escroquerie morale dont je fus la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il est trop tard, Monsi
2812 us la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les moda
2813 trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être en
2814 omique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ ironie, de mon mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fond
2815 ’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fondements mêm
2816 ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que
2817 mes de la société. » C’est avec le produit du vol d’ un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un tombeau sur lequel
2818 ociété. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un tombeau sur lequel je fis gra
2819 uel je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais g
2820 t un temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… B
2821 e vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quel
2822 s grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois,
2823 , poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’ hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je m’a
2824 t-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à joue
2825 jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’ adresse, de découvrir certaines personnalités sous un jour assez parti
2826 ckpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir certaines personnalités sous un jour assez particulier, trè
2827 us un jour assez particulier, très souvent ignoré d’ elles-mêmes auparavant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien… L
2828 pas toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus gén
2829 et des plus généralement répandus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élémentaires qui ne
2830 ues réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que l’analyse
2831 psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques observations théoriques que je tiens pour vraies, et j’en vé
2832 les manifestations vivantes avec une prodigalité d’ épreuves, contre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois le véri
2833 es et enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’événement
2834 e. C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaq
2835 naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque minute auquel succède immédiatement le sommeil. Je rêve beauco
2836 j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que l’on
2837 ron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernière plaisanterie. Il but avec beaucoup de délicatesse quel
2838 but avec beaucoup de délicatesse quelques gorgées d’ eau minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’obligeait à éme
2839 ur cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il,
2840 lâchant tout de suite ses compliments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est l’extraordinaire netteté de votre vie. El
2841 vaise politique, — c’est l’extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans réticences ; elle m’apparaît c
2842 paraît comme un divertissement perpétuel et dénué d’ inquiétude. Et cela n’est pas sans me charmer, croyez-moi. Car, enfin,
2843 couter, c’est que je cherche ce qu’on est convenu d’ appeler — pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Ma
2844 ’on est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me
2845 pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre co
2846 vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle paraît impliq
2847 s, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’es
2848 ales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de , comment dirai-je…, de juvénile insouciance, pour ne pas dire inconsc
2849 liquer, c’est ce caractère de, comment dirai-je…, de juvénile insouciance, pour ne pas dire inconscience ! qui s’attache à
2850 ts et gestes. L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en
2851 L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux
2852 ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’ étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus
2853 ’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous entends, interrompit S
2854 ts qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous entends, interrompit Saint-Jul
2855 t la sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’ une timidité naturelle dont il paraissait lui-même gêné. En deux mots,
2856 té naturelle dont il paraissait lui-même gêné. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne sa
2857 t raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’ avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que mes principes peuvent
2858 bien que vous ce que mes principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’agréablement paradoxal.
2859 ue mes principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’agréablement paradoxal. Seulement, pour qui
2860 oir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’ agréablement paradoxal. Seulement, pour quiconque est aussi profondéme
2861 quiconque est aussi profondément persuadé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste
2862 ondément persuadé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre «
2863 onvenu dans le genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-être apprendrez-vous à découvrir derri
2864 re apprendrez-vous à découvrir derrière certaines de mes plaisanteries la dérision secrète qu’elles masquent par caprice.
2865 ⁂ m. « Récit du pickpocket (fragment) », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 6, mai 1927, p
2866 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  6, mai 1927, p. 180-185. Une note de bas de page indique : « La rédactio
2867 es, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 6, mai 1927, p. 180-185. Une note de bas de page indique : « La rédaction rappelle
2868 ve-Fribourg, n° 6, mai 1927, p. 180-185. Une note de bas de page indique : « La rédaction rappelle que les idées émises da
2869 ction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’engagent pas
59 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
2870 Conseils à la jeunesse (mai 1927 )n « On a reproché bien des choses aux romantiques : le goût du sui
2871 aux romantiques : le goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris d
2872 ques : le goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité
2873 excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibili
2874 e, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous
2875 éalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes :
2876 ens, et l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci es
2877 is enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Ber
2878 t à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’ un livre récent sur Aloysius Bertrand. Est-ce vraiment aux romantiques
2879 loysius Bertrand. Est-ce vraiment aux romantiques de 1830 que ces reproches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez le d
2880 sius Bertrand. Est-ce vraiment aux romantiques de 1830 que ces reproches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez le dire —
2881 M. Y. Z., qui, dans un petit article du Journal de Genève sur « La maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de
2882 terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantatio
2883 ne homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siè
2884 homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle
2885 de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps se
2886 e 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de
2887 ècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. A
2888 bilité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une poule au riz ar
2889 tu mangeras avec appétit une poule au riz arrosée d’ un savoureux “demi” de Lavaux. » Seulement, il y a tout de même un ou
2890 it une poule au riz arrosée d’un savoureux “demi” de Lavaux. » Seulement, il y a tout de même un ou deux petits phénomènes
2891 de Lavaux. » Seulement, il y a tout de même un ou deux petits phénomènes sociaux de notre temps que cette méthode ne suffira
2892 tout de même un ou deux petits phénomènes sociaux de notre temps que cette méthode ne suffirait pas à supprimer. Or, ils n
2893 lement chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-
2894 ui pensent » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mo
2895 e de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, que dire… Il y aurait, par exemple, ce f
2896 re… Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la gue
2897 mple, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce
2898  ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison
2899 it de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Princip
2900 s n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce conseil que vous avouez modestement n’être pas inédit. Mais point
2901 tement n’être pas inédit. Mais point n’est besoin de rappeler Candide : nous pensons que bien avant Voltaire il y avait de
2902 rtificiel. n. « Conseils à la jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 6, mai 1927, p
2903 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  6, mai 1927, p. 186-187.
2904 es, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 6, mai 1927, p. 186-187.
60 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
2905 ard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927 )am Quand vous avez fermé ce petit livre, vous partez en chantonnan
2906 sympathique Paterne. Sous le fallacieux prétexte d’ une flânerie de saison, vous vous attardez aux terrasses des cafés. Pe
2907 terne. Sous le fallacieux prétexte d’une flânerie de saison, vous vous attardez aux terrasses des cafés. Peut-être va-t-el
2908 voici Pierre Girard : lui seul connaît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous venger, vo
2909 aphiques vous fatigue ; que c’est une vraie manie de nommer à tout propos d’Annunzio, Pola Negri, Charly Clerc, Mrs. Balfo
2910 que c’est une vraie manie de nommer à tout propos d’ Annunzio, Pola Negri, Charly Clerc, Mrs. Balfour. Vous parlez de « pro
2911 la Negri, Charly Clerc, Mrs. Balfour. Vous parlez de « procédés lassants ». Pierre Girard n’écoute plus : il pense à des V
2912 e globe dans son voyage « est arrivé à un endroit de l’éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard e
2913 nnaissez que Pierre Girard est un peu responsable de cette douceur de vivre. Déjà vous ne niez plus sa drôlerie, son aisan
2914 re Girard est un peu responsable de cette douceur de vivre. Déjà vous ne niez plus sa drôlerie, son aisance. Vous accordez
2915 ance. Vous accordez que s’il force un peu la dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherche. Vous
2916 peu la dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherche. Vous voilà même tenté de l’en féliciter.
2917 facilité que par recherche. Vous voilà même tenté de l’en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une mali
2918 proche M. Piquedon de Buibuis, qui parle toujours de Weber… Mais au fait, si vous n’aviez pas lu ce livre ? Ah ! sans hési
2919 vre ? Ah ! sans hésiter, je vous ferais un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’on n’est pas impunément concito
2920 … Car hélas, l’on n’est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer le matin,
2921 et oncle Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible
2922 i interdit à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer d
2923 ortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela
2924 es désertes glisse un grand souffle oblique plein de fraîcheur et de pardon. » am. « Pierre Girard : Connaissez mieux le
2925 se un grand souffle oblique plein de fraîcheur et de pardon. » am. « Pierre Girard : Connaissez mieux le cœur des femmes
2926 Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juillet 1927, p. 114-115.
2927 e universelle et Revue de Genève, Genève, juillet 1927, p. 114-115.
61 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
2928 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)o I Parler littérature Si je pro
2929 Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927 )o I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos co
2930 le mépris de la littérature (juillet 1927)o I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères,
2931 I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge
2932 arler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et s
2933 lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fîmes notre n
2934 uteur dont nous fîmes notre nourriture une saison de naguère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous
2935 nourriture une saison de naguère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte : c’est tr
2936 uère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte : c’est trop écrit. Vous dites de ce r
2937 de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte : c’est trop écrit. Vous dites de ce roman : c’est trop agré
2938 dites de ce conte : c’est trop écrit. Vous dites de ce roman : c’est trop agréable. Vous dites d’un goût qu’on aurait pou
2939 tes de ce roman : c’est trop agréable. Vous dites d’ un goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alo
2940 d’un goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous
2941 in que leurs sincérités gardent au moins l’excuse d’ une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar où je vous
2942 voici un bar où je vous suis. Vous y entrez plein de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes le charme de ces lieux. V
2943 is pour Paul Morand par qui découvrîtes le charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore, avec une
2944 d Écart… », dit quelqu’un. À ce coup, l’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne : hommage à L
2945 ion de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citation de Va
2946 mmage à Louis Aragon. Ce cristal est une citation de Valéry, cette œillade se souvient d’un vers d’Éluard14. Et des phrase
2947 une citation de Valéry, cette œillade se souvient d’ un vers d’Éluard14. Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l
2948 on de Valéry, cette œillade se souvient d’un vers d’ Éluard14. Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l’ivresse n
2949 14. Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l’ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votr
2950 ie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle. Au petit matin, il se noie dans un verre à liqueur. Pois
2951 rop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et le plaisir d’ être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en croire sa pude
2952 qui n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de l’impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus
2953 les et plus aiguës ? On vaincra jusqu’à sa gueule de bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre
2954 en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce les g
2955 », « hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de la littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laud
2956 ment gratuit ». C’est de la littérature. À force d’ avoir mérité ces épithètes, pour nous laudatives, vous vous étonnez au
2957 ur nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de la simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que
2958 implicité est simple simplement. La bouche brûlée d’ alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’eau est incolore, i
2959 votre mépris pour le pittoresque, vous témoignez d’ un goût du bizarre qui révèle le littérateur. Nous ne pouvons pas fair
2960 pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature qui est en nous (dangere
2961 en lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Ma
2962 s ce refus n’est pas seulement comme vous pensez, d’ une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois
2963 pensez, d’une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez
2964 ahi par des démons que vous prétendez m’interdire de nommer. Mais moi je partage avec certains Orientaux cette croyance :
2965 ez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me sur
2966 du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : tout cela jaillit, s’entrechoque, s’annule. Poussière. Ma vi
2967 lleurs. L’addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vr
2968 addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce
2969 vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt
2970 s de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur
2971 à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, auj
2972 le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il n
2973 arle littérature. Mais il y a des mépris qui sont de sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et les curés
2974 a des mépris qui sont de sournoises déclarations d’ amour. Tel qui raille l’Église et les curés, c’est qu’il se fait une t
2975 es curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisa
2976 e fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne l
2977 s pour ses réalisations actuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois
2978 actuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’ elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette atte
2979 de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exagérés. Vo
2980 e. Que la littérature nous est un moyen seulement d’ atteindre et de préparer d’autres choses, d’autres actions, ou des éta
2981 rature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’autres choses, d’autres actions, ou des états intérieurs q
2982 oses dures, amères comme un destin, comme le goût d’ une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des soupless
2983 que tout se fond catastrophiquement dans l’infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. Toutes ces
2984 ue nulle poésie même ne peut dire, parce que rien de ce qui nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis le temps qu’
2985 la poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne l’écr
2986 ble : cela consisterait dans l’expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il d
2987 ellement incommunicable qu’il deviendrait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si
2988 s obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques
2989 e, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’ une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir de signif
2990 à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’ une autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui n
2991 que ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous le
2992 avez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même
2993 chez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même la problématique utili
2994 oilà qu’ils perdent même la problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avouons-le : rien de ce qu’on
2995 qui était leur excuse dernière. Avouons-le : rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, cessons de
2996 . Avouons-le : rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’ importance véritable. Alors, cessons de nous battre contre des moulins
2997 primer n’a d’importance véritable. Alors, cessons de nous battre contre des moulins à vent. La littérature, considérée du
2998 vent. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal
2999 ure, considérée du point de vue de la psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfa
3000 u anormal, que l’on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équilibre — et dont on tire parfois quelq
3001 t on tire parfois quelque plaisir, plus rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est l’aveu d’une faiblesse secrète.
3002 t, de quoi se payer un petit voyage. C’est l’aveu d’ une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On cherche un
3003 eu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On cherche un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont la
3004 qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se con
3005 ude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue pre
3006 êt bien vif. Et cela fournit un merveilleux sujet de conversation, au café. Dans un salon, par contre, c’est d’un ridicule
3007 sation, au café. Dans un salon, par contre, c’est d’ un ridicule écrasant : mais rien n’est plus facile que d’y échapper.
3008 dicule écrasant : mais rien n’est plus facile que d’ y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me p
3009 mais rien n’est plus facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moin
3010 lus facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré »
3011 araît être le moins « littératuré » des écrivains d’ aujourd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre
3012 . Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre
3013 rs l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer s
3014 de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer sous sile
3015 ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise des chers c
3016 convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréa
3017 miliarités avec une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’ aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séduct
3018 se qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait bien, d’
3019 n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait bien, d’ailleurs,
3020 order sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle les entretient
3021 t bien, d’ailleurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas
3022 illeurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore aval
3023 de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai p
3024 ble ; mais, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité li
3025 plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour che
3026 es pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines
3027 les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne veulent y voir que révoltes contre leu
3028 s instables certitudes, et qui nous font un péché de notre acceptation des réalités spirituelles parce qu’elles troublent
3029 e reconnaître. Quand bien même elle n’aurait plus d’ autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’exister : qu’el
3030 re excuse que celle-là, la littérature mériterait d’ exister : qu’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de no
3031 erait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes, le seul langage peu
3032 le soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes, le seul langage peut-être qui nous permett
3033 udes, le seul langage peut-être qui nous permette d’ échanger les signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps,
3034 eut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuse
3035   Voici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de
3036 que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi-même ; que la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par le mon
3037 ir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une « maladie » dont je parviens à
3038 tres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’ adoration. J’ai défini une « maladie » dont je parviens à tirer quelqu
3039 ue les bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m’en guérir. Vous me demanderez « alors » ce qu
3040 ir. Vous me demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philip
3041 ors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philippe Soupault, que « ceci, c’
3042 ) Mais non, cher ami, voici qu’une envie me prend de vous conter un peu cette histoire. Seulement, allons ailleurs ; il y
3043 istoire. Seulement, allons ailleurs ; il y a trop de monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, t
3044 t, allons ailleurs ; il y a trop de monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, titres également sc
3045 y a trop de monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’ Ouvert et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écar
3046 monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de
3047 itres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement de nuit très en vogue
3048 de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement de nuit très en vogue à Paris. Cambronne (général), 1770-1842. Louis Ara
3049 nuit très en vogue à Paris. Cambronne (général), 1770-1842. Louis Aragon et Paul Éluard, hommes de lettres et poètes surréalistes
3050 ), 1770-1842. Louis Aragon et Paul Éluard, hommes de lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’Académie française.
3051 s de lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE]
3052  ! [NdE] Le texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sach
3053 après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’ une erreur ou d’une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissance
3054 e », sans qu’on sache s’il s’agit d’une erreur ou d’ une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16.
3055 n sache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois cer
3056 ’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certains qui arran
3057 lonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’ action. 16. J’en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte
3058 auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte que leurs mé
3059 n. 16. J’en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte que leurs mémoires seront des romans « bien modernes ». L
3060  bien modernes ». Leurs amours sont des pastiches de Morand, et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire »
3061 re ». o. « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
3062 Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 8, juillet 192
3063 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  8, juillet 1927, p. 231-238.
3064 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 8, juillet 1927, p. 231-238.
62 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
3065 Les derniers jours (juillet 1927 )p Ces « cahiers politiques et littéraires »17, rédigés par Drieu l
3066 927)p Ces « cahiers politiques et littéraires » 17, rédigés par Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec la Revue
3067 Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’on dise la
3068 vec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et pour elle-même.
3069 rité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir citer, faute de place, que ces quelques phrases de Drieu
3070 r citer, faute de place, que ces quelques phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sym
3071 voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Action française la fratern
3072 ouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestatio
3073 fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capita
3074 épit des protestations de haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscien
3075 les athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là
3076 mmunisme. Tous ceux-là travaillent à l’achèvement d’ un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère et dénuée de t
3077 moderne, merveilleuse mécanique sévère et dénuée de tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révol
3078 lleuse mécanique sévère et dénuée de tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le
3079 Vous réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’a
3080 ez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’au
3081 Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’ autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. p. « Les derniers jour
3082 ui nous échappèrent n’avaient pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. p. « Les derniers jours », Revue de Bel
3083 ous échappèrent n’avaient pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. p. « Les derniers jours », Revue de Belles-
3084 t pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e . p. « Les derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâ
3085 rin, Paris 16e. p. « Les derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 8, juillet 192
3086 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  8, juillet 1927, p. 249-250.
3087 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 8, juillet 1927, p. 249-250.
63 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
3088 Adieu au lecteur (juillet 1927 )q Nous passons la main au central de Genève, fidèles à la traditio
3089 juillet 1927)q Nous passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons
3090 gnation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est toute « statutaire »
3091 taire » — si l’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu.   On
3092 dérer la situation sans fièvre, sans lamentations d’ adieu.   On nous a parfois traités de fous (avec ou sans sourire). Nou
3093 lamentations d’adieu.   On nous a parfois traités de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’âge de nous en réjouir.
3094 fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si différent
3095 ’âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur
3096 st beaucoup étonné de nous voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous
3097 rents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches contradictoires. Nou
3098 es additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudian
3099 x mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’ une revue d’étudiants comme la nôtre. D’un côté, en effet, on s’accord
3100 a paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’ étudiants comme la nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouv
3101 lectuelle d’une revue d’étudiants comme la nôtre. D’ un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridicule un je
3102 i recherche activement la Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandalise des « énormités » qui p
3103 nt la Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandalise des « énormités » qui peuvent échapper à un
3104 s vous souciez vraiment trop peu des conséquences de ce que vous écrivez ! ») En définitive, il semble que certains n’att
3105 En définitive, il semble que certains n’attendent de nous que d’innocentes farces — ou bien de ces affirmations dont en vé
3106 e, il semble que certains n’attendent de nous que d’ innocentes farces — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’on n’
3107 tendent de nous que d’innocentes farces — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévo
3108 tions dont en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connu
3109 ces, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’ avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons
3110 s mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’ avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’avoir
3111 ’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’avoir troublé quelques bonnes petit
3112 ette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’ avoir troublé quelques bonnes petites somnolences par des cris intempe
3113 ir et pour en accepter les conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un signe d’amitié qui ne tromp
3114 e temps à autre, voici que nous parvient un signe d’ amitié qui ne trompe pas. Deux ou trois mots, on s’est compris. Que po
3115 ous parvient un signe d’amitié qui ne trompe pas. Deux ou trois mots, on s’est compris. Que pouvions-nous espérer d’autre ?
3116 ient un signe d’amitié qui ne trompe pas. Deux ou trois mots, on s’est compris. Que pouvions-nous espérer d’autre ? Il y eut
3117 mots, on s’est compris. Que pouvions-nous espérer d’ autre ? Il y eut quelques découvertes qui nous consolèrent de tout le
3118 l y eut quelques découvertes qui nous consolèrent de tout le reste.   Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaqu
3119 écombres où s’anéantirent l’honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec une ardeur
3120 re Revue-phénix s’élance avec une ardeur rajeunie d’ un an dans une direction absolument imprévisible. Que nous apportera l
3121 ument imprévisible. Que nous apportera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’an
3122 s plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas aj
3123 fais confiance au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde cha
3124 au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de
3125 ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! comme nous y
3126 nous y tenons ! q. « Adieu au lecteur », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 8, juillet 192
3127 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  8, juillet 1927, p. 256-258.
3128 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 8, juillet 1927, p. 256-258.
64 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
3129 Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927 )an Ces trois nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la fo
3130 s Vaudoyer, Premières amours (août 1927)an Ces trois nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de
3131 (août 1927)an Ces trois nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, de
3132 uère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures, — et dans l’abandon
3133 , des évocations intérieures, — et dans l’abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d’une avent
3134 andres, peu à peu, se précisent les circonstances d’ une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une femme « encore jeun
3135 t demain : Une femme « encore jeune » se souvient d’ un danseur de ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être… Un homme
3136 e femme « encore jeune » se souvient d’un danseur de ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être… Un homme médite à côté
3137 « encore jeune » se souvient d’un danseur de ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être… Un homme médite à côté du cor
3138 e jeune » se souvient d’un danseur de ses 20 ans, d’ une aventure qui aurait pu être… Un homme médite à côté du corps de so
3139 i aurait pu être… Un homme médite à côté du corps de son ami suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (L’Amie du M
3140 n ami suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand
3141 ous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’ un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir viennent
3142 (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir viennent troubler
3143 premières inquiétudes du désir viennent troubler de ravissantes amours d’adolescents. Et c’est Un vieil été. Cette nouvel
3144 du désir viennent troubler de ravissantes amours d’ adolescents. Et c’est Un vieil été. Cette nouvelle, très supérieure au
3145 Un vieil été. Cette nouvelle, très supérieure aux deux autres, est une réussite rare par la justesse de l’observation autant
3146 eux autres, est une réussite rare par la justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros.
3147 esse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le
3148 i permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qui serait presque de la nonch
3149 le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’ adresse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance.
3150 esse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite
3151 dresse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tend
3152 lescences avec une tendre minutie, avec une sorte d’ amoureuse application du souvenir, d’une séduction certaine. C’est un
3153 ec une sorte d’amoureuse application du souvenir, d’ une séduction certaine. C’est un art de détails ; mais si délicat et d
3154 souvenir, d’une séduction certaine. C’est un art de détails ; mais si délicat et d’une si subtile convenance avec son obj
3155 ine. C’est un art de détails ; mais si délicat et d’ une si subtile convenance avec son objet qu’il en saisit sans mièvreri
3156  ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quo
3157 a nostalgie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’auteur
3158 réalité ressuscitée… » Sachons gré à M. Vaudoyer d’ avoir su donner à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui le «
3159 Plon, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1927, p. 244-245.
3160 èque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1927, p. 244-245.
65 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
3161 Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927 )ao À ceux qui se contentent du mot fumeux pour caractériser tout l
3162 anique, il faudra opposer l’excellent petit livre d’ Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers articles et essais, dont cer
3163 ent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers articles et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont
3164 rs articles et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait parler mieux q
3165 — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait parler mieux que personne des poètes scandinaves e
3166 loux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un portrait qu’on dirait, en peinture, très « interprété ». Non p
3167 . Non pas une photographie morale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être p
3168 e photographie morale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie qu
3169 morale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je
3170 enne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît comme une de ces âmes mystiques et raffinées telles qu’on en découvre chez certain
3171 e cet univers dont je rêvais n’était pas un objet de songe mais d’expérience ». Mais une telle « expérience », je crois, n
3172 dont je rêvais n’était pas un objet de songe mais d’ expérience ». Mais une telle « expérience », je crois, ne peut être se
3173 religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il reste qu’un livre comme celui-ci tend un merveilleux pièg
3174 in que la sempiternelle « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actual
3175 « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la m
3176 au cœur de ces sujets qui paraît-il, ne sont pas d’ actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. « Edmond Jaloux :
3177 Paul, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 787-788.
3178 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 787-788.
66 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
3179 Léon Bopp, Interférences (décembre 1927 )ap Un jeune auteur raconte dans une lettre à une amie comment il a
3180 tion littéraire. Bien sûr, c’est cela, le malaise d’ écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pas embarrass
3181 ise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pas embarrassé du tout pour vous lâcher un beau pavé mathém
3182 ue au milieu d’une effusion « lyrique », histoire de n’avoir pas l’air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligean
3183 Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir juste. Et quand son bonhomme se plaint de ce que son œuvre lui a
3184 es de voir juste. Et quand son bonhomme se plaint de ce que son œuvre lui apparaît en même temps que « fatale », « si arbi
3185 u phénomène littéraire. La « Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peut-être moins convaincantes
3186 . La « Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peut-être moins convaincantes certaines de ses rema
3187 Cela rend peut-être moins convaincantes certaines de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’obje
3188 ues sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — en
3189 plicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu
3190 jet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’ analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’il était de ta
3191 re que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’il était de taille à affronter d’autres dédales ! Mais il a su mettre plus de cho
3192 onter d’autres dédales ! Mais il a su mettre plus de choses qu’il n’y paraît d’abord dans ces 50 pages. Beaucoup sont exce
3193 plus de choses qu’il n’y paraît d’abord dans ces 50 pages. Beaucoup sont excellentes et leur facilité même est une réussi
3194 même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat d’ un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme assez insolen
3195 p, c’est le combat d’un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révoltes de s
3196 cientisme assez insolent et les joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presque imperceptible, mai
3197 ète complaisance à se regarder vivre qui est bien d’ aujourd’hui — entre autres. ap. « Léon Bopp : Interférences (La Rena
3198 ivre, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 791.
3199 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 791.
67 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
3200 Dés ou la clef des champs ( 1927 )k « On sent l’absurdité d’un semblable système. » Musset. Une r
3201 clef des champs (1927)k « On sent l’absurdité d’ un semblable système. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur l
3202 rose et un journal oubliés sur le marbre vulgaire d’ une table de café. Je venais de m’asseoir et de commander une consomma
3203 ournal oubliés sur le marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de commander une consommation. Comme
3204 re d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de commander une consommation. Comme d’habitude, un peu après six heures
3205 m’asseoir et de commander une consommation. Comme d’ habitude, un peu après six heures. J’étais seul. Le café est un lieu a
3206 une consommation. Comme d’habitude, un peu après six heures. J’étais seul. Le café est un lieu anonyme bien plus propice a
3207 du bureau, les gages insupportablement familiers d’ une vie honnête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’un apé
3208 ges insupportablement familiers d’une vie honnête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici d
3209 familiers d’une vie honnête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songe
3210 ête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’ un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges
3211 étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur
3212 cela m’intéresse au fond : les faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde réseau des lignes, et
3213 tte mécanique me restitue chaque fois un peu plus de lassitude, un peu plus d’ennui. J’essayai donc de rêver. Mais cette r
3214 chaque fois un peu plus de lassitude, un peu plus d’ ennui. J’essayai donc de rêver. Mais cette rose oubliée me gênait : pe
3215 de lassitude, un peu plus d’ennui. J’essayai donc de rêver. Mais cette rose oubliée me gênait : perdre une rose pour le pl
3216 . Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’ annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de boire, mes
3217 es. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de boire, mes pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers l’avenir et
3218 oulait dans la banlieue printanière ; des soupers d’ amis dans notre modeste salle à manger ; des jaquettes de couleur pour
3219 dans notre modeste salle à manger ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais l’homme avait posé son journal. Soudain,
3220 oudain, portant la main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indéc
3221 . Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’ une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment. Nous fi
3222 roie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment. Nous fixâmes comme enjeu nos consommations. Je gagna
3223 r vaguement. Les couleurs du bar me remplissaient d’ une joie inconnue. Et je me refusais sans cesse aux questions qu’en mo
3224 uel. C’était un jeu très simple où l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasard qui opère au
3225 e de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’ un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-là, une confia
3226 conclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais
3227 mouvants où je me voyais figurer comme une sorte de « personnage aux dés ». Ce furent d’abord des images décousues de sa
3228 aux dés ». Ce furent d’abord des images décousues de sa vie, brillantes ou misérables, passionnées. Mais bientôt : — « Des
3229 -il, tu pourrais me remercier. Vois quels chemins de perdition j’ouvre sans cesse à ta course aveugle ; tu n’aurais pas tr
3230 tout seul, avec tes airs pessimistes. De nouveau, d’ un coup de dés, je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le v
3231 avec tes airs pessimistes. De nouveau, d’un coup de dés, je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche
3232 tu te réjouissais, parce que tu n’as pas beaucoup d’ imagination, et que tu es un pauvre vaudevilliste qui use à tort et à
3233 pauvre vaudevilliste qui use à tort et à travers de situations complètement démodées et d’intrigues usées jusqu’à la cord
3234 à travers de situations complètement démodées et d’ intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha
3235 pensais que j’allais me cramponner à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la possession, et que j’allais vivre aus
3236 leur vie à la gagner9, et leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux cours de bourse. « Heureux quoique pauvr
3237 nexplicable de lier des valeurs morales aux cours de bourse. « Heureux quoique pauvre » comme ils disent dans leurs manuel
3238 s voler, pour leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à
3239 r manie aussi de situer le paradis dans la classe d’ impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient que leur vie
3240 la leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5  % régulier de plaisirs, avec assurance contre faillites morales et do
3241 voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisirs, avec assurance contre faillites morales et douleurs d’amour
3242 ec assurance contre faillites morales et douleurs d’ amour — ô vertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé les caiss
3243 prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé les caisses d’ épargne, monuments d’une bassesse morale inconcevable, temples de leur
3244 Ils ont inventé les caisses d’épargne, monuments d’ une bassesse morale inconcevable, temples de leurs paresses et de leur
3245 ments d’une bassesse morale inconcevable, temples de leurs paresses et de leurs lâchetés, glorification de leur impuissanc
3246 morale inconcevable, temples de leurs paresses et de leurs lâchetés, glorification de leur impuissance à concevoir un autr
3247 eurs paresses et de leurs lâchetés, glorification de leur impuissance à concevoir un autre bonheur que celui qu’ils ont re
3248 cevoir un autre bonheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et l’Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre
3249 ’est toujours à qui perd gagne ! Sauter follement d’ une destinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec la même joie,
3250 e ! Sauter follement d’une destinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec la même joie, mon cheval fou, mon beau Dési
3251 angoisse. Ça les dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dépens, témoin ce brave homme qui est en
3252 i est en train de me soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’
3253 st en train de me soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai t
3254 aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’on
3255 ants quand ils n’ont plus que des baisers au goût d’ adieu, et l’avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et
3256 r des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était as
3257 cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’ un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi se mit à me regard
3258 mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musi
3259 garder bizarrement et j’étais possédé de joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la ru
3260 loguaient follement au-dessus des rues parcourues de longs cris en voyage. Je me sentis perdre pied délicieusement. Et de
3261 yage. Je me sentis perdre pied délicieusement. Et de cette nuit peut-être, je ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemai
3262 es paroles — ou peut-être n’étaient-ce que celles de mes folies ? Je me répète : paradoxes, mais cela ne suffit plus à m’e
3263 ue je devrais tenter quelque chose. Je suis plein de rêves, certains soirs. Il faut pourtant rentrer chez moi, et ma femme
3264 le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’ aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et j
3265 sur ma lâcheté. Et je t’apostrophe, soudain plein de mépris et de désespoir, ô vie sans faute, vie sans joie… Ah ! plus am
3266 é. Et je t’apostrophe, soudain plein de mépris et de désespoir, ô vie sans faute, vie sans joie… Ah ! plus amère, plus amè
3267 encore, saurai-je un jour te désirer, te haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de l’éd.) k. « Dés ou la clef de
3268 te haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de l’éd.) k. « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts
3269 éd.) k. « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel 1928  : beaux-arts, arts appliqués, architecture, littérature, Neuchâtel, 1
3270 appliqués, architecture, littérature, Neuchâtel, 1927, p. 97-104.
68 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
3271 Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928 )aq C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car
3272 C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuel
3273 tion actuelle. On retrouve aux premiers chapitres de Catherine-Paris cette magie des sensations et des rêves de l’enfance
3274 ine-Paris cette magie des sensations et des rêves de l’enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui
3275 l’enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui faisaient déjà du Perroquet Vert un petit chef-d’œuv
3276 ient déjà du Perroquet Vert un petit chef-d’œuvre de poésie proprement romanesque, naissant des situations mêmes et non de
3277 romanesque, naissant des situations mêmes et non de dissertations lyriques à leur propos. Mais dans ce roman, il n’y a pl
3278 lus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et
3279 e témoin intelligent et un peu ironique des cours d’ Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résu
3280 et un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le dé
3281 ique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défaut de compos
3282 ’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défaut de composition du livre e
3283 ce de collaboration résultent à la fois le défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine à Paris e
3284 de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’Europe
3285 e à Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polona
3286 Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’ un comte polonais, grand seigneur médiatisé, vaguement prétendant au t
3287 seigneur médiatisé, vaguement prétendant au trône de Pologne, est plutôt d’un mémorialiste. Madame Bibesco y montre beauco
3288 uement prétendant au trône de Pologne, est plutôt d’ un mémorialiste. Madame Bibesco y montre beaucoup de liberté d’esprit,
3289 iste. Madame Bibesco y montre beaucoup de liberté d’ esprit, une pénétration de jugement et une ironie assez amère qui éton
3290 tre beaucoup de liberté d’esprit, une pénétration de jugement et une ironie assez amère qui étonnent de la part d’une femm
3291 e roman repart dans une troisième action (l’amour de Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à vrai di
3292 à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sau
3293 l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de tr
3294 u roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouvailles spirituelles, malicieuses ou poétiques ; et ce n’est pas
3295 « pointes » faciles mais cela même ne manque pas de naturel… On peut regretter que ce livre ne réalise pas une synthèse p
3296 u roman et des mémoires. Mais si son début permet de croire que le Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans
3297 réussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémoria
3298 eurs un mémorialiste captivant, dans la tradition d’ un Ligne par exemple. aq. « Princesse Bibesco : Catherine-Paris (Gra
3299 sset, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1928, p. 121-122.
3300 e universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1928, p. 121-122.
69 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
3301 Le péril Ford (février 1928 )a On a trop dit que notre époque est chaotique. Je crois bien, au
3302 bien, au contraire, que l’histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaissent plus nettem
3303 stoire n’a pas connu de période où les directions d’ une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain ordre s’élabo
3304 e, ou, pour mieux dire, une organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément 
3305 ste à jouer l’autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une question de quel
3306 sation toute-puissante n’est plus qu’une question de quelques années. Mais peut-être est-il temps encore. Ici et là, quelq
3307 Ici et là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’ une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure de toucher
3308 e déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de deux siè
3309 buts que sa civilisation poursuit depuis près de deux siècles, l’Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, p
3310 puis près de deux siècles, l’Occidental est saisi d’ un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs, qu’il y avait peut-être
3311 aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident
3312 prendre conscience du péril. Nous ne tentons rien d’ autre ici. Il y a une lâcheté, croyons-nous, dans cette complaisance
3313 érale à proclamer le désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affirmer que tout est incompréhensibl
3314 ensible. L’homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu
3315 ule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’une époque entière ait pu s
3316 r, et se tromper mortellement. Il suffit pourtant de regarder autour de nous et d’en croire nos yeux. I. L’homme qui a r
3317 Il suffit pourtant de regarder autour de nous et d’ en croire nos yeux. I. L’homme qui a réussi Je prends Henry Ford
3318 egarder autour de nous et d’en croire nos yeux. I . L’homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du mon
3319 onne ne s’est approché plus que lui du type idéal de l’industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa
3320 l’industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes que l’époque a sen
3321 tion la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je p
3322 Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce
3323 : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vi
3324 ue l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils d
3325 la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à jouer avec des outils, « et c’est avec
3326 à présent », dit‑il. Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de Damas » (comme il dit sans qu
3327 dit‑il. Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de Damas » (comme il dit sans qu’on sache au j
3328 événement de ces années de jeunesse, son « chemin de Damas » (comme il dit sans qu’on sache au juste quelle dose d’« humou
3329 omme il dit sans qu’on sache au juste quelle dose d’ « humour » il met dans l’expression), c’est la rencontre d’une locomot
3330 r » il met dans l’expression), c’est la rencontre d’ une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de 12 ans, j’ap
3331 ocomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’au jour présent, ma g
3332 motive routière. « Depuis l’instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’au jour présent, ma gran
3333 ant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’au jour présent, ma grande et constante ambition a été d
3334 ur présent, ma grande et constante ambition a été de construire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeunesse so
3335 nstruire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, puis d’un mo
3336 Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’ un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfin d’une première
3337 sont : la construction d’un moteur à vapeur, puis d’ un moteur à explosion, enfin d’une première automobile fabriquée, à te
3338 eur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfin d’ une première automobile fabriquée, à temps perdu, alors qu’il est simp
3339 « et commence à réaliser son rêve, le type unique d’ automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de chiffres indiqu
3340 son rêve, le type unique d’automobile utilitaire » 2. Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant le progrès de sa prod
3341 tomobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant le progrès de sa production, d’année en année. On
3342 c’est une suite de chiffres indiquant le progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces chiffres c
3343 e chiffres indiquant le progrès de sa production, d’ année en année. On pourrait ajouter à ces chiffres celui des milliards
3344 née. On pourrait ajouter à ces chiffres celui des milliards qu’il possède, ou plutôt qu’il gère, mais ce n’est pour lui qu’un rés
3345 mais ce n’est pour lui qu’un résultat secondaire de son activité. Le but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rê
3346 qu’un résultat secondaire de son activité. Le but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’a
3347 de son activité. Le but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’a réalisé comme il est don
3348 it autre, il l’a réalisé comme il est donné à peu d’ hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augme
3349 il l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter enco
3350 é comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore cette product
3351 faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’ augmenter encore cette production. Ford est le plus puissant industrie
3352 monde ; le plus riche, au point qu’il peut parler d’ égal à égal avec beaucoup d’États ; le plus parfait aussi. Son succès
3353 int qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’ États ; le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’ab
3354 aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses
3355 taques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et de repos qu’il
3356 ation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et de repos qu’il offre à ses ouvriers semblent bien apporter
3357 sines, des salaires, des conditions de travail et de repos qu’il offre à ses ouvriers semblent bien apporter une solution
3358 st un résultat qu’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes eu
3359 re. Au contraire, il a résolu la question sociale d’ une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrinaires de gauche, lesq
3360 açon qui ne devrait pas déplaire aux doctrinaires de gauche, lesquels ont coutume de promettre à leurs électeurs une organ
3361 aux doctrinaires de gauche, lesquels ont coutume de promettre à leurs électeurs une organisation complète du monde, seule
3362 nisation complète du monde, seule méthode capable d’ empêcher les abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’escl
3363 Du même coup, en supprimant l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des cla
3364 l’ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuv
3365 ause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solid
3366 la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propre
3367 la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela le plaisir q
3368 de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve
3369 mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au
3370 à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le charme un peu facile mais fort goûté du gra
3371 me un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale
3372 a sans peine la popularité mondiale des « idées » d’ Henry Ford et des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applau
3373 leur montre le chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préférable qu’ils s’y engagent dès aujour
3374 ment, pendant qu’il reste quelques chances encore de régler pacifiquement le conflit du capital et du travail. « Se fordis
3375 crivait récemment un économiste. Ford, perfection de l’industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achève
3376 striel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civili
3377 son achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la j
3378 ivilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à qu
3379 e. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus gra
3380 ave question qu’on puisse poser à notre temps. II . M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas
3381 ps. II. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut l
3382 Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que to
3383 vons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute sa car
3384 érons-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’effo
3385 d’abord la vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser l’objet par s
3386 ance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce d’ en réaliser l’objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il
3387 ition, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est trè
3388 vagant du bonheur de l’humanité par la possession d’ automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il a vite fait de
3389 Et, comme il est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec c
3390 t de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion co
3391 ion qu’une passion contenue peut donner à l’homme d’ action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités énormes d’
3392 ner à l’homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement, pour pouvoir conti
3393 voici en mesure de produire des quantités énormes d’ autos. Seulement, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans l’inté
3394 ouvoir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge.
3395 a réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre h
3396 eux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant que de lui do
3397 nne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant que de lui donner une apparence d’utilité publique. À chaque page de ses liv
3398 t plus maintenant que de lui donner une apparence d’ utilité publique. À chaque page de ses livres, on pourrait relever les
3399 r une apparence d’utilité publique. À chaque page de ses livres, on pourrait relever les sophismes plus ou moins conscient
3400 ients par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qu
3401 mateur. Prenons cette petite phrase qui n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment les prix
3402 client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bien entendu qu’une
3403 hons un peu les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. D
3404 t trop chère ; mais surtout que le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’industrie
3405 er bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non
3406 téresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en achetant 5 francs moins chers un objet que, sans cette bais
3407 nt. Il croit qu’il va gagner 5 francs en achetant 5 francs moins chers un objet que, sans cette baisse, il n’eût pas ache
3408 . Elle peut amener, en se généralisant, une sorte de suicide du genre humain, par perte de son instinct de préservation, d
3409 , une sorte de suicide du genre humain, par perte de son instinct de préservation, d’autorégulation et d’alternances. Tel
3410 uicide du genre humain, par perte de son instinct de préservation, d’autorégulation et d’alternances. Tel est ce sophisme,
3411 umain, par perte de son instinct de préservation, d’ autorégulation et d’alternances. Tel est ce sophisme, le paradoxe du b
3412 son instinct de préservation, d’autorégulation et d’ alternances. Tel est ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de
3413 est ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être
3414 le intitulé « Le grand paradoxe du monde moderne » 3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans la conception fordienne
3415 grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans la conception fordienne de l’oisiveté. F
3416 fondément antihumain dans la conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouch
3417 cond dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut
3418 e. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence
3419 relâche les ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’emploi de
3420 ur mieux les prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produit
3421 ord qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’ augmenter la consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvri
3422 la consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la pr
3423 puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus
3424 us la production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’industrie ne peut subsister qu’en progre
3425 on s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la
3426 jusqu’à quel point Ford est conscient des buts et de l’avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de
3427 point Ford est conscient des buts et de l’avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de produire peu
3428 effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au point d’en excl
3429 eut très bien envahir un cerveau moderne au point d’ en exclure toute considération de finalité. Mais cet aveuglement fonda
3430 moderne au point d’en exclure toute considération de finalité. Mais cet aveuglement fondamental n’empêche pas notre indust
3431 lement fondamental n’empêche pas notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez
3432 lus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définiti
3433 te américaine. Voici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps conve
3434 nt le temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablement tout en restant maître de régler à sa guise
3435 quoi vivre convenablement tout en restant maître de régler à sa guise le détail de sa vie privée. Cette liberté particuli
3436 en restant maître de régler à sa guise le détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres pareilles,
3437 de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres pareilles, composent, au total, la grande Liberté idéale et me
3438 nt, au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale
3439 rté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dan
3440 uotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’ huile dans les rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que d
3441 n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette admirable simplification : « Sur quoi repose la société ? Sur l
3442 e prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher
3443 la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom
3444 me des machines. J’y vois la réalisation concrète d’ une théorie qui tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour les h
3445 alisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le s
3446 réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en pratique chez nous ne concernent pas
3447 Réjouissons-nous… Mais, comment expliquer que des centaines de milliers de lecteurs, dans une Europe « chrétienne », applaudissen
3448 s-nous… Mais, comment expliquer que des centaines de milliers de lecteurs, dans une Europe « chrétienne », applaudissent s
3449 ous… Mais, comment expliquer que des centaines de milliers de lecteurs, dans une Europe « chrétienne », applaudissent sans réser
3450 , comment expliquer que des centaines de milliers de lecteurs, dans une Europe « chrétienne », applaudissent sans réserve
3451 rétienne », applaudissent sans réserve aux thèses de cet orgueilleux et naïf messianisme matérialiste ? Un seul doute effl
3452 ialiste ? Un seul doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… M
3453 eure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop
3454 t ne pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de cré
3455 ns que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de création, tout le jeu de nos facult
3456 t notre système de concurrence, tout notre effort de création, tout le jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement ver
3457 rence, tout notre effort de création, tout le jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production matériell
3458 ord passe outre et se remet à discuter des points de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problè
3459 problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général, il se borne à parl
3460 dans son livre. En général, il se borne à parler de problèmes techniques où son triomphe est facile. C’est le technicien
3461 perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homm
3462 ne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’ homme à qui tout réussit, messianisme de la machine, méconnaissance gl
3463 optimisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de la machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout
3464 rieuse des forces spirituelles, le tout agrémenté d’ humour et exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr l’adhésion d
3465 l’adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus grands esprits d
3466 n, dans sa préface, égale aux plus grands esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosophe
3467 es temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées »,
3468 ’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civilisation, possède la philosop
3469 ffrénée, trop folle, pour être justiciable encore de nos vérités essentielles ? Il semble bien que notre temps ait prononc
3470 otre temps ait prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La fo
3471 prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur
3472 ivement le divorce de l’esprit et de l’action. III . Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisi
3473 fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller
3474 formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se re
3475 ler ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d’ une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se voir ob
3476 elle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière le
3477 e paresse et une légèreté inouïes, c’est le signe d’ une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si l’Espr
3478 prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les peuples. Ainsi,
3479 Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre
3480 it. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la conn
3481 yons notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déj
3482 de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer
3483 , la connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’ expérience. Et qui n’en pourrait citer un exemple individuel ? Nous sa
3484 ’homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cett
3485 ns le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tard, « puisqu’elle n’est pas utile, elle e
3486 ou autres œuvres destinées à charmer les loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutuellement leu
3487 tout est dit ! Le simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes questions humaines est une des mani
3488 es est une des manifestations les plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se nomme bon sens amér
3489 appantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial
3490 omme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et d’alerte, quelque chose de très sympathique et pas dangereu
3491 américain. On en fait quelque chose de jovial et d’ alerte, quelque chose de très sympathique et pas dangereux du tout. On
3492 uelque chose de jovial et d’alerte, quelque chose de très sympathique et pas dangereux du tout. On n’en fait pas une philo
3493 s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu
3494 affaires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme mo
3495 nce religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en
3496 rne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en être Une fois qu’on a com
3497 hoses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV . « En être » ou ne pas en être Une fois qu’on a compris à quel poi
3498 er presque fatalement dans un anarchisme stérile. Accepter la technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien hu
3499 homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlogerie calculé une fois pour toutes et qu’il sent immu
3500 donne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’ horlogerie calculé une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme l
3501 immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernières sirènes. Au monde, c’e
3502 ’à l’existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’ aliéner au profit de plaisirs tarifés, soumis plus subtilement encore
3503 une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de plaisirs tarifés, soumis plus subtilement encore que son travail aux
3504 plus subtilement encore que son travail aux lois d’ une offre et d’une demande sans rapport avec ses désirs réels, et dont
3505 nt encore que son travail aux lois d’une offre et d’ une demande sans rapport avec ses désirs réels, et dont il subit docil
3506 l’homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à
3507 ls et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette ha
3508 enu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’ en comprendre les correspondances divines et humaines, insensible même
3509 onomiques et des exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par l
3510 te détresse, — qu’il met d’ailleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’a laissé
3511 u confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement
3512 il découvre qu’il s’ennuie profondément ; fatigué de trop de satisfactions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a c
3513 vre qu’il s’ennuie profondément ; fatigué de trop de satisfactions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les
3514 a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou
3515 a joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’ avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une certaine duré
3516 ale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins. Mauvais loisir
3517 dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins. Mauvais loisirs. Ford lui a donn
3518 lui a donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’envie. Ma
3519 donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’envie. Mauvais
3520 travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le
3521 , il en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rappor
3522 l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstrait
3523 mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de notre liberté. La victoire mécanicienne est une victoire à l
3524 t pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de notre liberté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus
3525 ignes. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter
3526 ir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore dou
3527 ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par le seul fait de rester
3528 nsibilité spirituelle deviennent par le seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car l’Esprit
3529 est pas une faculté destinée à amuser nos moments de loisir, il a des exigences effectives ; et ces exigences sont en cont
3530 en contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus
3531 la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’ une espèce de plus en plus rare, qui savent encore quelque chose de la
3532 lus en plus rare, qui savent encore quelque chose de la vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui garden
3533 uelle grâce ? un peu de cette connaissance active de Dieu que nos savants nomment mysticisme et considèrent comme un « cas
3534  on les écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler
3535 des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler les classes pr
3536 e qu’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre e
3537 prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’ on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elle
3538 ’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apan
3539 s dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonn
3540 mphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’ une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’individus. Et ce
3541 réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’individus. Et cette franc-ma
3542 devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’individus. Et cette franc-maçonnerie sera bientô
3543 anage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’individus. Et cette franc-maçonnerie sera bientôt traquée avec la d
3544 e sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’ individus. Et cette franc-maçonnerie sera bientôt traquée avec la dern
3545 raquée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste
3546 qu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, do
3547 de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une fois de plus.
3548 détruire. » Ford a raison, une fois de plus. Pas de compromis possible de ce côté. Mais du nôtre ? « Vous ne pouvez servi
3549 ison, une fois de plus. Pas de compromis possible de ce côté. Mais du nôtre ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », di
3550 ue. Nous avons mieux à faire, il n’est plus temps de se désintéresser simplement des buts — si bas soient-ils — d’une civi
3551 éresser simplement des buts — si bas soient-ils — d’ une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il
3552 bas soient-ils — d’une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révoltes terr
3553 ilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révoltes terribles4, celles d’un mystic
3554 l se prépare déjà des révoltes terribles4, celles d’ un mysticisme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison. Les intelle
3555 enu presque fou dans sa prison. Les intellectuels d’ aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il est possible d’éch
3556 une tâche pressante : chercher s’il est possible d’ échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’existence
3557 e. Pour le reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plu
3558 reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du gr
3559 lus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de
3560 t mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son succès est enc
3561 chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de meilleure q
3562 e allemande, son succès est encore plus grand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor Cambon,
3563 s grand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œu
3564 eilleure qualité. Je ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payo
3565 à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perc
3566 y Ford, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce :
3567 n œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Jugendbewegung » e
3568 is, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; s
3569 ot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surré
3570 sie. a. « Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, n°  4, février 1928, p. 189-202.
3571 Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, n° 4, février 1928, p. 189-202.
70 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
3572 Un soir à Vienne avec Gérard ( 24 mars 1928)l À Pierre Jeanneret et à son étoile nervalienne. Je v
3573 Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928 )l À Pierre Jeanneret et à son étoile nervalienne. Je vins à Vien
3574 Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les dancings, un peupl
3575 uve plus nulle part. Dans les dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la Petite-Entente, applau
3576 euple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais
3577 a Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le Beau Danube bleu, en commémoration polie d’un passé i
3578 glais Le Beau Danube bleu, en commémoration polie d’ un passé imaginaire, ou peut-être pour essayer de se prendre encore au
3579 d’un passé imaginaire, ou peut-être pour essayer de se prendre encore au rêve de valse qu’on était venu chercher parce qu
3580 ut-être pour essayer de se prendre encore au rêve de valse qu’on était venu chercher parce que cela vaudrait bien d’autres
3581 vaudrait bien d’autres stupéfiants. Mais un tour de tourniquet anéantissait cette Vienne tout occupée à ressembler à l’id
3582 ge, ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement
3583 r à la Russie et au sifflement des balles perdues d’ une révolution. Sept heures du soir : le moment était venu d’arrêter l
3584 u sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heures du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée,
3585 ution. Sept heures du soir : le moment était venu d’ arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste a
3586 du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants p
3587 rée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants pour qu’on la sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse
3588 e frileuse nostalgie. Mais qui fallait-il accuser de cette duperie, qui rendre responsable de ma déception, sinon moi-même
3589 accuser de cette duperie, qui rendre responsable de ma déception, sinon moi-même, me dis-je bientôt. Car je professe qu’u
3590 er son objet, de même qu’atteignant certain degré d’ intensité, un état d’âme crée une situation qui l’exprime — bien qu’on
3591 ées que par un léger décalage dans la chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas renoncé à certaine
3592 décalage dans la chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas renoncé à certaine idée que j’avais d’un
3593 , n’ayant pas renoncé à certaine idée que j’avais d’ un romantisme viennois, je fus conduit, par une sorte de compromis sen
3594 omantisme viennois, je fus conduit, par une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffman
3595 sentimental, à l’Opéra où l’on donnait les Contes d’ Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans mon espri
3596 n esprit Vienne et Hoffmann : c’était le souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas prononcé inté
3597 dans l’ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide : la jolie femme qu’on attend dans
3598 re, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’ une place vide : la jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, u
3599 uait le rendez-vous que j’avais demandé au hasard d’ arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — a
3600 avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent p
3601 arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patriotes au son d’une fanf
3602 être — ainsi d’autres deviennent patriotes au son d’ une fanfare militaire, ainsi je m’abandonne au rêve d’un monde que sus
3603 e fanfare militaire, ainsi je m’abandonne au rêve d’ un monde que suscite en moi seul peut-être cette plainte heureuse des
3604 ïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnatur
3605 de la pureté où vibrent par instants les accords d’ une harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une langue que je
3606 oi, il n’entend pas ma question. L’envie me prend d’ aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour t
3607 rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’ un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais
3608 enaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutal
3609 istesse amoureuse. Elle n’est plus que l’approche d’ une grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’imprévisibl
3610 ndeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’ imprévisibles transfigurations, — l’heure anxieuse et mélancolique où
3611 là que la forme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens volup
3612 aisceau de lumière m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revo
3613 . Je me sens voluptueusement perdre pied. Vertige de te revoir, vertige de te perdre vraiment, parce que c’est toi, parce
3614 sement perdre pied. Vertige de te revoir, vertige de te perdre vraiment, parce que c’est toi, parce que c’est bien toi de
3615 de moi, c’est une chose singulière que le pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes tout près de comprendre… Mon voisi
3616 du ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’ atteindre au monde des êtres véritables. Nous nous rencontrons. Vous m
3617 ais le temps approche où vous n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un
3618 s besoin de souffrir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de m
3619 la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis
3620 ge de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’avais déjà reconnu. Il portait une ca
3621 connu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance très modern
3622 nu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il
3623 moderne. Il n’y avait dans toute sa personne rien de positivement démodé ; je n’eus même pas le sentiment de quoi que ce s
3624 itivement démodé ; je n’eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où m’avait jeté
3625 e n’eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’ immatériel. D’ailleurs le trouble où m’avait jeté la première reconnai
3626 jeté la première reconnaissance empêcha ma raison d’ intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut
3627 e empêcha ma raison d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes e
3628 éalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’O
3629 sion et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’Opéra, Gérard de
3630 eau pris au défaut de sa carapace de principes et d’ évidences opaques. Nous sortîmes de l’Opéra, Gérard de Nerval et moi,
3631 e principes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’Opéra, Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’autre, co
3632 Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’ autre, comme des amis qui se connaissent depuis si longtemps qu’un éch
3633 qu’un échange tacite suffit aux petites décisions de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubann
3634 nnois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’en suis pas fâché. »
3635 -il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’en suis pas fâché. » Il y avait pe
3636 s jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je, songe
3637 ins n’a guère changé, dis-je, songeant aux Amours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré les apparences, cette vie s
3638 ités qui correspondent encore à l’image classique de Vienne. Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépourvu d’ironie, mai
3639 . Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépourvu d’ ironie, mais non pas de légèreté. C’est une sorte d’inconstance folâtr
3640 cieux d’ailleurs, dépourvu d’ironie, mais non pas de légèreté. C’est une sorte d’inconstance folâtre qui cache une incapac
3641 ironie, mais non pas de légèreté. C’est une sorte d’ inconstance folâtre qui cache une incapacité définitive à se passionne
3642 soit. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de l’étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, a
3643 moment, comme nous traversions une rue sillonnée de taxis rapides, le homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut
3644 ée de taxis rapides, le homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinc
3645 Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terreur, le hom
3646 inces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnif
3647 eur orangée. Gérard semblait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à
3648 mblait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie de
3649 à une certaine anémie des sentiments, à un manque de caractère aussi. La fidélité véritable est une œuvre d’art qui demand
3650 ous le savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux , en y réfléchissant bien, mais peut-être était-ce la même sous deux a
3651 issant bien, mais peut-être était-ce la même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont retenu un instant,
3652 t amour, c’était parce que je découvrais en elles de secrètes ressemblances, qui pour d’autres paraissaient purement mysti
3653 e dont l’idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite bossue qui vend des roses et des œillets da
3654 le. Nous nous arrêtâmes non loin, à une devanture de robes de soie, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les rev
3655 nous arrêtâmes non loin, à une devanture de robes de soie, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les revêtiraient
3656 pressés une jeune femme, chapeau rouge et manteau de fourrure brune, inévitablement. Et ce qui se passa fut, hélas, non mo
3657 refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler n
3658 fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’ elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle f
3659 s qu’à lui prendre chacun un bras, une femme pour deux hommes — et ce fut bien dans cette anecdote dont Gérard attendait évi
3660 te dont Gérard attendait évidemment quelque chose d’ imprévu, la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant éta
3661 ptiser en style viennois « Mehlspeis-Schlagobers » 10. Heureusement qu’au Moulin-Rouge, souterrain où nous nous engouffrâmes
3662 ain où nous nous engouffrâmes dans un grand bruit de saxophones et de cors anglais jouant la Marche de Tannhäuser en tango
3663 engouffrâmes dans un grand bruit de saxophones et de cors anglais jouant la Marche de Tannhäuser en tango, un Balkanique t
3664 r en tango, un Balkanique très lisse nous délivra de notre conquête pour la durée des danses. Gérard bâillait : « Voilà ce
3665 anses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prendre des femmes au hasard, disait-il. Je sens très bien que nous a
3666 vous êtes moderne, vous vous contentez peut-être de cette pêche miraculeuse — c’est une façon de parler — à laquelle on s
3667 être de cette pêche miraculeuse — c’est une façon de parler — à laquelle on se livre dans ces lieux de plaisir — autre faç
3668 de parler — à laquelle on se livre dans ces lieux de plaisir — autre façon de parler. On dit que j’ai vécu d’illusions, av
3669 se livre dans ces lieux de plaisir — autre façon de parler. On dit que j’ai vécu d’illusions, avouez que les miennes étai
3670 sir — autre façon de parler. On dit que j’ai vécu d’ illusions, avouez que les miennes étaient de meilleure qualité : car c
3671 vécu d’illusions, avouez que les miennes étaient de meilleure qualité : car c’est une pauvre illusion que le plaisir qu’o
3672 qu’elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasés s’amusent plus grossièrement que des b
3673 e place dans leur vie aux “divertissements” entre 10 heures du soir et 4 heures du matin, moyennant tant de schillings, da
3674 aux “divertissements” entre 10 heures du soir et 4 heures du matin, moyennant tant de schillings, dans un décor banal et
3675 s femmes qui élargissent des sourires à la mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de distributeurs
3676 rires à la mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de distributeurs automatiques de plaisir. Autant
3677 re générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de distributeurs automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui les f
3678 uit sont des sortes de distributeurs automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui les fréquentent ne savent plus ce q
3679 t épaissis. Regardez ces yeux mornes, ou luisants de concupiscences élémentaires : Ce sont vos contemporains livrés à la d
3680 aisirs achetés au détail dans une foire éclatante de faux luxe. La misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que
3681 s une foire éclatante de faux luxe. La misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que celle-là qui danse en robe
3682 qui danse en robe mauve, avec tant de gravité et de détachement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de
3683 viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’e
3684 soit touchée par les mains outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En Orient on en ferait une chose e
3685 outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En Orient on en ferait une chose extrêmement précieuse, qu’o
3686 ’on n’approcherait qu’avec un sentiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend
3687 . » Des bugles agonisaient, aux dernières mesures d’ un tango. Notre encombrante conquête revint s’asseoir auprès de nous.
3688 moins. « Pourquoi vous ne dites rien ? » fit-elle d’ un ton de reproche, évidemment scandalisée par cette atteinte aux lois
3689 Pourquoi vous ne dites rien ? » fit-elle d’un ton de reproche, évidemment scandalisée par cette atteinte aux lois du genre
3690 ment, pauvre colombe dépareillée, vous n’avez pas de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fille ne compr
3691 homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des garçons
3692 stiaire, y était l’objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des garçons. « Encore une proie inut
3693 une proie inutile lâchée pour l’ombre, dit Gérard d’ un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est
3694 Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sans but.
3695 lié mes clefs il y a très, très longtemps… Et pas de Lune ce soir, il serait dangereux de s’endormir. » Se penchant vers m
3696 emps… Et pas de Lune ce soir, il serait dangereux de s’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : « La nuit sera noire
3697 blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meilleurs d
3698 re. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meilleurs de se répéter, et que c’était la première fois de la soirée que Gérard «
3699 rs de se répéter, et que c’était la première fois de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-R
3700 s devenaient légères comme des ballons. La rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité et l’Illus
3701 et l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ ombre flatteuse aux caprices redoutables. Cette nuit-là nous rencontrâ
3702 es, allusions. Plus tard, dans un petit bar laqué de noir jusqu’à mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant le pla
3703 ar laqué de noir jusqu’à mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant le plafond à caissons dorés, l’étendent indéfin
3704 ulé joue très doucement. Nous sommes assis autour d’ une petite table lumineuse, verdâtre, et Gérard, penché sur cet aquari
3705 use, verdâtre, et Gérard, penché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ail
3706 y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise aux citron
3707 e, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sa
3708 nglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle erreur d’images, — c
3709 lle, ou bien plutôt, par je ne sais quelle erreur d’ images, — ce serait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lo
3710 reur d’images, — ce serait la gravité énigmatique d’ Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil
3711 rienne, mais dans le lointain, Aurélia lui répond d’ un regard pareil. Des visages naissent comme des étoiles dans un halo,
3712 antes dans la même minute toutes les incarnations d’ un amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultan
3713 nel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté magnifique et angoi
3714 oissante. Il mêle tout dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coupe de songes
3715 tous les visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toutes leurs illusions, — illusions des formes passagères
3716 sera toujours cachée, ainsi la Lune et sa moitié d’ ombre. Et parce que tout revit en un instant dans cette vision, il con
3717 il connaît enfin la substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous les
3718 toutes ses amours, il communie avec quelque chose d’ éternel. Tous les drames du monde ne sont que décors mouvants dans la
3719 t que reflets, épisodes, symboles : le vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des signes, des géné
3720 s les formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’ intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-t
3721 france qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences. La fatigue ca
3722 us révèle le sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences. La fatigue calme son lyrisme et son exal
3723 yrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il me raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que po
3724 on. Il semble se rapprocher de moi. Il me raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que pour nos savants retombé
3725 les correspondances, chaque geste, chaque minute d’ une vie résume cette vie entière et fait allusion à tout ce qu’il y a
3726 e qu’il faudrait écrire, c’est une Vie simultanée de Gérard, qui tiendrait toute en une heure, en un lieu, en une vision. 
3727 une vision. » Nous sortîmes. Seules des trompes d’ autos s’appelaient dans la nuit froide. Gérard ne disait presque plus
3728 porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une bouti
3729 la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’ une boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au léger sifflement
3730 ui éclairait la boutique, et que le vent menaçait d’ éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu
3731 on et la fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs regardaient d’un œil las, trop las pour s’étonn
3732 outes sortes de soins. Les chauffeurs regardaient d’ un œil las, trop las pour s’étonner. Transi, je me balançais d’un pied
3733 trop las pour s’étonner. Transi, je me balançais d’ un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en croquant une de
3734 ransi, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutard
3735 e dans de la neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et aill
3736 mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans c
3737 ux faces maigres qui ressemblaient terriblement à d’ anciens Habsbourg, des comtes athlétiques et la silhouette échassière
3738 es comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours ros
3739 une duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose laissait découvertes des jambes extrêmement hautes tandi
3740 isée jetait des insolences sur les chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ; en dix minutes, il
3741 cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ?
3742 x cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle, l’air d’ autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apai
3743 encieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà o
3744 orteurs passèrent à toute vitesse, m’éclaboussant de neige et de titres dépourvus de sens. Je dormais debout. 10. Quelqu
3745 èrent à toute vitesse, m’éclaboussant de neige et de titres dépourvus de sens. Je dormais debout. 10. Quelque chose comm
3746 e, m’éclaboussant de neige et de titres dépourvus de sens. Je dormais debout. 10. Quelque chose comme « pâtisserie-crème
3747 de titres dépourvus de sens. Je dormais debout. 10. Quelque chose comme « pâtisserie-crème fouettée ». l. « Un soir à Vi
3748 e Semaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n°  7, 24 mars 1928, p. 105-108.
3749 emaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n° 7, 24 mars 1928, p. 105-108.
3750 rtistique et littéraire, Neuchâtel, n° 7, 24 mars 1928, p. 105-108.
71 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
3751 de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928 )ar Livre passionnant pour tous ceux que Jules Verne passionne. Pou
3752 é la science parce qu’elle ouvre des perspectives d’ évasion — où seuls les poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus
3753 se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’ avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lec
3754 emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où les équations tyran
3755 le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où les équations tyranniq
3756 ntaisiste où les équations tyranniques deviennent de merveilleux calembours, où les savants sont réellement dans la lune,
3757 ndent au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement
3758 la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’ étrennes dans les œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du
3759 d’étrennes dans les œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du seul écrivain dont l’influence soit comparable à
3760 ma ! Claretie raconte que les détenus des maisons de correction se jetaient sur ces volumes « au travers desquels ils resp
3761 mes dans une civilisation qui, selon l’expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans l
3762 ssion de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’ une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela constituait
3763 nte l’aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous longtemps
3764 n jugement !) Serons-nous longtemps encore dupes d’ une conception de la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos p
3765 rons-nous longtemps encore dupes d’une conception de la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteu
3766 on de la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteurs sous prétexte qu’il n’est styliste ni psycho
3767 ateau. Pour ce coup, voilà qui ne m’empêchera pas d’ y monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo soit à bord, je so
3768 Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1928, p. 768-769.
3769 èque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1928, p. 768-769.
72 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
3770 Aragon, Traité du style (août 1928 )as Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne
3771 tyle (août 1928)as Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admir
3772 nt de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 60 parties
3773 yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est naturel :
3774 tion. J’admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est naturel : je m’en avoue plus
3775 ire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’ échecs simultanément, et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et
3776 avorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il e
3777 n mot bien français et ses applications faciles à cent célébrités locales. (Quant à Goethe, traité de clown, cela ne va pas
3778 cent célébrités locales. (Quant à Goethe, traité de clown, cela ne va pas loin.) C’est une belle rage (ô combien partagée
3779 e ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’ exemples qui méritent de l’être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépas
3780 traite du style, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces
3781 u’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de l’absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou
3782 surde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enfin ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs l
3783 urne sans cesse pour crier : Lâches, vous refusez d’ avancer ! Mais il reste à portée de voix du troupeau. C’est sans doute
3784 , vous refusez d’avancer ! Mais il reste à portée de voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le tient magnifiqueme
3785 style (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, Genève, août 1928, p. 1034.
3786 verselle et Revue de Genève, Genève, Genève, août 1928, p. 1034.
73 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
3787 lle, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928 )at Les derniers écrits des surréalistes débattent la question de s
3788 ers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne doit pas entr
3789 ne doit pas entraîner, à leur point de vue, celui d’ autrui sur eux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers l’action
3790 mes en France — vers la politique. Or ces ennemis de toute littérature voient leurs avances dédaignées par les communistes
3791 eurs avances dédaignées par les communistes, gens d’ action à jugements simples, qui les trouvent trop littérateurs. Rien d
3792 simples, qui les trouvent trop littérateurs. Rien d’ étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’esprit sont en pra
3793 d’étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréal
3794 plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche
3795 ient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouger », comme d
3796 it urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouger », comme dit fort bien M. Bre
3797 « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouger », comme dit fort bien M. Breton. Mais à condition d’aller plu
3798 , comme dit fort bien M. Breton. Mais à condition d’ aller plus loin et de prendre une connaissance positive de ce qu’il y
3799 M. Breton. Mais à condition d’aller plus loin et de prendre une connaissance positive de ce qu’il y a sous cette réalité.
3800 plus loin et de prendre une connaissance positive de ce qu’il y a sous cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le
3801 lité. Il est certain que s’ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient que le « serv
3802 ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’acco
3803 que le « service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et de discours en très beau styl
3804 mple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et de discours en très beau style contre un monde très laid
3805 de mal de tant de gesticulations, de gros mots et de discours en très beau style contre un monde très laid dont ils n’ont
3806 ctuels (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1928, p. 1410.
3807 universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1928, p. 1410.
74 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
3808 André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928 )au Ce récit de la révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud
3809 ux, Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne 
3810 928)au Ce récit de la révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne : on y voit s’affronter en quelqu
3811 oderne : on y voit s’affronter en quelques hommes d’ action les forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses r
3812 ts qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre de ces attitudes. (Elles ne sont pas essentiellement contradictoires : e
3813 entiellement contradictoires : elles représentent deux manières de sentir l’unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de
3814 ontradictoires : elles représentent deux manières de sentir l’unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individu
3815 lles représentent deux manières de sentir l’unité d’ une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinois nation
3816 x manières de sentir l’unité d’une époque obsédée d’ action.) Autour de ces individus — Chinois nationalistes ou terroriste
3817 Juifs russes méthodiques — s’émeuvent les masses de coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille au sein mê
3818 s méthodiques — s’émeuvent les masses de coolies, d’ ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille au sein même de la lut
3819 més, toute cette Chine qui s’éveille au sein même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On ret
3820 etrouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette
3821 cteurs du drame, l’aspect quotidien et mystérieux d’ une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante des villes chino
3822 l’aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fai
3823 iétante des villes chinoises, Malraux fait preuve d’ un art du détail où se révèle le vrai romancier. On serait parfois ten
3824 révèle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi p
3825 mancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus sensible. Et
3826 , admirablement objectif, est aussi, mais à coups de faits, une discussion d’idées. Il est surtout la description d’une an
3827 est aussi, mais à coups de faits, une discussion d’ idées. Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme d
3828 discussion d’idées. Il est surtout la description d’ une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoi
3829 ut la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître au cœur du m
3830 naître au cœur du monde contemporain l’absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est lui qui parl
3831 absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : « Il m
3832 nnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu
3833 raux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est
3834 ainsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Ce
3835 nchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette intelligence et cette
3836 telligence et cette sensibilité ont quelque chose de trop aigu, de dangereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer les
3837 cette sensibilité ont quelque chose de trop aigu, de dangereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer les forces détermi
3838 ’appliquent à distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au pr
3839 ts (Grasset) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1547-1548.
3840 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1547-1548.
75 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
3841 alès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928 )av L’histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On compr
3842 ère ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que ce doux-amer
3843 is ne l’ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Ennemi des Lois — son expression amoureuse du s
3844 ession amoureuse du silence et cet ensemble idéal d’ étudiant assidu aux sociétés de musique… » Barrès cherchait dans ses c
3845 cet ensemble idéal d’étudiant assidu aux sociétés de musique… » Barrès cherchait dans ses châteaux en Espagne lamentableme
3846 n Espagne lamentablement réalisés les témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demand
3847 entablement réalisés les témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander à une exis
3848 échec même ne relève pas, et qui tire sa grandeur de celle du décor ? Guy de Pourtalès n’hésite pas à baptiser son héros «
3849 rtalès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcé
3850 as à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rê
3851 rs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare
3852 t qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’ un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pourtalès a
3853 Pourtalès a su rehausser le tableau avec beaucoup d’ adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons f
3854 u rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le
3855 t de charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le jeu donne aux nuances assez troubles du personnag
3856 de. Louis II, ce chimérique, disposait par hasard de moyens d’action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur,
3857 II, ce chimérique, disposait par hasard de moyens d’ action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a
3858 a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’a
3859 ’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amo
3860 t l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’ amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étr
3861 douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’
3862 s de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’ étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à
3863 re raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il pr
3864 ans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d’illusion là où nos psychiatres proposeraien
3865 gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d’ illusion là où nos psychiatres proposeraient de moins jolis mots ; mai
3866 er d’illusion là où nos psychiatres proposeraient de moins jolis mots ; mais ce n’est pas la moindre habileté du biographe
3867 as un problème aisé : Guy de Pourtalès l’a résolu d’ une façon fort adroite mais non moins franche. av. « Guy de Pourtalè
3868 et-Roi (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1549.
3869 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1549.
76 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
3870 Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928 )aw Au hasard d’une rencontre, l’auteur de ce récit se lie avec un
3871 Le Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard d’ une rencontre, l’auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit
3872 re 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et entretient
3873 il aime à raconter certaines scènes terrifiantes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traqu
3874 le jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent les soupço
3875 e Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa mort et
3876 inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je regrette seu
3877 t connu de semblables mythomanes. Le cas méritait d’ être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se soit borné à une
3878 le, d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est d’ être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser
3879 e caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépasse celle d
3880 e celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de la mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde u
3881 ythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’ avant-garde une confusion assez tragique, parce qu’elle constitue une
3882 itue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie
3883 plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’ une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préférer un mensong
3884 un mensonge qui n’est, hélas, qu’une déformation de cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste d
3885 ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien faus
3886 aw. « Daniel-Rops : Le Prince menteur (dessins de Jacques Ernotte) (Éditions “Le Rouge et le Noir”) », Bibliothèque uni
3887 et le Noir”) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1553.
3888 universelle et Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1553.
77 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
3889 Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928 )m « Remonte aux vrais regards ! Tire-toi de tes ombres… » Paul Va
3890 1928)m « Remonte aux vrais regards ! Tire-toi de tes ombres… » Paul Valéry. Stéphane est maniaque, comme tous les jeu
3891 Stéphane est maniaque, comme tous les jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur les au
3892 ivers types humains. Mais on lui sait peu de grés de sa curiosité. Sans doute est-il trop impatient, demande-t-il aux être
3893 en, n’est-ce pas ? Il en tombe d’accord ; accepte d’ attendre comme un enfant sage que le monde lui donne, en son temps, sa
3894 lui a expliqué qu’il fallait la mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui conseille de rentrer en
3895 r quelqu’un. En d’autres termes, on lui conseille de rentrer en lui-même. « Il se ramène en soi, n’ayant plus où se prendr
3896 soi, n’ayant plus où se prendre » comme parle un de nos classiques. Repoussé par le monde parce qu’il n’est pas encore qu
3897 rche à savoir ce qu’il est. C’est une autre manie de sa génération. Mais là encore il se singularise : il n’écrit pas de l
3898 Mais là encore il se singularise : il n’écrit pas de livre pour y pourchasser un moi qui feint toujours de se cacher derri
3899 ivre pour y pourchasser un moi qui feint toujours de se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse
3900 rs. C’est pourquoi il en installe un sur sa table de travail, de façon à pouvoir s’y surprendre à tout instant. Cet exerci
3901 r dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au coin de sa
3902 x. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans l
3903 e lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire découragement ; et
3904 sentiments. Il découvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire découragement ; et beaucoup d’autr
3905 rte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui l’i
3906 pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui l’intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigu
3907 n aventure. Nous vivons dans un décor flamboyant de glaces. À chaque pas, on offre à Stéphane sa tête, son portrait en pi
3908 ête, son portrait en pied. Il se voit dans l’acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par l’asce
3909 rait en pied. Il se voit dans l’acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par l’ascenseur, elle l
3910 lise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’ angoisse qu’il la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les a
3911 qu’il est parmi les autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’importe quel passant, il se sent co
3912 s s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’importe quel passant, il se sent comme séparé de soi, et si profond
3913 e n’importe quel passant, il se sent comme séparé de soi, et si profondément différent de cette apparence, qu’il doute de
3914 comme séparé de soi, et si profondément différent de cette apparence, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses y
3915 ndément différent de cette apparence, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche un
3916 apparence, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve
3917 cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’ une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ? Il n’y a
3918 n à soi-même qui pourrait lui rendre la certitude d’ être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qui vont en dim
3919 ude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qui vont en diminuant vertigineusement et l’égarent dans sa n
3920 ans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de superstitions. Enfin cette expérience folle le mène à une découverte
3921 folle le mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout dans l’eau d
3922 ouverte sur les sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout dans l’eau des miroirs. Stéphane es
3923 prend que ce qu’on dépasse ? Et qu’il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans l’homme moderne un besoin de vérifier
3924 se voir ? Il y a dans l’homme moderne un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par l
3925 me dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est
3926 pas eu confiance. Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est. Semblablement, il ne sait p
3927 vraie, se borne à décrire l’aspect psychologique d’ une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que le lect
3928 chologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’ aspects. Il est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la craint
3929 e le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve parfois de cet
3930 la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’ un texte, trouve parfois de cette incompréhension des marques certaine
3931 aisi le sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incompréhension des marques certaines. Si le rapport intime qui
3932 rations précédentes lui échappe, qu’il y voie une de ces marques. Stéphane a oublié jusqu’au mot de prière. Orphée perd E
3933 ne de ces marques. Stéphane a oublié jusqu’au mot de prière. Orphée perd Eurydice par scepticisme, par esprit scientifiqu
3934 it scientifique, par doute méthodique, par besoin de définir, par défiance envers les dieux. À chaque regard dans notre mi
3935 e nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre :
3936 er son visage, ne serait-ce pas devenir un centre de pur esprit ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce le sol ari
3937 n centre de pur esprit ? » C’est un premier filet d’ eau vive qui perce le sol aride : mais Stéphane n’entend pas encore gr
3938 d pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre reg
3939 s. Un soir, après quelques alcools et un échange de pensées au même titre avec une amie d’une beauté de plus en plus frap
3940 un échange de pensées au même titre avec une amie d’ une beauté de plus en plus frappante, il croit saisir dans un regard d
3941 en plus frappante, il croit saisir dans un regard de cette femme l’écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeu
3942 croit saisir dans un regard de cette femme l’écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme on meurt
3943 hi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers,
3944 ais je suis ! » Un peu plus tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres ba
3945 un jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conj
3946 u Comment on perd Eurydice et soi-même », Cahiers de l’Anglore, Genève, n° 1, décembre 1928, p. 37-42.
3947 e et soi-même », Cahiers de l’Anglore, Genève, n°  1, décembre 1928, p. 37-42.
3948 e », Cahiers de l’Anglore, Genève, n° 1, décembre 1928, p. 37-42.
78 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
3949 son, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929 )ax Le critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un
3950 légèrement absurde en face d’un récit comme celui d’ Anderson : voici un homme qui raconte sa vie avec une émouvante simpli
3951 te simplicité et il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien composé. J’avoue pre
3952 il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’ un air connaisseur que c’est bien composé. J’avoue prendre cette autob
3953 onné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’ un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître s
3954 sage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître sous cet asp
3955 it pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers tomes, où il décrit des scènes de son enfance et de sa jeune
3956 ces deux premiers tomes, où il décrit des scènes de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est éto
3957 tomes, où il décrit des scènes de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant d’apparente
3958 on enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’ Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance à une
3959 esse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant d’ apparente simplicité. Le récit s’avance à une allure libre et tranquil
3960 -saxonne et peu à peu entraîne tout un branle-bas d’ évocations hautes en couleur, de rêves, de visages, tandis que ç[à] et
3961 out un branle-bas d’évocations hautes en couleur, de rêves, de visages, tandis que ç[à] et là s’ouvrent des perspectives s
3962 nle-bas d’évocations hautes en couleur, de rêves, de visages, tandis que ç[à] et là s’ouvrent des perspectives saisissante
3963 e des nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de l’invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — m
3964 nvention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui
3965 mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui sans doute le plus méridional des conteurs américains. Avec cela,
3966 onteurs américains. Avec cela, un réalisme, plein de verdeur et souvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient le cou
3967 ec cela, un réalisme, plein de verdeur et souvent d’ amertume. Mais là où d’autres placeraient le couplet humanitariste, lu
3968 autre souvenir. Qui parmi nous sait encore parler de sa mère avec cette virile et religieuse tendresse ? C’est un Chinois,
3969 cain qui viennent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait
3970 ces de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait être, avec sa verve doucement comique, si émo
3971 cette époque je croyais fortement en l’existence d’ une espèce de secrète et à peu près universelle conspiration pour insi
3972 je croyais fortement en l’existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspiration pour insister sur la l
3973 pour insister sur la laideur. “C’est une frasque de gosses à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”,
3974 e que si je m’approchais tout à coup par-derrière d’ un homme ou d’une femme quelconque, et disais “houu !” il ou elle se s
3975 approchais tout à coup par-derrière d’un homme ou d’ une femme quelconque, et disais “houu !” il ou elle se secouerait enfi
3976 nous en irions bras dessus, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais n
3977 as dessus, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le seco
3978 era pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où l’on ne sait plus cr
3979 lles, ce monde qui devient impuissant. Impossible d’ évoquer un personnage précis pour lui faire endosser le blâme, mais co
3980 endosser le blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel autre de mon temps
3981 t, a contribué davantage que n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pou
3982 l pas être considéré un jour comme le grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de
3983 dre impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéq
3984 sûr tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spéc
3985 sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les ancie
3986 servassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour
3987 (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1929, p. 123-124.
3988 e universelle et Revue de Genève, Genève, janvier 1929, p. 123-124.
79 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
3989 lles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929 )r 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Bel
3990 es, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)r 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lett
3991 r 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles
3992 s-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réput
3993 des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettre
3994 lcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que dans la mesure où
3995 sure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essentiellement un
3996 poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essentiellement une mystique.
3997 entiellement une mystique. Mais parce que je suis de sang-froid, je ne puis dire grand-chose de plus. On ne se comprend bi
3998 eunes hommes ivres. Mais alors point n’est besoin de formuler cette ivresse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes l
3999 muler cette ivresse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes les erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettr
4000 que pour mourir ou pour entrer en religion : rond de cuir ou poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à l
4001 on : rond de cuir ou poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettrie
4002 triens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ont pas cru, c’est qu’ils sont fon
4003 pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne ont encore une « essence ». Celle
4004 e monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à l’Éternel et à Satan pareillem
4005 t ceux qu’elle enivre entrent en état de grâce ou de blasphème, selon. Mais ce qui importe d’abord, n’est-ce point de se l
4006 elon. Mais ce qui importe d’abord, n’est-ce point de se livrer, purement et simplement. 7. (Secret). r. « Belles-Lettres
4007 st-ce point de se livrer, purement et simplement. 7. (Secret). r. « Belles-Lettres, c’est la clef des champs… » [Réponse
4008 es champs… » [Réponse à l’enquête sur l’« Essence de Belles-Lettres »], Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
4009 quête sur l’« Essence de Belles-Lettres »], Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, janvier 192
4010 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  1, janvier 1929, p. 78-79.
4011 Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, janvier 1929, p. 78-79.
80 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
4012 Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)s Prison Prisonnier de la nuit mais plus libr
4013 Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929 )s Prison Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’un ange pri
4014 le de jour (mars 1929)s Prison Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre
4015 s Quand la nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’ une saison morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence
4016 on morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est f
4017 leurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’ été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour
4018 comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un grand été   qui consent…
4019 d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un grand été   qui consent… Ailleurs Colo
4020 ent dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’ un grand été   qui consent… Ailleurs Colombes lumineuses des ma
4021 ent… Ailleurs Colombes lumineuses des mains de mon amour écloses voyageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez
4022 es mains de mon amour écloses voyageuses ah ! que d’ aucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est
4023 ucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’on meurt. Étoil
4024 res rivages où mieux qu’ici l’on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons glissent et rient c’est
4025 rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante
4026 e l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l
4027 le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’ un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un
4028 issance L’étoile qui l’accueille au sommet ravi d’ un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce D
4029 eille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’ une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœu
4030 lence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintille
4031 œur éclatant du jour scintillera l’invisible gage d’ un amour perdu. s. « Prison. Ailleurs. Étoile de jour », Revue de
4032 n amour perdu. s. « Prison. Ailleurs. Étoile de jour », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
4033 s. « Prison. Ailleurs. Étoile de jour », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 5, mars 1929,
4034 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  5, mars 1929, p. 168-170.
4035 s, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 5, mars 1929, p. 168-170.
81 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
4036 Souvenirs d’ enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)t Quand avec
4037 Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)t Quand avec un air fin m
4038 enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929 )t Quand avec un air fin mais un ton convaincu l’on a répété dans u
4039 peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’ esprit ou de méchanceté, assuré que l’on est désormais d’être absous a
4040 ettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que l’on est désormais d’être absous avec le souri
4041 t ou de méchanceté, assuré que l’on est désormais d’ être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes,
4042 par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Am
4043 entèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Amiel, Godet
4044 librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Amiel, Godet restera l’u
4045 ou de première communion. Parmi les compatriotes d’ Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à se connaître et q
4046 rai, s’y prêtait, peu complexe et comme réduite à deux dimensions ; la conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexist
4047 ue fort alerte. Jugez-en à la façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés avec son mérite ». Il ajou
4048 vec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes propres l
4049 lière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise qu
4050 esse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capi
4051 onomie bourgeoise que cette administration exacte d’ un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en de
4052 istration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles.
4053 souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d’ âme qu’on y cherche, mais l’anecdote bien tournée, des noms connus. To
4054 ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair. Et de rêve. Est-ce qu’en ce temps-là on ne se nourrissait vrai
4055 élégant. Mais comme tout cela manque de chair. Et de rêve. Est-ce qu’en ce temps-là on ne se nourrissait vraiment que de p
4056 ’en ce temps-là on ne se nourrissait vraiment que de petits mots d’esprit et de malices ? Noisettes et cornichons ? t. «
4057 on ne se nourrissait vraiment que de petits mots d’ esprit et de malices ? Noisettes et cornichons ? t. « Souvenirs d’en
4058 urrissait vraiment que de petits mots d’esprit et de malices ? Noisettes et cornichons ? t. « Souvenirs d’enfance et de
4059 ices ? Noisettes et cornichons ? t. « Souvenirs d’ enfance et de jeunesse, par Philippe Godet », Revue de Belles-Lettres,
4060 tes et cornichons ? t. « Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neu
4061 fance et de jeunesse, par Philippe Godet », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 6, avril 1929,
4062 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  6, avril 1929, p. 199.
4063 , Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 6, avril 1929, p. 199.
82 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
4064 Panorama de Budapest (23 mai 1929)b Passer de Vienne à Budapest, c’est, en six
4065 Panorama de Budapest ( 23 mai 1929)b Passer de Vienne à Budapest, c’est, en six heures d’exp
4066 Panorama de Budapest (23 mai 1929 )b Passer de Vienne à Budapest, c’est, en six heures d’express, cha
4067 Panorama de Budapest (23 mai 1929)b Passer de Vienne à Budapest, c’est, en six heures d’express, changer totalement
4068 1929)b Passer de Vienne à Budapest, c’est, en six heures d’express, changer totalement d’atmosphère, passer de la lassi
4069 Passer de Vienne à Budapest, c’est, en six heures d’ express, changer totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la
4070 ’est, en six heures d’express, changer totalement d’ atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté jol
4071 ’express, changer totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre p
4072 mosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’ une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’un scepticisme poli
4073 ’une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’ un scepticisme poli à une excitation agressive. La simple visite des c
4074 La simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit à vous en donner la sensation : ce que vous pour
4075 sation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression. Vienne 
4076 on. Vienne : assis sur les banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des cafés débordants de crème,
4077 loges, les clients dégustent des cafés débordants de crème, avec une apathie qu’aucun orchestre ne vient troubler, aucune
4078 tastrophe imminente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en gros
4079 nsfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien par s
4080 finira bien par s’arranger, comme au dernier acte d’ une opérette. Ce peuple s’est résigné avec une facilité incroyable à l
4081 spondre à son état d’esprit le plus naturel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides, qui passent des aprè
4082 es, qui passent des après-midi entiers devant les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire des po
4083 ent des après-midi entiers devant les deux verres d’ eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout
4084 nt les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essuyant une moustache de cr
4085 à lire des potins tout en essuyant une moustache de crème fouettée ? Budapest : une vague de musique tzigane vous emporte
4086 oustache de crème fouettée ? Budapest : une vague de musique tzigane vous emporte dès l’entrée. Un violon vient vous siffl
4087 ous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’ une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus
4088 s d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de
4089 ssus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulades d’un cymbalum. Aux
4090 sa voix profonde et passionnée, sous les roulades d’ un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie,
4091 balum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les porte
4092 pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! j
4093 « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout de noir vêtus, belles femmes aux voix agréablement rauques… Sortez pour
4094 , la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause d
4095 le… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de la font
4096 n, jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les
4097 vie les bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vivement les trams qui s
4098 s qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d’ insectes affolés. Les maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’
4099 Les maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’ affiches rouges et jaunes et d’inscriptions cascadantes, à l’orientale
4100 tes du haut en bas d’affiches rouges et jaunes et d’ inscriptions cascadantes, à l’orientale (on pense au mot bazar, qui so
4101 jaune aussi). Soudain se dresse une énorme maison de pierre brune, puis une banque en style hongrois, façade aux grandes l
4102 açade aux grandes lignes verticales, peinturlurée de bleu, d’or et de violet. Puis une rue de pierre grise toute boursoufl
4103 grandes lignes verticales, peinturlurée de bleu, d’ or et de violet. Puis une rue de pierre grise toute boursouflée de pré
4104 lignes verticales, peinturlurée de bleu, d’or et de violet. Puis une rue de pierre grise toute boursouflée de prétentions
4105 turlurée de bleu, d’or et de violet. Puis une rue de pierre grise toute boursouflée de prétentions munichoises. Puis un pa
4106 t. Puis une rue de pierre grise toute boursouflée de prétentions munichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est le Par
4107 prétentions munichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement a
4108 uée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre énormes ponts de fer. Contre leurs piles, en hiver, viennent se brise
4109 olidement amarrée à Pest par quatre énormes ponts de fer. Contre leurs piles, en hiver, viennent se briser avec un fracas
4110 viennent se briser avec un fracas sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophète chauve
4111 glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de St-Gellert. Elle tom
4112 e. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans le Danube, f
4113 de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans le Danube, froide et n
4114 on amiral régent et ses gardes blancs aux casques d’ or s’avance en proue, dominant superbement cette ville désordonnée. De
4115 sont des rues silencieuses, provinciales, bordées de petits palais à un étage, clos, secrets, abandonnés. Et des crémeries
4116 a chez des gens qui vous ont reçu comme un cadeau de Dieu, — c’est leur formule de salutation — vous constatez que cette p
4117 eçu comme un cadeau de Dieu, — c’est leur formule de salutation — vous constatez que cette profusion de liqueurs légères f
4118 e salutation — vous constatez que cette profusion de liqueurs légères facilite singulièrement les rapports sociaux. On vou
4119 s vous êtes levé, comme tout le monde, à l’entrée d’ un des archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le retour d’un
4120 . Car ce peuple, seul en Europe, attend le retour d’ un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi des gens q
4121 ropéen ne sait le faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent tourbillonnantes et finissent en ch
4122 finissent en chutes ivres sur des divans couverts de coussins Rothermere et Grande Hongrie… Ivresse dans le malheur, passi
4123 spoirs presque puérils et nostalgie des grandeurs de naguère, tout cela compose un visage romantique et ardent dont le voy
4124 voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’ une passion poétique un peu folle… b. « Panorama de Budapest », Jour
4125 ne passion poétique un peu folle… b. « Panorama de Budapest », Journal de Genève, Genève, n° 138, 23 mai 1929, p. 1-2.
4126 peu folle… b. « Panorama de Budapest », Journal de Genève, Genève, n° 138, 23 mai 1929, p. 1-2.
4127 rama de Budapest », Journal de Genève, Genève, n°  138, 23 mai 1929, p. 1-2.
4128 de Budapest », Journal de Genève, Genève, n° 138, 23 mai 1929, p. 1-2.
4129 pest », Journal de Genève, Genève, n° 138, 23 mai 1929, p. 1-2.
83 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
4130 Jules Supervielle, Saisir (juin 1929 )ay Ce petit livre de poèmes est comme une initiation au silence. I
4131 pervielle, Saisir (juin 1929)ay Ce petit livre de poèmes est comme une initiation au silence. Il faut s’en approcher av
4132 isser créer en nous son silence particulier avant d’ entendre les signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux s
4133 ropose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu d’ images (à peine quelques « motifs », objets usuels et usés, sur la nua
4134 tifs », objets usuels et usés, sur la nuance mate d’ un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de l’
4135 nois). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache att
4136 décrit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur
4137 mmobile et sache attendre que ton cœur se détache de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’âme quitte, redevient
4138 minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et l’âme peut enfin «
4139 une autre lumière : « Tout semblait vivre au fond d’ un insistant regard. » Le poète des Gravitations est ici descendu plus
4140 itre ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisis
4141 e » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’approche d’ un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le vain débat d
4142 pressenti, qui s’impose, qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et cela fait un v
4143 Saisir (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1929, p. 762-763.
4144 èque universelle et Revue de Genève, Genève, juin 1929, p. 762-763.
84 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
4145 La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)n « Je lui ai raconté qu’il habite une
4146 La tour de Hölderlin ( 15 juillet 1929)n « Je lui ai raconté qu’il habite une chaumière au b
4147 La tour de Hölderlin (15 juillet 1929 )n « Je lui ai raconté qu’il habite une chaumière au bord d’un ruis
4148 nt des heures récite des odes grecques au murmure de l’eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il
4149 l’eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’ un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plu
4150 ’apparaît comme une chose si douce et si grande… » 11 Et Bettina terminant sa lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a
4151 ont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin, mais i
4152 ’attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendre par un sot que par un fou. » L’hiver dernier, m’o
4153 u. » L’hiver dernier, m’occupant assez longuement d’ un des poètes auxquels notre temps doit vouer l’attention la plus grav
4154 ion la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains d
4155 à tenter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujou
4156 nt un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellen
4157 où tant de voix l’appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ? Cette langue de feu qui s’est po
4158 s’attendre au don du langage sacré ? Cette langue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui l’a consumé… Digne ? — Un ad
4159 ui l’a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait sagement des odes à la liberté… Et voici dans
4160 t du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être f
4161 dant leurs flammes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L
4162 e premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de Madame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuvre. Car ce
4163 n œuvre. Car ce poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur
4164 poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, —  d’ une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par
4165 ité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encore quelqu
4166 feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802  : au moment où meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans la r
4167 au moment où meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’ elle (dans la région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ;
4168 ima, Hölderlin errant loin d’elle (dans la région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup l’en
4169 (dans la région de Bordeaux croit-on), est frappé d’ insolation ; sa folie d’un coup l’envahit. C’est une sorte de vieillar
4170 aux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’ un coup l’envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allema
4171 n ; sa folie d’un coup l’envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et durant trente années, ce pauv
4172 de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et durant trente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans la petite tour de Tubing
4173 pauvre corps abandonné vivra dans la petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement, inexplicablemen
4174 rès doucement, inexplicablement, une vie monotone de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce q
4175 ne aux visiteurs venus pour contempler la victime d’ un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je suis descend
4176 ime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de la ma
4177 peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai vite déco
4178 endant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à
4179 eure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté d’un
4180 vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté d’ un « Hypérion ». En cherchant, je trouverais bien aussi un « Nietzsche
4181 vers l’eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’ une longue île, des étudiants au crâne rasé se promènent un roman jaun
4182 à la main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un
4183 e, dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille
4184 e de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille maison souabe, hauts e
4185 chers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille maison souabe, hauts et sombres, qui paraîtr
4186 sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille maison souabe, hauts et sombres, qui paraîtraient immenses s’
4187 traient immenses s’ils n’étaient à demi encombrés d’ armoires. Un couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propri
4188 ? — (et comme je considère un ravissant médaillon de marbre) — Ça, c’est Diotima. » On rougirait à moins. — « Je ne puis p
4189 » On rougirait à moins. — « Je ne puis pas parler de lui, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt l’on se met à ra
4190 menade, et le guide désigne familièrement l’image d’ une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois peti
4191 d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe q
4192 par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur l
4193 mystère de l’amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ; le jardinet avec s
4194 passait des heures à cette fenêtre, à marmotter. Vingt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’eau et cette complainte de
4195 Vingt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fi
4196 ambre, avec le bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvre… L’agrément de ce monde
4197 complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeun
4198 puisé après un grand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemp
4199 L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. A
4200 en, je n’aime plus vivre. Il y avait encore plus de paix que maintenant. La grande allée sur l’île n’existait pas, en fac
4201 s. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre côté de l’eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans
4202 prairies et des collines basses, de l’autre côté de l’eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la v
4203 et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plaint
4204 et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais le gar
4205 . Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts
4206 l ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts d
4207 vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4 … Une rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts de l’
4208 fée entre des maisons pointues et les contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au prof
4209 je vois s’y engager chaque jour le fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme Tubingue le secr
4210 ène doucement dans cette calme Tubingue le secret d’ une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent
4211 ui montent au Séminaire protestant : il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse
4212 de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’ une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À
4213 La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’orch
4214 e café au bord du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz et
4215 ringues charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tourn
4216 ime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureusement, les dents serrées. (« Weg zur Kraf
4217 pas bien ramer et qui lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des ad
4218 lafrés font des signes énergiques à une compagnie de cavaliers qui passe devant la statue d’Eberhard le Barbu. Des bourgeo
4219 compagnie de cavaliers qui passe devant la statue d’ Eberhard le Barbu. Des bourgeois se rient contre par-dessus leurs chop
4220 tout cela existe dans le même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions naïves.) Lui aussi a vécu dans
4221 dans le même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions naïves.) Lui aussi a vécu dans cette ville, tou
4222 t seuls… Et puis, il lui est arrivé quelque chose de terrible, où il a perdu son âme. Et puis il n’est revenu qu’un vieux
4223 out le monde s’accorde à trouver malsain ce genre de tentatives : cela ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent la
4224 a tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de
4225 i veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dan
4226 geois cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais que
4227 la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du médiocre
4228 âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du médiocre dont ils se sentent bénéficiai
4229 mme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus
4230  » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et d
4231 ambre, où pénètre la facilité atroce de cette fin d’ après-midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et d’eau… elle es
4232 fin d’après-midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et d’eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un
4233 midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et d’ eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un des deux soi
4234 t tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un des deux soit absurde, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le trag
4235 urs… Faut-il donc que l’un des deux soit absurde, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facili
4236 des à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle
4237 à beau fixe. Pourquoi troubler le miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? Est-ce qu’ils ne sou
4238 our leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse où ils ont cru pressentir de grandes choses généreuses
4239 emaine de leur jeunesse où ils ont cru pressentir de grandes choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et l’amour, to
4240 ru pressentir de grandes choses généreuses autour d’ eux… Cela s’oublie. Et l’amour, tout justement, nous fait comprendre,
4241 e : déjà je leur échappe — je t’échappe ô douceur de vivre ! Tout redevient autour de moi insuffisant, transitoire, allusi
4242 allusif. Tout se remet à signifier l’absence. 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il était précepte
4243 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est la Diotima de l’Hypérion e
4244 iotima de l’Hypérion et des poèmes. n. « La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n° 18,
4245 Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n°  18, 15 juillet 1929, p. 354-356.
4246 zaine artistique et littéraire, Neuchâtel, n° 18, 15 juillet 1929, p. 354-356.
4247 tique et littéraire, Neuchâtel, n° 18, 15 juillet 1929, p. 354-356.
85 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
4248 Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929 )az Après cet austère Pays qui n’est à personne paru l’année derniè
4249 éger, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses
4250 res avec lesquels il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien
4251 te pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’ oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui
4252 fait les mêmes, des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en doutent… C’est un dévergondage sentimental,
4253 doutent… C’est un dévergondage sentimental, plein de malices et d’envies de pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois da
4254 un dévergondage sentimental, plein de malices et d’ envies de pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les maisons
4255 gondage sentimental, plein de malices et d’envies de pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les maisons des gran
4256 ais bien vite un intermède bouffon, impossible et d’ une désopilante poésie nous replonge dans une atmosphère autre, où les
4257 es personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet air dangereux et tendre que prennent les hommes e
4258 ages du livre, un peu amers… On voudrait un livre de Cassou qui ne serait fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci d
4259 oudrait un livre de Cassou qui ne serait fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci de vraisemblance extérieure ; qui
4260 ou qui ne serait fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci de vraisemblance extérieure ; qui ne serait qu’invention,
4261 it fait que de ces intermèdes ; pur de tout souci de vraisemblance extérieure ; qui ne serait qu’invention, qui inventerai
4262 nvention, qui inventerait sa vérité. Ce serait un de ces miracles de liberté dont nous avons besoin pour croire que le mon
4263 venterait sa vérité. Ce serait un de ces miracles de liberté dont nous avons besoin pour croire que le monde actuel n’est
4264 as un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces petites
4265 re, beaucoup de ces petites merveilles qui valent de gros romans « bien faits ». Car il y a toujours assez de vérité dans
4266 romans « bien faits ». Car il y a toujours assez de vérité dans une histoire où il y a de la poésie. az. « Jean Cassou 
4267 jours assez de vérité dans une histoire où il y a de la poésie. az. « Jean Cassou : La Clef des songes (Émile-Paul, Pari
4268 Paul, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 248-249.
4269 èque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 248-249.
86 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
4270 dré Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929 )ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yo
4271 eignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’
4272 ue de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’ un demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie le jour. Cela pou
4273 étation voie le jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le génie « poétique » français… Mais non
4274 français… Mais non, nous préférons voir ici l’un de ces signes qui de toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans la
4275 signes qui de toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que
4276 pirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il es
4277 èse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réf
4278 ur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps
4279 Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite hont
4280 vidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui sont encore ca
4281 pour faite honte à ceux qui sont encore capables d’ une telle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être le plus mo
4282 ceux qui sont encore capables d’une telle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être le plus monstrueusement pur q
4283 eusement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa pr
4284 é par cet enthousiasme sacré que requiert l’œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une question
4285 ssi centrale — qui est, si l’on veut, la question d’ Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’inte
4286 on d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rim
4287 baud ? Si Claudel s’est montré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à l’état sauvage », un catholique qui s’ignore, i
4288 olique qui s’ignore, il n’est pas plus admissible d’ inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la
4289 il n’est pas plus admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangéli
4290 évélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’ une confusion bien française, hélas. ba. « André Rolland de Renévill
4291 reil, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conser
4292 èque universelle et Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, conformément au texte o
87 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
4293 Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre
4294 Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929 )bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre position dans un débat o
4295 ternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées o
4296 les avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse
4297 les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que
4298 ue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contr
4299 e de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de
4300 t que reprendre la défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort dés
4301 bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes
4302 gner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes tous désormais de répond
4303 da, et l’obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à sa mise en demeure. Je suis loin de partag
4304 emeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me sens bie
4305 son tour quand il tire argument contre une thèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans l’ordre moral ». Et quand c
4306 nd il tire argument contre une thèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans l’ordre moral ». Et quand cela serait !
4307 t, de plus impertinents que moi ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans l
4308 ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exa
4309 re observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que l
4310 a un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue de la raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de
4311 nante tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classe
4312 mme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer choses et i
4313 t-à-dire fausses mais claires, qui lui permettent de triompher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de la difficulté e
4314 qui lui permettent de triompher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que
4315 riompher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adres
4316 e. Mais pour gênante que soit souvent son adresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’audace tranquille et admira
4317 pas nous masquer l’audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimoderne, parce que désintéressé. C’
4318 re, c’est l’impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui deman
4319 sible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’ avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible.
4320 e croirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de la pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de dro
4321 emporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite et de gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui
4322 butte aux sarcasmes des extrémistes de droite et de gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent
4323 et de gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent l’esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et D
4324 ons sont exactement celles qu’il fallait attendre de ces auteurs. Ce qu’on ne viendra pas disputer à M. Benda, c’est son d
4325 ndra pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de la vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un mon
4326 ent à un rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M.
4327 . Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1
4328 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927 ) et la réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La F
4329 de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La Fin de l’Éternel (N
4330 décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1928 ). bc. « Julien Benda : La Fin de l’Éternel (NRF) », Bibliothèque uni
4331 enda (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La Fin de l’Éternel (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
4332 ternel (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1929, p. 638-639.
4333 universelle et Revue de Genève, Genève, novembre 1929, p. 638-639.
88 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
4334 e social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929 )u L’ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les
4335 Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ ailes. Allait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre
4336 le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’ un romantisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant le jeune homme
4337 euses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’ un mauvais goût ! Cependant le jeune homme agitait ses ailes non sans
4338 iles non sans une ingénue fierté. Mais au courant d’ air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi,
4339 ourant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’
4340 inconsolables, ô sans cœur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point c
4341 vers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses ailes. O
4342 t céder : il fit couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jou
4343 Dieu, dans sa pitié, leur envoya un ange porteur d’ une solution fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand R
4344 le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent point à s’élever de toutes parts. Les uns défendaie
4345 ie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qu
4346 plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît u
4347 nom d’une secte orientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l
4348 dent. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L’inspiration Comme le poète terminait sa
4349 Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un fi
4350 ïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une crèmerie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant i
4351 rivit, en sortant de là, dans une crèmerie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde ass
4352 Ayant demandé un timbre pour attirer l’attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et
4353 usable de la part d’un poète en état, sans doute, d’ inspiration. Je trouve dans une enveloppe qu’hier vous m’adressâtes un
4354 veloppe qu’hier vous m’adressâtes une déclaration d’ amour destinée à une femme blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’e
4355 tion est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enchaînés. » Cette histoire, en effet, lui v
4356 re social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, novembre 19
4357 s-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n°  1, novembre 1929, p. 25-27.
4358 ausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, n° 1, novembre 1929, p. 25-27.
89 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Avant-propos
4359 ne bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à pei
4360 écrire en quarante petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre
4361 que. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruc
4362 r ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considè
4363 Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises
4364 je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfan
4365 s thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roor
4366 Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’ Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appau
4367 ue la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que
4368 t, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué e
4369 ens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein
4370 . J’apporte un témoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me
4371 tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tou
4372 me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de beaucoup d’autr
4373 out ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je ressemble. Nous vivons sous un
4374 à sécrétion socialiste qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et t
4375 et toléré malgré leur mauvaise humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’instruction publique et grâce à elle p
4376 e existence. Je l’ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, par
4377 reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui sout
4378 lus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’ être complices dans cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
4379 à-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’ aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les
4380 jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argum
4381 gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pa
4382 rde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce
4383 oser une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
4384 ée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’ en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçois là-bas, vautré derriè
4385 dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute,
4386 els, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’excellenc
4387 ève pour mettre en doute l’excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êt
4388 ndique un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même c
4389 iente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souvent nos tolérants par
4390 ants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en
4391 je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories
4392 te sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêche
4393 le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces arguments, bien que dûment prévus et réduits à néant
4394 prévus et réduits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. R
4395 si, ceux qui croient aux faits. Je leur réponds : qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils n
4396 réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur sceptic
4397 e peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeu
4398 r ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser
4399 ant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à l’efficace
4400 dées, m’accuser de faire une critique dangereuse. que néanmoins je crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religi
4401 angereuse. 3° que néanmoins je crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Ch
4402 certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d
4403 des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller
4404 as de le dire : l’instruction publique.) Résumé : On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2°
4405 ’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’ aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui ri
4406 ller contre l’époque, et on le peut efficacement. Rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du type : vous êtes un rét
4407 infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’ une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à ces excès de
4408 gressiste et tolérante qui se livrent à ces excès de langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet
4409 s de langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la qu
4410 es renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Ce
4411 ect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussio
4412 fet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les princip
4413 ts et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs rai
4414 gements, même violents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du f
4415 cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est p
4416 ue dans ses réalisations actuelles, puis au terme de ce recensement lamentable, je poserai la question de savoir si tant d
4417 ce recensement lamentable, je poserai la question de savoir si tant de laideurs et d’outrages au bon sens peuvent être lég
4418 erai la question de savoir si tant de laideurs et d’ outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre
4419 bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement pas mentionner
4420 és par le but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiqu
4421 les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
90 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 1. Mes prisons
4422 1. Mes prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souven
4423 des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les
4424 de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez
4425 x de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’«
4426 er de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de la tâche des inst
4427 nous faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, e
4428 au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et grammaticales, où tout retombait dro
4429 es, et grammaticales, où tout retombait droit… Et de ces beaux problèmes d’arithmétique où il fallait si soigneusement sép
4430 ù tout retombait droit… Et de ces beaux problèmes d’ arithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du rai
4431 ur emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux ), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après combi
4432 es deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’ occupation), (après combien d’heures…) ; et il y avait toujours des ap
4433 r ensemble), (drôle d’occupation), (après combien d’ heures…) ; et il y avait toujours des appartements à meubler. Et on mu
4434 aire ici du sentiment, je suis sensible au charme de cette fantaisie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quin
4435 taisie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomad
4436 s bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadaires, et une semonce à nous
4437 monce à nous gâter toute une journée. Une journée d’ enfance gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du m
4438 embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait b
4439 nce à gratter son ardoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’en
4440  ? Mais l’enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tent
4441 l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’ une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuses, avec des ennemi
4442 des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’ Indiens, des petites guerres mystérieuses, avec des ennemis et des all
4443 alliés imaginaires, des jeux en cachette, odeurs de peaux, comme dans un rêve, des matins de dimanche sonores et tout pro
4444 , odeurs de peaux, comme dans un rêve, des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue
4445 s de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’ huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gr
4446 anche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement
4447 nores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des chos
4448 asse beau demain, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne
4449 el Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuill
4450 incertaine, un peu sale et un peu divine, baignée d’ une très vague angoisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans le
4451 omenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’
4452 de longs pas réguliers… L’École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureuse2. Deux angoisses domin
4453 souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ho
4454 ît chaque jour, je pense que tout cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’avais appris à lire, en cachette
4455 ut cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’avais appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée. L’année
4456 même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’ illustrer par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule
4457  ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’ innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes première
4458 brables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avai
4459 formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne mont
4460 de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse p
4461 oué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’ originalité. Mais pour être rentrée, ma colère n’en fut que plus malfa
4462 lfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même à caus
4463 isante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même à cause d
4464 profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’ évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être éga
4465 te donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fo
4466 nc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois de
4467 le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatr
4468 ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, e
4469 les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus,
4470 hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre , c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus, toutes
4471 fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus, toutes choses égales d’ailleurs, dans un
4472 is un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’habituer à cette
4473 peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je me posai la
4474 vissement. Je songeai aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’éducati
4475 tres quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manue
4476 sprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisati
4477 dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut pa
4478 ratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuit
4479 iques, qui sont une généralisation de la règle de trois , aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : d
4480 uites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on av
4481 moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’ esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé e
4482 sez de verdeur d’esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte e
4483 empire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le
4484 avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitr
4485 us ces ressorts de la révolte et de la libération d’ une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens d
4486 ation d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix
4487 l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était d
4488 ens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux « immorte
4489 ié, si évident, si parfaitement soumis aux règles d’ une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait
4490 ur lequel on nous préparait —, c’était un système d’ abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des e
4491 s et rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder pa
4492 ennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’ un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont ét
4493 oder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission
4494 mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières » comme celles qui touchent à l’action des
4495 e trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisa
4496 qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre hist
4497 ence appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l
4498 out au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel.
4499 et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ ouvrier est l’égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous
4500 iel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’ un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de croire qu
4501 Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas
4502 rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matériellement délivré, en su
4503 as plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma
4504 s mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie
4505 riles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans
4506 e contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide
4507 c les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en
4508 n silence, un vide. C’était en dehors de la vie. 3. du pain rassis.
91 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 2. Description du monstre
4509 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver
4510 ption du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai aussi plusieur
4511 ce militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’anciens c
4512 ités. J’y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’ anciens camarades d’école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’en
4513 aussi plusieurs têtes connues d’anciens camarades d’ école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’autant mie
4514 imaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’ autant mieux qu’on était devenus plus différents. Car ces différences
4515 s. Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable
4516 ougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de
4517 ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’un à l’autre il n’y a pas de solution de continuité, la différence
4518 u’un instituteur : de l’un à l’autre il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’étant qu’une question d’âge,
4519 teur : de l’un à l’autre il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’étant qu’une question d’âge, non d’expéri
4520 continuité, la différence n’étant qu’une question d’ âge, non d’expérience vécue. Ce que je vais dire est sans doute injust
4521 la différence n’étant qu’une question d’âge, non d’ expérience vécue. Ce que je vais dire est sans doute injuste et faux d
4522 s doute injuste et faux dans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’unif
4523 ès grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son inco
4524 ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’ être consciencieux, à une façon blessante d’être supérieur, à une faço
4525 dante d’être consciencieux, à une façon blessante d’ être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une fa
4526 blessante d’être supérieur, à une façon livresque d’ expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces di
4527 que d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouv
4528 teurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils
4529 de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsa
4530 t pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’ appartenir à une élite responsable, cela se voit de loin. Il faut dire
4531 ’appartenir à une élite responsable, cela se voit de loin. Il faut dire que ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils mépris
4532 isent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ironie paysanne
4533 s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauff
4534 ait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’ insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armé
4535 nuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des
4536 des manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand
4537 en mauvais français — et je ferais de la peine à d’ excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand on vous parle
4538 lage, quand on vous parle avec respect et trémolo d’ un môssieu très instruit, vous êtes presque certain qu’il s’agit d’un
4539 instruit, vous êtes presque certain qu’il s’agit d’ un de ces cuistres pédants qu’on aime rencontrer dans des farces où il
4540 ruit, vous êtes presque certain qu’il s’agit d’un de ces cuistres pédants qu’on aime rencontrer dans des farces où ils son
4541 violette, périodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue de quelque instrument. Il a des idées modernes sur t
4542 ment, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue de quelque instrument. Il a des idées modernes sur tous les sujets, espé
4543 articuliers : cheveux longs, regard profond voilé de douceur. Car le type populaire du poète romantique s’est dégradé en d
4544 pe populaire du poète romantique s’est dégradé en deux sous-types posthumes : l’artiste photographe et le régent. J’ai fait
4545 allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut trait
4546 ui veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait cou
4547 ssionnelle. J’en connaissais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater le
4548 aissais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de
4549 qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section,
4550 avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je
4551 t coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saur
4552 garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi
4553 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mene
4554 ous en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit
4555 urs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprèg
4556 , ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Num
4557 ttire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.)
4558 t toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sympathique
4559 si sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel q
4560 este dans l’école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être soigné au même titre que certaines autre
4561 telle. C’est celle même du régime. l’architecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’une façon frappante ce qu’il y
4562 chitecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’ une façon frappante ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la
4563 s ». symbolise d’une façon frappante ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde.
4564 ne façon frappante ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pir
4565 ue du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucoup d’ enfants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son
4566 st pire encore. Beaucoup d’enfants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de
4567 on de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corrido
4568 de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des éc
4569 orte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’ urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste
4570 —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre vie, citoyens 
4571 ses crottes de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre vie, citoyens ! Et vous pensez que c’est un grand pro
4572 de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre vie, citoyens ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur l
4573 Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’ un tel milieu, moral et matériel ? L’école publique, telle que nous la
4574 us la voyons est semblable à tous ces monuments «  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècl
4575 té, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un style ; c’est
4576 ue le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
92 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 3. Anatomie du monstre
4577 3. Anatomie du monstre Ayant épanché un peu de ma rancune, à seule fin
4578 Ayant épanché un peu de ma rancune, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre l’instructio
4579 in de montrer pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera pas ces raison
4580 absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’ un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse passer un
4581 que je fasse passer un petit examen aux principes de cette institution passionnément détestée. Vous allez voir comme il ba
4582 sonnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-
4583 he point l’équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque. L’esprit d’équité, avec son préjugé paci
4584 défendez de parti pris ce que j’attaque. L’esprit d’ équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’esprit de véri
4585 son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la v
4586 esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tien
4587 à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficulté dans l’
4588 consiste à repousser la difficulté dans l’avenir, d’ une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et nous voic
4589 à repousser la difficulté dans l’avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec l’hé
4590 mps elle s’aggrave, et nous voici avec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est tellement e
4591 elle s’aggrave, et nous voici avec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est tellement embrouillé
4592 e, et nous voici avec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est tellement embrouillé que déj
4593 tellement embrouillé que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus g
4594 nerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni l
4595 e n’atteignent dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques. Le progr
4596 i les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’horaire : c’est un cad
4597 étéroclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arithmétique ; de 9 à 10 composition, etc. Ces disciplines se s
4598 roclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arithmétique ; de 9 à 10 composition, etc. Ces disciplines se suc
4599 ites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arithmétique ; de 9 à 10 composition, etc. Ces disciplines se succède
4600 à leurs qualités propres. De 8 à 9 arithmétique ; de 9 à 10 composition, etc. Ces disciplines se succèdent sans transition
4601 eurs qualités propres. De 8 à 9 arithmétique ; de 9 à 10 composition, etc. Ces disciplines se succèdent sans transition,
4602 qualités propres. De 8 à 9 arithmétique ; de 9 à 10 composition, etc. Ces disciplines se succèdent sans transition, dans
4603 ortuit, de manière à prévenir toute concentration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bi
4604 prévenir toute concentration de l’esprit. b) plan d’ études. On a divisé l’enseignement en branches bien distinctes. On att
4605 stinctes. On attribue à chacune un certain nombre d’ heures par semaine, au jugé. On s’arrange à faire tenir dans cette cla
4606 tenir dans cette classification le plus possible de « connaissances » qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et l
4607 ntiques pour tous les écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la s
4608 ers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout
4609 mentaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi large que si
4610 Remarquons qu’il suffit pour établir ce programme de disposer d’une ou deux feuilles de papier, d’un crayon et d’une règle
4611 u’il suffit pour établir ce programme de disposer d’ une ou deux feuilles de papier, d’un crayon et d’une règle (pour divis
4612 it pour établir ce programme de disposer d’une ou deux feuilles de papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser la page
4613 r ce programme de disposer d’une ou deux feuilles de papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser la page en casiers r
4614 mme de disposer d’une ou deux feuilles de papier, d’ un crayon et d’une règle (pour diviser la page en casiers rectangulair
4615 d’une ou deux feuilles de papier, d’un crayon et d’ une règle (pour diviser la page en casiers rectangulaires, bien propre
4616 , bien proprement.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en auc
4617 ntaires. Mais il n’est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences
4618 ns voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’ adaptation de l’enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines 
4619 ue l’on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diver
4620 ompte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoi
4621 daptation de l’enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins ; enfin des rythmes nat
4622  ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit hum
4623 iversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à
4624 eux. D’ailleurs, les enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse l’esprit de ces enfa
4625 s plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse l’esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas. Les exa
4626 ndes épreuves cyclistes. Les participants du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque trimestre. Ceux qui arr
4627 ts du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque trimestre. Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’
4628 herie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies » par le
4629 ertant s’explique justement par cette psychologie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas
4630 ut à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens. « Les examens fau
4631 ens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maîtres prima
4632 ires. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordo
4633 travail, qualité du travail, santé, liberté, sens de la justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plai
4634 es, instruction véritable et autres plaisanteries de gros calibre, car à la vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit,
4635 ies de gros calibre, car à la vérité ce n’est pas d’ enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l
4636 érité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vo
4637 s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler s
4638 e de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans cesse des vérités aussi élémentaires. L’é
4639 mentaires. L’égalitarisme des connaissances De l’existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la
4640 e l’existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mo
4641 es programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), déc
4642 ocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’ idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doivent à
4643 les enfants doivent à tout instant être en mesure d’ingurgiter la même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte
4644 enfants doivent à tout instant être en mesure 1° d’ ingurgiter la même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de
4645 t être en mesure 1° d’ingurgiter la même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même te
4646 1° d’ingurgiter la même quantité de « matière » ; d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-n
4647 d’ingurgiter la même quantité de « matière » ; 2° d’ en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous
4648 e quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que c
4649 a même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce principe est à la base du système ; qui repose donc
4650 qui repose donc sur une tranquille méconnaissance de la nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêti
4651 nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur, mais il faut reconnaître que jamai
4652 stoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur, mais il faut reconnaître que jamais on n’avait songé
4653 he. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’ exception, et les réduit avec acharnement à son commun dénominateur4.
4654 des veaux et des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le
4655 un résumé clair et portatif des résultats actuels d’ une science. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans
4656 à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui soit de première main, rien qui soit authentique. Ils négligent toutes les pa
4657 où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la valeur éducative
4658 re en commerce intime avec elles. On apprend plus de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié le nom. Une
4659 en commerce intime avec elles. On apprend plus de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié le nom. Une autre
4660 ce intime avec elles. On apprend plus de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié le nom. Une autre conséq
4661 intime avec elles. On apprend plus de deux que de mille , dit un sage oriental dont j’ai oublié le nom. Une autre conséquence
4662 r assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’a qu’une valeur éducatrice : s’i
4663 l est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer les leç
4664 ois la belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisation d’un
4665 La discipline On conçoit que la réalisation d’ un programme entièrement contre nature exige une discipline sévère. D’
4666 rement contre nature exige une discipline sévère. D’ où notre conception pénitentiaire de l’école. Mais, s’il est des disc
4667 pline sévère. D’où notre conception pénitentiaire de l’école. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’
4668 iste à faire tenir les enfants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le travail
4669 fants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. To
4670 ite le travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’il soit de nature à légiti
4671 aître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l
4672 e qu’on attend de ce travail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on demande à ces petits.
4673 doute qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une exagération
4674 t n’est plus qu’une entrave énervante, un système de vexations mesquines, propres à étouffer toute spontanéité chez un peu
4675 peuple qui vraiment ne péchait point par l’excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des inertes,
4676 t blanches qui marquent un peu partout le passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre so
4677 e permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écrier sans hésiter : « Liberté, liberté chérie, voilà bien ta patr
4678  » La préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique sont d’accord sur ce point : l’école primaire
4679 r ce point : l’école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction ci
4680 ocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’ instruction civique sont insuffisantes pour former le petit citoyen :
4681 faut que l’enseignement tout entier soit occasion de développer les vertus sociales de l’élève. « Une classe est une socié
4682 r soit occasion de développer les vertus sociales de l’élève. « Une classe est une société en miniature. » Ceci est une én
4683 niature. » Ceci est une énorme bourde. Juxtaposez trente enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’aurez rien qui ress
4684 e bourde. Juxtaposez trente enfants sur les bancs d’ une salle d’école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi que ce soit
4685 xtaposez trente enfants sur les bancs d’une salle d’ école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi que ce soit à aucun éta
4686 ’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « commun
4687 oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs 
4688 ble dès l’âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, vanité, panurgisme,
4689 a plus tard socialisme, morgue bourgeoise, esprit de parti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’esprit démocrati
4690 e parti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs
4691 sion !) Pour moi ce que je retire de plus évident de mon expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eû
4692 sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’ égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne p
4693 st la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’ histoire, dont il est aujourd’hui démontré qu’ils donnent une image me
4694 ’hui démontré qu’ils donnent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’
4695 , à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’ en être flatté. Et puis, quelle est cette préparation à la vie qui com
4696 ie qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la
4697 l’enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civique qui assure l’écrasement des plus délicats pa
4698 t utiliser pour son profit humain la petite somme de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’école. (Cet argent d
4699 ormales créées par l’école publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger
4700 contraire. On ne peut pas exiger qu’il soit tout de noblesse, de vertu et de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’
4701 n ne peut pas exiger qu’il soit tout de noblesse, de vertu et de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’il n’est que
4702 s exiger qu’il soit tout de noblesse, de vertu et de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’il n’est que ridicule et
4703 , de vertu et de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’il n’est que ridicule et mesquinerie. Il y a là une prémédita
4704 icule et mesquinerie. Il y a là une préméditation de médiocrité que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élèv
4705 éditation de médiocrité que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les
4706 de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-mo
4707 s. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc mantea
4708 la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé : « Qua
4709 re a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé : « Quant il ne
4710 c manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé : « Quant il neige, c’est comme d
4711 eau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé : « Quant il neige, c’est comme des peti
4712 « Quant il neige, c’est comme des petits morceaux de vouate. » Il est évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans la
4713 ctoria montre une âme docile, un rassurant défaut d’ esprit critique, tandis que Sylvie appartient manifestement à la race
4714 vie appartient manifestement à la race dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi l’élève disci
4715 s Helvètes un légalisme écœurant6, un conformisme d’ imbéciles ou d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à l’avantag
4716 égalisme écœurant6, un conformisme d’imbéciles ou d’ impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à l’avantage des gens en p
4717 te quelques « brillantes carrières » fournies par d’ ex-forts-en-thème, voire par d’ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit
4718 res » fournies par d’ex-forts-en-thème, voire par d’ ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir e
4719 ire par d’ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’ambition d’un
4720 pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’ambition d’ un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être assez spéciales
4721 l’espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être assez spéciales. Il arrive en eff
4722 d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’ être assez spéciales. Il arrive en effet que nos petits futurs grrrand
4723 os petits futurs grrrands citoyens ayant accompli de « fortes études primaires et secondaires » (témoignage suffisant de l
4724 primaires et secondaires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à la compromission sociale établie) et cueilli au pas
4725 ssage un grade universitaire, prennent leur essor de chérubins du parti au cours de ces nombreux banquets de cercles locau
4726 rubins du parti au cours de ces nombreux banquets de cercles locaux où se fondent les réputations, où se « baptisent » les
4727 t les réputations, où se « baptisent » les hommes d’ avenir. Un jour on voit s’étaler en première page des illustrés la fac
4728 des illustrés la face épanouie quoique énergique d’ un de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’édi
4729 illustrés la face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’édifice
4730 face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’édifice administrati
4731 qs de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une belle carrière
4732 eurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège ont été fra
4733 qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de constater que la for
4734 n de comparer les bons élèves de diverses classes d’ un collège ont été frappés de constater que la force et l’originalité
4735 de diverses classes d’un collège ont été frappés de constater que la force et l’originalité de leur jugement sont en rais
4736 rappés de constater que la force et l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’années d’instruction
4737 de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’ années d’instruction publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ai
4738 ugement sont en raison inverse du nombre d’années d’ instruction publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué
4739 . Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du
4740 cile, qu’ils constituent une inversion méthodique de toutes les lois divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâ
4741 s divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’ abâtardissement de la race. D’autre part, il est aisé de voir que tous
4742 nes. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de la race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dér
4743 ardissement de la race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérivent nécessairement du fait que l’éco
4744 est publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses con
4745 ombattez l’instruction publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. Il y a là, dirait M. Prudhomme, un bien gr
4746 à, dirait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement les meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce q
4747 iplines scolaires : « Les épaves scolaires, faute d’ un traitement pédagogique approprié, tombent dans une apathie intellec
4748 cillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être avantageux
4749 uel Duvillard, L’École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être avantageux dans certains cas de soustrair
4750 L’École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être avantageux dans certains cas de soustraire l’enfant
4751 5. Il est peut-être avantageux dans certains cas de soustraire l’enfant à l’influence d’une famille anormale. Mais d’abor
4752 certains cas de soustraire l’enfant à l’influence d’ une famille anormale. Mais d’abord c’est sanctionner cet état anormal
4753 t anormal (il y aurait sans doute d’autres moyens de sauver l’enfant dans sa famille). Ensuite, pourquoi fait-on en réalit
4754 les familles constituaient un milieu délétère ? 6. Justice démocratique, égalité, légalité, sont les meilleures armes de
4755 que, égalité, légalité, sont les meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
93 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 4. L’illusion réformiste
4756 4. L’illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu au
4757 as attendu ma colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir l’abondante l
4758 ail de démolition. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir l’abondante littérature publiée sur le « problème de l’écol
4759 l’abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout établissement où l
4760 ole nouvelle tout établissement où l’on s’efforce d’ enseigner selon des principes tirés de l’observation des enfants, c’es
4761 n s’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’observation des enfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute
4762 igne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école primaire sans t
4763 s promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école primaire sans toucher au principe de l’instruction p
4764 éformer l’école primaire sans toucher au principe de l’instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici s
4765 actuelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psychologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu appor
4766 e. Où il y avait non-science, on a voulu apporter de la science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’on retombera da
4767 s absurdités. On a créé par exemple des « jardins d’ enfants » où l’on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs
4768 ins d’enfants » où l’on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de l’école prati
4769 d’enfants » où l’on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de l’école pratiqu
4770 nfants » où l’on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de l’école pratique. P
4771 4 ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de l’école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants, et
4772 ar cœur et à rebours, les noms des rues et places de leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à la profession de chau
4773 comme s’ils étaient tous destinés à la profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique prévaut, il est à
4774 aient tous destinés à la profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique prévaut, il est à craindre que
4775 marcher en décomposant les mouvements avec l’aide d’ un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’école ac
4776 me pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’ école active, on prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de
4777 prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes absurdes
4778 par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous les
4779 gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous les mots en « al »,
4780 les campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la s
4781 cisément. Je ferai à l’école nouvelle un reproche d’ une autre nature. Elle prétend donner plus de liberté aux enfants en l
4782 oche d’une autre nature. Elle prétend donner plus de liberté aux enfants en leur rendant le travail amusant, en leur laiss
4783 travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ils doivent apprendre. Mais qu’est-ce qu’
4784 nisée ? En réalité, cet amusement a pour seul but de faire avaler la pilule amère des connaissances. On songe à M. Ford, q
4785 vriers un second dimanche, afin qu’ils consomment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On n’impose plus d
4786 d dimanche, afin qu’ils consomment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On n’impose plus des résultats,
4787 ion ; on capte scientifiquement les sources mêmes de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la formule d’une tromp
4788 té. « Instruire en amusant » peut être la formule d’ une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primaire, parce q
4789 la brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on tra
4790 traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’ obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes com
4791 le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’ hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants. On y par
4792 On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de « l’enfant » comme on
4793 ommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’ enfants. On y parle de « l’enfant » comme on parle d’un produit chimiq
4794 s de serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de « l’enfant » comme on parle d’un produit chimique : On remarque chez
4795 nfants. On y parle de « l’enfant » comme on parle d’ un produit chimique : On remarque chez l’enfant… Dans ce milieu l’enfa
4796 nt ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’
4797 ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’éc
4798 opper… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêteme
4799 ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintéressés. Ma
4800 ois tout ce que cela entraînerait, dans une ruine d’ où renaîtrait peut-être l’humanité… Je songe à un enseignement sans éc
4801 es gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’école libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joy
4802 des programmes, et dont les classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur fair
4803 foires : ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plus librement qu’ils trahissent le des
4804 on amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’ autant plus librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’instru
4805 us librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Il
4806 trahissent leur mission officielle. Ils éduquent de futurs anarchistes8, bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était
4807 eur avait confié, c’était la fabrication en série de petits démocrates conscients et organisés. Je crains que ce malentend
4808 dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle n’échappe
4809 e n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’ une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme. Qu’il y a
4810 ’une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme. Qu’il y ait là cependant une possibilité pratique d’en sorti
4811 Qu’il y ait là cependant une possibilité pratique d’ en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force
4812 en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste d
4813 Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste dans son intégrité et son urge
4814 mme subsiste dans son intégrité et son urgence. 7. Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens
4815 nce. 7. Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que je donne à ce mot.
94 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 5. La machine à fabriquer des électeurs
4816 5. La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait
4817 fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer
4818 er des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absur
4819 m’explique pourquoi il triomphe et se perpétue ; de quel droit il nous écrase. La réponse est simple, terriblement simple
4820 éponse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs sia
4821 sont nées en même temps. Elles ont cru et embelli d’ un même mouvement. Morigéner l’une c’est faire pleurer l’autre. Écoute
4822 s et il y aurait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des ci
4823 ivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des faits pate
4824 s patents et simples ; il serait vraiment dommage de priver ces Messieurs d’une aubaine pour eux si rare. Un fait simple,
4825 l serait vraiment dommage de priver ces Messieurs d’ une aubaine pour eux si rare. Un fait simple, par exemple, c’est que l
4826 éalisable. Ici, je demanderai poliment au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contrain
4827 trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tellement évidentes — que
4828 rrai contraint de lui expliquer un certain nombre de vérités tellement évidentes — que cela n’irait pas sans quelque indéc
4829 et truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela
4830 ent les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il
4831 noffensifs. Enfin, il faut un nombre considérable de leçons, et le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps
4832 longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas le t
4833 t cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’ écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de faç
4834 écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’ un milliard de façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temp
4835 er la nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découv
4836 ure qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir
4837 que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une fois, un
4838 amoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’est de la part de notre Institutrice qu’un re
4839 lée. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisai
4840 l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour autant10. Je dis simpleme
4841 ossible que parce qu’elle était liée aux intérêts de la démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore
4842 le n’était encore au xviiie siècle qu’une utopie de partisans. Il ne serait guère plus fou de proposer aujourd’hui qu’on
4843 utopie de partisans. Il ne serait guère plus fou de proposer aujourd’hui qu’on répande universellement et obligatoirement
4844 ellement et obligatoirement l’art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, po
4845 nterie, pour prendre corps, que l’appui intéressé d’ un groupement politico-financier. Et il y aurait bien vite des députés
4846 ux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’ailleurs cette complicité, si évidente
4847 illeurs cette complicité, si évidente à l’origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non m
4848 à l’origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non moins flagrante, dans ses suites normal
4849 institution, se manifeste encore de nos jours, et d’ une façon non moins flagrante, dans ses suites normales. Je n’en veux
4850 rante, dans ses suites normales. Je n’en veux pas d’ autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notre instrument de p
4851 s d’autre preuve que l’état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellence. Car il n’est qu’une expli
4852 l’état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellence. Car il n’est qu’une explication vraisemblable
4853 ce. Car il n’est qu’une explication vraisemblable de cette incurie : l’école, sous sa forme actuelle, remplit suffisamment
4854 uffisamment son rôle politique et social, qui est de fabriquer des électeurs (si possible radicaux, en tout cas démocrates
4855 radicaux, en tout cas démocrates). Je me souviens d’ un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œuvre de Kitchen
4856 Je me souviens d’un dessin humoristique publié en 1914, représentant l’œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gen
4857 humoristique publié en 1914, représentant l’œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gentlemen et rendait des to
4858 tion, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’ une petite mécanique à quatre sous qui suffit à régler désormais l’aut
4859 été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre sous qui suffit à régler désormais l’automatisme de la vie civique. L
4860 sous qui suffit à régler désormais l’automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindr
4861 i peuvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements.
4862 as rentable. Il est clair que si le but principal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintér
4863 le but principal de l’instruction publique était d’ éduquer le peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraien
4864 l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’ une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu plus fous q
4865 eraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution scolaire ; c
4866 comme vous dites, sans doute pour m’ôter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre, vous to
4867 usculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce de gens qui font
4868 rre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce de gens qui font confiance à leur sensibilité plus qu’aux idées des autr
4869 us qu’aux idées des autres. Or, c’est une révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’École. Mes arguments ne se mett
4870 orterait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des val
4871 sentais menacées dans cette aventure des valeurs d’ âme auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est
4872 ’âme auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de déc
4873 ut. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne ma
4874 écrire la marche nécessaire11. On ne manquera pas d’ insinuer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, d
4875 e11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleurs de jeun
4876 sinuer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de ven
4877 gine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir me dire ça che
4878 y a surtout de la nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas,
4879 de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir me dire ça chez moi, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement
4880 C’est justement dans la mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif
4881 écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’ un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’authentiquement noble en chaq
4882 ommodais d’un régime nocif pour tout ce qu’il y a d’ authentiquement noble en chaque homme. Si les fils du peuple souffrent
4883 aque homme. Si les fils du peuple souffrent moins d’ un tel régime, c’est qu’ils n’ont pas d’eux-mêmes une connaissance aus
4884 ent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ont pas d’ eux-mêmes une connaissance aussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent
4885 si quelques-uns allaient se réveiller… Il suffit d’ un peu de chaleur d’âme pour amorcer le dégel de ces principes, et ce
4886 aient se réveiller… Il suffit d’un peu de chaleur d’ âme pour amorcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal
4887 t d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printan
4888 dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que d
4889 signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on culbuter
4890 printanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs siè
4891 ibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’emploie ce
4892 s sièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivrant, 100 %. Beaucoup de g
4893 J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivrant, 100  %. Beaucoup de gens mourront sans avoir jamais soupçonné ce que cela
4894 s avoir jamais soupçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à la fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formel
4895 représente. 10. Voir note A à la fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une telle attitude n’est en
4896 oir note A à la fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une telle attitude n’est en aucune façon tri
4897 e telle attitude n’est en aucune façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Dé
4898 de l’idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de vue presque opposés c
4899 réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en
4900 Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en tant de points — voilà qu
95 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 6. La trahison de l’instruction publique
4901 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un to
4902 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.)
4903 tait là, nous venons de le voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste échelle à cette « Trahiso
4904 en ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un
4905 e péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’ un peu de bon sens et d’information pour jouer au prophète, on nous pr
4906 Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens et d’ information pour jouer au prophète, on nous promet de tous côtés de be
4907 nformation pour jouer au prophète, on nous promet de tous côtés de belles catastrophes. Je suis de ceux qui s’en réjouisse
4908 r jouer au prophète, on nous promet de tous côtés de belles catastrophes. Je suis de ceux qui s’en réjouissent mauvaisemen
4909 met de tous côtés de belles catastrophes. Je suis de ceux qui s’en réjouissent mauvaisement. (« C’est bien fait. C’était t
4910 bien fait. C’était trop laid ».) À peine capable de nous instruire, l’École prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs
4911 urs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de son propre poids dans l’abrutissement ou se laisse prendre à des théo
4912 ne peut que diminuer le « rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me poser ici en défenseur des ve
4913 ans des « lumières », et qui pourtant s’indignent de voir la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « ce
4914 ille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fait, constat
4915 rmes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le
4916 ue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’ une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahison —, mais en
4917 re d’une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer tout ce qu’il y a d
4918 s encore elle tend à développer tout ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans l’esprit moderne. C’est sa façon à ell
4919 sant dans l’esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse
4920 ne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est
4921 de l’époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vrai qu’elle est anormalement insatiable… Je croi
4922 ent insatiable… Je crois qu’elle a surtout besoin d’ une purge violente qui chasse ce ver solitaire du matérialisme. Et qua
4923 isme. Et quand on m’aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai q
4924 sfaite naît un nouveau besoin qui est précisément d’ échapper à cette organisation. Or il semble bien que nous en soyons-là
4925 nous en soyons-là, s’il faut en croire les signes de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’école empoisonne les
4926 toutes parts. Mais l’école empoisonne les germes d’ une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère. Elle favor
4927 s l’école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclu
4928 ait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supério
4929 te exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersa
4930 la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais
4931 rnir son contrepoison. Au contraire, elle prépare de consciencieuses poires, des esclaves du mot. Il est clair, par exempl
4932 l est clair, par exemple, que seules les victimes de l’instruction helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les d
4933 ictimes de l’instruction helvétique sont capables d’ absorber sans fou rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le
4934 nt capables d’absorber sans fou rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste établissement
4935 comparé le monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés. L’école donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résign
4936 l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qui lui d
4937 . Mais elle tue tout ce qui lui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’es
4938 érer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’ ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se le dise ! —, puissanc
4939 s moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se le dise ! —, puissance de crétinisation len
4940 démoralisation — qu’on se le dise ! —, puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes les mesquineries natur
4941 puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise
4942 les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’Écol
4943 ns ses collèges, l’y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plus que par ce qu’elle
4944 lle constitue la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de
96 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 7. L’Instruction publique contre le progrès
4945 7. L’Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a me
4946 z-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux, cela vous a un
4947 vouer qu’avec ce je ne sais quoi de déclamatoire, de … journalistique, de bedonnant creux, cela vous a un petit air démocra
4948 ne sais quoi de déclamatoire, de… journalistique, de bedonnant creux, cela vous a un petit air démocratique, hé ! hé !… et
4949 dans une direction tout opposée. C’est très malin d’ avoir inventé un instrument de progrès : encore faut-il le mettre en m
4950 e. C’est très malin d’avoir inventé un instrument de progrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il
4951 l’instruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moin
4952 nstruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de
4953 ’a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu le public s’a
4954 . Le moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que « 
4955 en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que « l’instrument d
4956 peu à peu le public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’abri duquel on distille du radic
4957 al. On me fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j
4958 produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris par c
4959 duits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris par cœu
4960 s gosses, dès l’âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris par cœur la réponse. Regardez un éc
4961 trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la
4962 ’il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’ un régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’électeurs fantai
4963 régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’ électeurs fantaisistes serait parfois tenté de retirer brusquement ces
4964 ple d’électeurs fantaisistes serait parfois tenté de retirer brusquement ces sièges, farce connue et qui ridiculise à coup
4965 et qui ridiculise à coup sûr sa victime. En fait de farces, vous allez feindre de trouver bien bonne celle-ci : je préten
4966 sa victime. En fait de farces, vous allez feindre de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que l’instruction publique
4967 oins ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Dr
4968 pas réactionnaire, non, même pas. Car les forces de réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corrigent, stim
4969 rigent, stimulent, vivifient. L’École se contente d’ être figée. Est-ce un frein ? Même pas. C’est plutôt une vase où s’enl
4970 Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant
4971 èse ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec
4972 humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce sens exquis du cliché qui est un hommage à vos maîtr
4973 os maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de
4974 blique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue d
4975 u citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux
4976 me tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’abord critiquer ce qui est — par la comparaison avec ce qui
4977 le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une
4978 nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’ inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle d
4979 ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher de voir une intention providentielle dans cet amour de la destruction et
4980 voir une intention providentielle dans cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps
4981 rovidentielle dans cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beauco
4982 uction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu l’avoue
4983 faire des signes dans le vide à des hasards gros de dangers, c’est peut-être à quoi notre génération devra limiter l’effi
4984 quoi notre génération devra limiter l’efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne signifie pas que
4985 désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens peut nous amener à constater, sans plus, que notre so
4986 recul humain. Par exemple, est-ce un progrès que d’ avoir remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrièr
4987 e un progrès que d’avoir remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie et de grandeur q
4988 ies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ai
4989 ion, avec tout le vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs les ré
4990 ratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière,
4991 antisme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière rare
4992 e la poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière rarement « hygiénique » et qui définit notre âge : la p
4993 tionnarisme, vous alliez le dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que la majorité
4994 assis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et
4995 s débordent ce cercle étroit et distingué. Il y a de grands balayages à faire, un grand courant d’air à créer qui emporter
4996 y a de grands balayages à faire, un grand courant d’ air à créer qui emportera toutes ces statistiques et ces journaux, il
4997 l en restera toujours assez pour allumer des feux de joie, etc. Bon. Supposons tout cela fait. Respirons. Mais déjà vous m
4998 à vous m’attendez à ce tournant et vous me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer les temps
4999 me question. Aurai-je la naïveté non moins énorme d’ esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’instruction publique
5000 instruction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depu
5001 pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’elle repose sur des postulats r
5002 En vérité, démocratie et rationalisme ne sont que deux aspects, l’un politique, l’autre intellectuel, d’une même mentalité.
5003 ux aspects, l’un politique, l’autre intellectuel, d’ une même mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans l’aristocrat
5004 nt dans les principes démocratiques, et dans ceux de l’École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est
5005 École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre sécheresse sentimenta
5006 ’est lui qui stérilise nos utopies et les empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en premier lieu d
5007 e que des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre
5008 Il s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette pre
5009 er et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette première tâche constitue un programme si riche
5010 onstitue un programme si riche qu’il est superflu d’ en formuler une seconde. Laissons ce soin, à des générations plus libr
5011 . Laissons ce soin, à des générations plus libres d’ imaginer, bénéficiant de notre colère jacobine et de cette formidable
5012 s générations plus libres d’imaginer, bénéficiant de notre colère jacobine et de cette formidable expérience négative qui
5013 imaginer, bénéficiant de notre colère jacobine et de cette formidable expérience négative qui aura duré deux siècles au mo
5014 ette formidable expérience négative qui aura duré deux siècles au moins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à la dial
5015 qui aura duré deux siècles au moins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouv
5016 retrouve facilement les triades : être —négation de l’être — nouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de
5017 ouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’ une de ces triades. Son rationalisme nie l’être sous toutes ses formes
5018 être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de ces triades. Son rationalisme nie l’être sous toutes ses formes, trad
5019 e nouvelle et plus complète, à un degré supérieur d’ inconscience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de l’instinct d’i
5020 onscience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce t
5021 je puis dire. Alors ce sera au tour de l’instinct d’ intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que l
5022 ’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce
5023 avènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce qu
5024 trais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’aurais voulu vous voir dema
5025 ent. J’aurais voulu vous voir demander à un sujet de Louis XIV ce qu’il concevait à la place de la royauté absolue. Il eût
5026 tion. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient
5027 que la république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine à la folie démocratique, à cette danse de Saint
5028 rd à peine à la folie démocratique, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de leur temps ne pouvait offrir la moin
5029 e, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de leur temps ne pouvait offrir la moindre préfiguration ? Eh bien ! ind
5030 rir la moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les possibilités formidables que nous réserve le siè
5031 secrètement, que ce mépris et ce scepticisme sont d’ un ridicule écrasant, sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12.
5032 sant, sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de
5033 uel vous ne tarderez pas à périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de parenté avec
5034 rderez pas à périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de parenté avec ce maigre des
5035 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de parenté avec ce maigre descendant nommé Rationa
5036 oza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de parenté avec ce maigre descendant nommé Rationalisme, produit d’une m
5037 ce maigre descendant nommé Rationalisme, produit d’ une mésalliance avec l’Avarice bourgeoise — et qui sans cesse déroge.
97 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Appendice. Utopie
5038 ute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer quant à ma santé menta
5039 ssurer quant à ma santé mentale.) La question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit, ou des pantins
5040 question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra les ficelle
5041 t de savoir si nous serons des hommes de chair et d’ esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra les ficelles, peu impor
5042 stupide) et les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la
5043 s de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Cec
5044 int : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’ une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que seule une gran
5045 pe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imaginatio
5046 e. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental.
5047 d’esprit : voilà bien ce que l’École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature
5048 pêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’ anti-irrationnel dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la s
5049 ve ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dé
5050 spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la méca
5051 la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’ échapper à la mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination d
5052 per à la mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’ imagination dont les conséquences seront matériellement catastrophique
5053 s’y trompe pas : le sens technique qui tient lieu d’ imagination à l’homme moderne n’est pas créateur d’êtres spirituelleme
5054 ’imagination à l’homme moderne n’est pas créateur d’ êtres spirituellement vivants, ni d’aucune grandeur supérieure à la so
5055 pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d’ aucune grandeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’engendre p
5056 vants, ni d’aucune grandeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé
5057 Quand nous aurons épuisé toutes les combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le plus clair de no
5058 rons épuisé toutes les combinaisons de vitesse et d’ ennui à quoi présentement nous usons le plus clair de nos forces, — le
5059 nnui à quoi présentement nous usons le plus clair de nos forces, — le Poète dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peup
5060 dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peuples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où les plongent toutes vos dro
5061 ouïs. Il ne tient peut-être qu’à une forte équipe d’ idéalistes pratiques d’en faire sortir le beau miracle d’une civilisat
5062 être qu’à une forte équipe d’idéalistes pratiques d’ en faire sortir le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esp
5063 istes pratiques d’en faire sortir le beau miracle d’ une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudrait que dès main
5064 tir le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élit
5065 ces élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, de
5066 enants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’ être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes. J’appelle a
5067 et intégralement humain. L’anarchie est un degré d’ intensité dans la vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite co
5068 é dans la vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se trouve être dans une certaine mesure un an
5069 on pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se trouve être dans une certaine mesure un anarchiste s’il dé
5070 aine mesure un anarchiste s’il défend son opinion de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de la mauvaise espèce, un
5071 on de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’aime
5072 nt tout en le suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’existence. Qu
5073 s si vous tenez, oui ou non, M. W. Rosier, auteur de manuels d’histoire et de géographie bien connus, pour l’esprit le plu
5074 enez, oui ou non, M. W. Rosier, auteur de manuels d’ histoire et de géographie bien connus, pour l’esprit le plus dangereus
5075 on, M. W. Rosier, auteur de manuels d’histoire et de géographie bien connus, pour l’esprit le plus dangereusement plat qui
5076 s répondent oui, cela finira par créer un courant d’ opinion. Et l’opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos :
5077 agent désormais à ne publier plus un seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’instruction publique. Ils peuvent
5078 uoi, comme on sait, et ils auraient là l’occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une rédemption du
5079 casion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une rédemption du journalisme, ce que je propose-là. Et c’es
5080 -là. Et c’est ainsi qu’on peut imaginer sans trop d’ invraisemblance de petites réformes. Mais j’en ai assez dit pour évite
5081 i qu’on peut imaginer sans trop d’invraisemblance de petites réformes. Mais j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu :
5082 ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’ une réforme suffisante. C’est une révolution qu’il faut. Alors, suppri
5083 le. Le peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’ instruction15, et se croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux.
5084 faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre
5085 lui bourre le crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus gros obstacle à sa cultu
5086 préparer le terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment retourner contre l’ennemi ses propres batter
5087 batteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de l’organisation existante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à
5088 n entourage ne peut plus lui donner : des modèles de pensée. Un entraînement de l’esprit, au lieu d’une somme de connaissa
5089 i donner : des modèles de pensée. Un entraînement de l’esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique
5090 Un entraînement de l’esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique spirituelle. Et puis, qu’il en fa
5091 la concentration. En vérité, toute force résulte d’ une concentration, dans quelque domaine que ce soit. Si l’Occident com
5092 n plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce terme hin
5093 e dit : vous ne voyez tout de même pas une classe de gamins répétant la syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices d
5094 syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne s
5095 rée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas au
5096 ontrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous jure que je m’en doute. M
5097 veut obtenir une grande intensité avec un minimum de moyens. J’en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le dril
5098 intensité avec un minimum de moyens. J’en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill corr
5099 ysique, aux exercices élémentaires que l’on exige d’ un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance prim
5100 aires que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspo
5101 au corps une immobilité absolue. L’un et l’autre de ces exercices montrent que le candidat possède une énergie suffisante
5102 loin, — et en même temps constituent des sources d’ énergie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s
5103 peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’ un geste identique, exécuté dans deux plans différents. Le drill est u
5104 Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans différents. Le drill est un yoga corporel, le yoga est un drill
5105 drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulair
5106 le yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires. Tout comme ce qu’ils désign
5107 en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’ éducation efficace. L’armée de milices suisses fait des soldats en moi
5108 ll offre un exemple d’éducation efficace. L’armée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l’école a
5109 rmée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l’école appliquait en les transposant des méthodes de
5110 e de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l’école appliquait en les transposant des méthodes de concen
5111 ’école appliquait en les transposant des méthodes de concentration analogues, même dans la mesure sans doute faible où la
5112 le supporte, on économiserait plusieurs semestres de travail. Si chaque matin l’enfant parvenait à mettre sa pensée au gar
5113 à-vous durant quelques instants, il s’épargnerait de longs énervements. Il n’y a pas là de quoi se tordre. Car tout cela n
5114 épargnerait de longs énervements. Il n’y a pas là de quoi se tordre. Car tout cela nous donnerait des années de liberté en
5115 e tordre. Car tout cela nous donnerait des années de liberté en même temps qu’un peu de calme. Ces années de liberté nous
5116 erté en même temps qu’un peu de calme. Ces années de liberté nous permettraient de vivre, seule façon de s’instruire inven
5117 e calme. Ces années de liberté nous permettraient de vivre, seule façon de s’instruire inventée à ce jour. Ce calme nous p
5118 liberté nous permettraient de vivre, seule façon de s’instruire inventée à ce jour. Ce calme nous permettrait de comprend
5119 ire inventée à ce jour. Ce calme nous permettrait de comprendre beaucoup de choses qui restent cachées aux agités ; la nat
5120 le. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire c
5121 oût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré
5122 . Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de dire que tout
5123 re connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à posséder une plus grande puissance in
5124 ne crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différen
5125 s progressent de la même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences s’accuseraient, mais se légitime
5126 ls. Méditez un peu ces truismes : On apprend plus d’ une chose longuement contemplée que de mille aperçues au passage. Ab u
5127 pprend plus d’une chose longuement contemplée que de mille aperçues au passage. Ab uno disce omnes. Une minute de concentr
5128 end plus d’une chose longuement contemplée que de mille aperçues au passage. Ab uno disce omnes. Une minute de concentration
5129 erçues au passage. Ab uno disce omnes. Une minute de concentration intense dégage dans l’individu plus d’énergie que des h
5130 concentration intense dégage dans l’individu plus d’ énergie que des heures d’exercices gémissants. De même, le bien supéri
5131 age dans l’individu plus d’énergie que des heures d’ exercices gémissants. De même, le bien supérieur de quelques-uns est p
5132 ’exercices gémissants. De même, le bien supérieur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médiocre de beaucoup.
5133 es-uns est plus utile à tous que le bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contien
5134 nt en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien public. Certains proposent en rougiss
5135 au bien public. Certains proposent en rougissant de leur hardiesse quelque chose comme l’instruction privée : et moi je l
5136 le temps des mages : ils comprennent les théories d’ Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent des sensibilit
5137 omprennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc
5138 des sensibilités secondes et tout un arc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour
5139 s dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l
5140 ur… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areus
5141 es choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse, 26 décembre 1928-10 janvier 1929.
5142 -t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse, 26 décembre 1928-10 janvier 1929.   NOTE A On est toujours tenté d’attr
5143 de sa folie démocratique ?   Areuse, 26 décembre 1928-10 janvier 1929.   NOTE A On est toujours tenté d’attribuer à ses adver
5144 cratique ?   Areuse, 26 décembre 1928-10 janvier 1929.   NOTE A On est toujours tenté d’attribuer à ses adversaires des int
5145 -10 janvier 1929.   NOTE A On est toujours tenté d’ attribuer à ses adversaires des intentions noires et consciemment crim
5146 ocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblables accusatio
5147 de parlements et autres potinières ne vivent que de semblables accusations. Du moment que n’importe qui juge et contrôle
5148 nt un très brave homme, il fait partie du conseil de la paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs ré
5149 ations ont ait porté atteinte à la dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je préciserai donc : je
5150 dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’École pour criminelle. Mais
5151 je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais ils sont les premières victim
5152 complique dès que l’instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-
5153 que l’instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans la mêm
5154 le ne saurait même pas prévoir. NOTE B La culture de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec l’ordre nat
5155 trouver l’accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laquelle nos eff
5156 d avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laquelle nos efforts resteront
5157 ront vains pour instaurer cette nouvelle attitude de l’âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur
5158 igieux. Pour quiconque a une foi et la conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religieux. Mais les
5159 a une foi et la conscience de cette foi, il n’est d’ enseignement véritable que religieux. Mais les questions confessionnel
5160 ut. Imaginez une culture spirituelle indépendante de toute destination religieuse particulière. On peut faire des haltères
5161 peut faire des haltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgai
5162 haltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein se
5163 ifiste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le gen
5164 e, au plein sens du mot, c’est le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes 
5165 istingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’apparaissent ici que pou
5166 pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en effet, terrorisent à
5167 Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ils
5168 pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ils n’en dist
5169 uent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des grenades,
5170 c la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine et sur ce besoin dans ses Arti
5171 tuels, du fait que l’école n’a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque
98 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Avant-propos
5172 bonne fois.   Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à pei
5173 er à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre
5174 que. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruc
5175 r ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considè
5176 Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises
5177 je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfan
5178 s thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roor
5179 Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’ Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appau
5180 ue la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que
5181 t, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué e
5182 ens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein
5183 . J’apporte un témoignage personnel, une réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me
5184 tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tou
5185 me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de beaucoup d’autr
5186 out ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je ressemble. Nous vivons sous un
5187 à sécrétion socialiste, qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et t
5188 et toléré malgré leur mauvaise humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’instruction publique et grâce à elle p
5189 e existence. Je l’ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, par
5190 reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui sout
5191 lus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’ être complices dans cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
5192 à-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’ aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les
5193 jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argum
5194 gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pa
5195 rde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce
5196 oser une nouvelle forme politique. Je me contente de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
5197 ée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’ en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçois là-bas, vautré derriè
5198 dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute,
5199 oute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss  2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore deux mots
5200 els, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’excellenc
5201 ève pour mettre en doute l’excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êt
5202 dique un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même c
5203 iente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souvent nos tolérants par
5204 ants par inertie, je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en
5205 je ne sais. Mais je m’attends à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories
5206 te sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêche
5207 le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces arguments, bien que dûment prévus et réduits à néant
5208 prévus et réduits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. R
5209 si, ceux qui croient aux faits. Je leur réponds : qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils n
5210 réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur sceptic
5211 e peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeu
5212 r ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser
5213 ant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à l’efficac
5214 ées, m’accuser de faire une critique dangereuse ; que néanmoins je crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religi
5215 ngereuse ; 3° que néanmoins je crois à l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Ch
5216 certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d
5217 des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller
5218 as de le dire : l’instruction publique.) Résumé : On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2°
5219 ’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’ aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui ri
5220 ller contre l’époque, et on le peut efficacement. rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du type : vous êtes un ré
5221 infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’ une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à ces excès de
5222 gressiste et tolérante qui se livrent à ces excès de langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet
5223 s de langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la qu
5224 es renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Ce
5225 ect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussio
5226 fet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les princip
5227 ts et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs rai
5228 gements, même violents, que cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du f
5229 cela ne manque jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est p
5230 ue dans ses réalisations actuelles, puis au terme de ce recensement lamentable, je poserai la question de savoir si tant d
5231 ce recensement lamentable, je poserai la question de savoir si tant de laideurs et d’outrages au bon sens peuvent être lég
5232 erai la question de savoir si tant de laideurs et d’ outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre
5233 bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou.   1. Je ne puis naturellement pas mentionn
5234 par le but final de notre institution-tabou.   1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiqu
5235 les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgar
5236 s. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité qui jouait alors le r
5237 l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’ une grande vulgarité qui jouait alors le rôle de nos bandes dessinées.
5238 e d’une grande vulgarité qui jouait alors le rôle de nos bandes dessinées.
99 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 1. Mes prisons
5239 1. Mes prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souven
5240 des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les
5241 de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez
5242 x de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’
5243 er de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de la tâche des ins
5244 nous faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, e
5245 au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et grammaticales, où tout retombait dro
5246 es, et grammaticales, où tout retombait droit… Et de ces beaux problèmes d’arithmétique où il fallait si soigneusement sép
5247 ù tout retombait droit… Et de ces beaux problèmes d’ arithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du rai
5248 ur emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux ), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après combi
5249 es deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’ occupation), (après combien d’heures…) ; et il y avait toujours des ap
5250 r ensemble), (drôle d’occupation), (après combien d’ heures…) ; et il y avait toujours des appartements à meubler. Et on mu
5251 aire ici du sentiment, je suis sensible au charme de cette fantaisie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quin
5252 taisie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomad
5253 s bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadaires, et une semonce à nous
5254 monce à nous gâter toute une journée. Une journée d’ enfant gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mè
5255 embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait b
5256 nce à gratter son ardoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’en
5257  ? Mais l’enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tent
5258 l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’ une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuses, avec des ennemi
5259 des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’ Indiens, des petites guerres mystérieuses, avec des ennemis et des all
5260 alliés imaginaires, des jeux en cachette, odeurs de peaux, comme dans un rêve, des matins de dimanche sonores et tout pro
5261 , odeurs de peaux, comme dans un rêve, des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue
5262 s de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’ huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gr
5263 anche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement
5264 nores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des chos
5265 asse beau demain, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne
5266 el Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuill
5267 incertaine, un peu sale et un peu divine, baignée d’ une très vague angoisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans le
5268 omenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’
5269 de longs pas réguliers… L’École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureuse. 3 Deux angoisses domi
5270 e souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureuse.  3 Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et
5271 souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ho
5272 ît chaque jour, je pense que tout cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’avais appris à lire, en cachette
5273 ut cela tient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’avais appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’année s
5274 a même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’ illustrer par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule
5275  ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’ innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes première
5276 brables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avai
5277 formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne mont
5278 de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse p
5279 oué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’ originalité. Mais pour être rentrée, ma colère n’en fut que plus malf
5280 lfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même à caus
5281 isante. L’école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même à cause d
5282 profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’ évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être éga
5283 te donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fo
5284 nc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois de
5285 le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatr
5286 ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, e
5287 les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus,
5288 hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre , c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus, toutes
5289 fois deux quatre, c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne, et de plus, toutes choses égales d’ailleurs, dans un
5290 is un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’habituer à cette
5291 peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que je me posais la
5292 vissement. Je songeai aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’éducati
5293 tres quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’espri
5294 sprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisati
5295 dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut pa
5296 ratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuit
5297 iques, qui sont une généralisation de la règle de trois , aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : d
5298 uites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on av
5299 moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’ esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé e
5300 sez de verdeur d’esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte e
5301 empire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le
5302 avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitr
5303 us ces ressorts de la révolte et de la libération d’ une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens d
5304 ation d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix
5305 l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était d
5306 ens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux « immorte
5307 ié, si évident, si parfaitement soumis aux règles d’ une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait
5308 our lequel on nous préparait — c’était un système d’ abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des e
5309 es et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder pa
5310 ennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’ un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont ét
5311 oder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission
5312 mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières » comme celles qui touchent à l’action des
5313 e trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisa
5314 qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre hist
5315 ence appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l
5316 out au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel.
5317 et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ ouvrier est l’égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous
5318 iel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’ un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de croire qu
5319 Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas
5320 rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matériellement délivré, en su
5321 as plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma
5322 s mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie
5323 riles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dan
5324 e contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vi
5325 les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en
100 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 2. Description du monstre
5326 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver
5327 ption du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai aussi plusieur
5328 ce militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalités. J’y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’anciens c
5329 ités. J’y retrouvai aussi plusieurs têtes connues d’ anciens camarades d’école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’en
5330 aussi plusieurs têtes connues d’anciens camarades d’ école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’autant mie
5331 imaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’ autant mieux qu’on était devenu plus différents. Car ces différences s
5332 s. Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable
5333 ougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de
5334 ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’un à l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence
5335 ’un instituteur : de l’un à l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une question d’âge,
5336 eur : de l’un à l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une question d’âge, non d’expéri
5337 continuité, la différence n’était qu’une question d’ âge, non d’expérience vécue. Ce que je vais dire est sans doute injust
5338 la différence n’était qu’une question d’âge, non d’ expérience vécue. Ce que je vais dire est sans doute injuste et faux d
5339 s doute injuste et faux dans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’unif
5340 ès grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son inco
5341 ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’ être consciencieux, à une façon blessante d’être supérieur, à une faço
5342 dante d’être consciencieux, à une façon blessante d’ être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une fa
5343 blessante d’être supérieur, à une façon livresque d’ expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces di
5344 que d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouv
5345 teurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils
5346 de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsa
5347 t pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’ appartenir à une élite responsable, cela se voit de loin. Il faut dire
5348 ’appartenir à une élite responsable, cela se voit de loin. Il faut dire que ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils mépris
5349 isent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ironie paysanne
5350 s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffe
5351 ait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’ insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armé
5352 nuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des
5353 des manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusio
5354 en mauvais français — et je ferais de la peine à d’ excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusion au lieutenan
5355 allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut trait
5356 ui veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume
5357 rofessionnelle. J’en connais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater le
5358 connais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de
5359 qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section,
5360 avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je
5361 t coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saur
5362 garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi
5363 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mene
5364 ous en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit
5365 urs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprèg
5366 , ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Num
5367 ttire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.)
5368 t toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sympathique
5369 si sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel q
5370 este dans l’école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être soigné au même titre que certaines autre
5371 telle. C’est celle même du régime. L’architecture de nos « palais scolaires » symbolise d’une façon frappante ce qu’il y a
5372 rchitecture de nos « palais scolaires » symbolise d’ une façon frappante ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la
5373 es » symbolise d’une façon frappante ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde.
5374 ne façon frappante ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pir
5375 ue du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucoup d’ enfants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son
5376 st pire encore. Beaucoup d’enfants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de
5377 on de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corrido
5378 de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des éc
5379 orte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’ urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste
5380 —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre vie, citoyens 
5381 ses crottes de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre vie, citoyens ! Et vous pensez que c’est un grand pro
5382 de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre vie, citoyens ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur l
5383 Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’ un tel milieu, moral et matériel ? L’école publique, telle que nous la
5384 us la voyons est semblable à tous ces monuments «  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècl
5385 té, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un style : c’est
5386 ue le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un style : c’est même le pire.